PORT-AU-PRINCE, vendredi 23 décembre 2022– Plus de trois ans après la fin de l’épidémie de choléra en Haïti, la maladie est réapparue début octobre 2022 dans un pays confronté à une grave crise sécuritaire et humanitaire.
« Après plus de 3 ans sans aucun cas de choléra signalé en Haïti, le 2 octobre 2022, les autorités nationales ont signalé deux cas confirmés de Vibrio cholerae O1 dans l’agglomération de la capitale haïtienne, Port-au-Prince », a annoncé le 3 octobre l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS), branche régionale de l’Organisation mondiale de la Santé.
Entre octobre 2010 et février 2019, le virus du choléra avait entraîné plus de 820.000 cas et causé la mort de quelque 10.000 personnes en Haïti.
Face à la résurgence de la maladie début octobre, l’OPS travaille en coordination avec les autorités de santé publique haïtiennes pour soutenir la réponse, alors que « la violence des gangs continue d’affecter Port-au-Prince et d’autres villes », rendant l’accès aux zones touchées difficile.
La riposte est axée non seulement sur la limitation de la propagation de la maladie, mais vise également à informer la population sur la manière de prendre des mesures pour sauver des vies à la maison.
Dans ce contexte de retour du choléra, le Conseil de sécurité de l’ONU a instauré le 21 octobre un régime de sanctions pour réprimer la violence des gangs, qui entrave la réponse à l’épidémie.
Le régime de sanctions cible les chefs de gangs et ceux qui les financent, dans l’espoir d’atténuer des mois de violence et d’anarchie qui ont alimenté une crise humanitaire majeure.
Par ailleurs, le 15 novembre, l’ONU et ses partenaires ont poursuivi leur mobilisation en lançant un appel de fonds humanitaire de 145,6 millions de dollars pour soutenir le pays dans la réponse d’urgence face à la nouvelle vague de choléra et apporter une aide vitale à 1,4 million de personnes vivant dans les zones les plus affectées.
« Le choléra est une maladie évitable et traitable, et, fort de leur expérience et de leur savoir-faire, les institutions nationales ont rapidement mis sur pied une stratégie de réponse avec l’appui indéfectible de l’ensemble de la communauté humanitaire locale et internationale » a déclaré la Coordinatrice résidente et de l’action humanitaire de l’ONU, Ulrika Richardson.
La crise du choléra frappe de plein fouet des populations déjà vulnérables. 4,7 millions de personnes, soit près de la moitié de la population, connaissent des niveaux élevés d’insécurité alimentaire.
La population fait également face à une hausse de la violence due aux activités des gangs armés. Ces derniers utilisent notamment les violences sexuelles comme arme pour terroriser la population, et ainsi conquérir et asseoir leur contrôle sur le territoire. Près de 100.000 personnes sont actuellement déplacées après avoir fui les violences qui frappent le pays depuis juin 2021.
Deux mois et demi après le début de la résurgence du choléra, plus de 1.260 cas ont été confirmés et plus de 290 décès ont été enregistrés.
Le 13 décembre, l’Organisation panaméricaine de la Santé (OPS) a annoncé qu’environ 1,17 million de doses de vaccins oraux contre le choléra avaient été reçus par Haïti alors que les cas continuent d’augmenter.
Selon la branche régionale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’objectif initial de la campagne de vaccination est de cibler les personnes de plus d’un an à Cité Soleil, Delmas, Tabarre, Carrefour et Port-au-Prince dans le département de l’Ouest et à Mirebalais dans le département du Centre – des zones où la majorité des cas de choléra ont été signalés à ce jour.
« Les vaccins oraux sont une arme supplémentaire dans notre lutte contre le choléra et peuvent contribuer à ralentir la transmission », a fait valoir la Dre Maureen Birmingham, Représentante de l’OPS/OMS en Haïti.
Selon l’UNICEF, environ la moitié des cas de choléra détectés à Haïti concernent des enfants, dont beaucoup sont particulièrement fragiles à cause d’un système immunitaire affaibli par le manque de nourriture, dû à la pauvreté.
« J’ai été choqué de voir de nombreux enfants en danger de mort dans les centres de traitement du choléra. En quelques heures seulement, la diarrhée aqueuse aiguë et les vomissements les déshydratent et les affaiblissent à tel point qu’ils risquent de mourir s’ils ne reçoivent pas un traitement adéquat en temps voulu », a déclaré Manuel Fontaine, Directeur du Bureau des programmes d’urgence de l’UNICEF, au terme d’une visite de quatre jours en Haïti en novembre.
Malgré cette situation préoccupante, l’UNICEF estime que ce cercle vicieux entre la malnutrition et le choléra peut être brisé. « Un traitement simple, abordable et efficace peut sauver la vie des enfants haïtiens, à condition d’atteindre les familles les plus vulnérables avant qu’il ne soit trop tard », a fait valoir M. Fontaine.