Washington, 12 mars 2021- Le témoignage de Emmanuela Douyon devant la commission des affaires étrangères du congrès des Etats-Unis a porté sur la situation globale du pays marquée notamment par la corruption, les violations des droits humains et de la constitution, la mise en place de la dictature et l’absence de conditions politiques et techniques pour la tenue d’élections dans le pays.
A l’issue de cette audience publique sur la crise haïtienne, Emmanuela Douyon, membre du directoire de l’organisation socio-politique, ‘’Nou Pap Domi, ‘’ a fait certaines recommandations aux autorités américaines pour qu’elles ajustent leurs politiques estrangères en fonction de la réalité d’Haïti.
Elle a estimé que les États-Unis devraient reconnaître la situation en Haïti aujourd’hui comme une lutte du peuple haïtien pour la mise en place d’un gouvernement servant leurs intérêts et de construire la démocratie, pas simplement une lutte entre les politiciens pour le pouvoir. ‘’Le gouvernement des États-Unis devrait demander conseil à la société civile haïtienne légitime et représentative concernant les recommandations sur la voie à suivre pour traverser la crise actuelle, les violations des droits de l’homme et la corruption, a-t-elle fait savoir.’’
‘’Plutôt que de prendre parti dans un différend constitutionnel, il sera plus utile d’écouter et d’offrir la solidarité avec le peuple haïtien, qui ne reconnaît plus Jovenel Moïse comme leur président, a encore déclaré Emmauela Douyon.’’
Selon Madame Douyon, ‘’les États-Unis ne devraient pas soutenir les récents actes inconstitutionnels de Jovenel Moïse, notamment la préparation d’un référendum constitutionnel en violation du processus d’amendement énoncé dans la Constitution, la nomination par décret d’un conseil électoral provisoire (CEP), dont les membres ne sont pas assermentés comme l’exige la loi, le congédiement récent et le remplacement subséquent de trois juges de la Cour suprême.’’
Toujours dans ses recommandations, elle déclaré que le Secrétaire au Trésor, le Procureur général et le Secrétaire d’État devraient mettre les institutions américaines chargées de l’application de la loi et des droits de l’homme à enquêter sur le blanchiment d’argent, le trafic d’armes, les violations des droits de l’homme et d’autres actes illégaux commis par des responsables haïtiens et des dirigeants du secteur privé. ‘’Les États-Unis devraient appliquer des sanctions individuelles en vertu de la Loi Magnitski mondiale, le cas échéant, a-t-elle suggéré.’’
Elle a poursuivi pour dire que le gouvernement des États-Unis devrait reconnaître que, dans le contexte actuel — avec la violence des gangs parrainée par l’État, les violations des droits de l’homme, l’autoritarisme croissant, un conseil électoral provisoire inconstitutionnel et illégal (CEP) et l’absence d’inscription des électeurs — des élections libres et équitables ne peuvent être organisées en toute sécurité dans un délai d’un an. Les crises électorales récurrentes et les crises politiques qui ont suivi ont érodé la confiance des citoyens dans leurs gouvernements.
‘’ Il est temps de montrer aux gens que la démocratie fonctionne en empêchant les fonctionnaires corrompus, incompétents et autoritaires de rester au pouvoir au nom de la démocratie alors qu’ils en profitent pour saboter la démocratie, a affirmé l’activiste politique.
‘’Les États-Unis devraient reconnaître que les tentatives antérieures menées par l’étranger visant à renforcer la démocratie en Haïti n’ont pas conduit à des progrès, et ont même été contre-productifs, le gouvernement des États-Unis et la communauté internationale devraient plutôt suivre l’exemple de la société civile haïtienne pour déterminer quand soutenir les élections en Haïti, a-t-elle précisé.
Se faisant la porte-parole des prisonniers politiques, elle a déclaré que, les États-Unis devraient soutenir les appels de la société civile haïtienne en faveur de la libération immédiate des personnes arrêtées le 7 février 2021 et ne pas donner foi au récit du gouvernement étant donné l’absence de preuves crédibles d’une tentative de coup d’État.
‘’Le juge Dabrésil de la Cour suprême a été libéré, mais les autres sont toujours en détention, malgré le fait que les organisations de défense des droits humains qui ont enquêté sur l’affaire ont signalé que leur détention était arbitraire et qu’elle pourrait avoir été motivée par des considérations politiques, a soutenu Madame Douyon. ‘’
‘’Bien qu’il n’y ait pas suffisamment d’informations sur l’état de l’affaire à ce stade, il est néanmoins nécessaire d’appeler à la libération immédiate des détenus, compte tenu de l’absence de preuves crédibles, des risques de covid-19 en détention et des conditions inhumaines de détention préventive, a-t-elle suggéré.’’
Elle a conclu en soulignant que le peuple haïtien est résolu dans son désir d’une véritable démocratie qui fonctionne pour tous et qui doit pouvoir compter sur le soutien de ses amis et partenaires, y compris le gouvernement américain, dans cette poursuite.