Le projet de Constitution de Jovenel Moïse consacre l’instauration d’un État présidentiel l’institutionnalisation de la corruption et la suppression de l’État de droit, selon Me. Guerby Blaise

Me Guerby Blaise, Avocat, Doctorant en droit

Paris, 10 avril 2021- De l’avis de Me Guerby Blaise, l’avant-projet de la nouvelle constitution de Jovenel Moïse constitue un étranglement de la démocratie contemporaine.

Comparé à la constitution de 1987, le texte de Jovenel Moïse ferait table rase des acquis et des principes fondamentaux de la démocratie consacrant la séparation des pouvoirs, selon Guerby Blaise qui fait une analyse détaillée du document qui viserait à garantir l’impunité du clan au pouvoir des actes qui lui sont reprochés.

L’homme de loi évoque l’article 60-1 de la constitution de 1987 qui stipule que, ‘’ Aucun des trois pouvoirs ne peut sous aucun motif, déléguer ses attributions en tout ou en partie, ni sortir des limites qui lui sont fixées par la Constitution et par la loi’’ pour justifier que Jovenel Moïse, à travers sa constitution, veut établir un régime hyper-présidentialiste dans le pays.

Selon l’avocat, contrairement à la constitution de 1987, le projet de constitution de Jovenel Moïse instaure la concentration des prérogatives des trois pouvoirs entre les mains d’un seul homme ; autrement dit, le président de la République. ‘’D’où l’instauration d’un État présidentiel qui se traduit par le contrôle direct du pouvoir exécutif, le contrôle indirect du pouvoir législatif et la mise sous coupe réglée du pouvoir judiciaire, soutient Me. Blaise.

La suppression du poste de premier ministre et son remplacement par un vice-président sans pouvoir réel d’autre que d’assister le président, est la manifestation la plus évidente de ce présidentialisme fort créé par la constitution de Jovenel Moïse, selon Guerby Blaise qui cite l’article 158 du document qui ne fait des ministres et Secrétaires d’État que des collaborateurs immédiats de ce dernier.

‘’Le Vice-président n’a aucun pouvoir sur ces derniers. D’ailleurs, ils sont nommés et révoqués à la discrétion du président de la République au regard de l’article 161 de ce texte, précise l’avocat.’’

Me. Blaise évoque également les articles 146 et 148 de la constitution de Jovenel Moïse qui confèrent des pouvoirs étendus au président au détriment des attributions du parlement pour intervenir sur des projets économiques, sociaux ou environnementaux ; voire se substituer au Parlement pour intervenir dans tous les domaines d’intérêt général.

En plus de placer la justice sous couple réglée avec la création d’une ‘’Cour Constitutionnelle’’ présidentielle, le texte de Jovenel Moïse s’inscrit dans une dynamique d’institutionnalisation de la corruption, selon ce qu’écrit Guerby Blaise qui note que, ‘’la constitution de Jovenel Moïse confère le bénéfice de l’immunité au président de la République et l’ensemble de son Gouvernement (art. 139, 167), ainsi que les parlementaires (art. 107) même à la fin de leur mandat.’’

Me. Guerby Blaise relève que, ‘’la préoccupation de ce nouveau texte de changement constitutionnel ne vise pas l’intérêt général. La motivation de son porteur est d’ordre politique dans le but d’assurer une sécurité juridique au travers de l’institutionnalisation d’une ‘’immunité éternelle’’ pour s’assurer de sa tranquillité concernant d’éventuels faits dont il se serait reproché.’’

Appelant à la réprobation de la constitution de Jovenel Moïse qui veut établir une présidence a vie parcellaire, M. Blaise exhorte les élites haïtiennes à y porter une attention particulière afin d’en faciliter la compréhension à la population. Selon lui, ‘’la démarche de Jovenel Moïse est un programme « broyeur de vies et de destins » dont la planification ne semble pas être un hasard.’’

 

La radiographie du projet de changement de Constitution de Jovenel Moïse à la lumière de la Constitution de 1987