PORT-AU-PRINCE, dimanche 12 novembre 2023– Le parti les Engagés pour le Développement (EDE) exprime ‘‘sa préoccupation et sa consternation par rapport à la dernière déclaration jugée fâcheuse, déplorable et inacceptable de la cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), Maria Isabel Salvador, sur la situation politique du pays.’’
La semaine dernière, à travers un message posté récemment sur son compte X (ancien Twitter), Salvador a déclaré : « Le seul chemin pour sortir d’une transition politique ce sont des élections démocratiques, transparentes et participatives. On ne sort pas d’une transition par une nouvelle transition […]. Ceux qui proposent une « nouvelle transition » s’éloignent des principes démocratiques et veulent imposer leurs intérêts individuels en oubliant les intérêts du peuple ».
Dans une correspondance au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, la secrétaire générale du par EDE, Sterline Civile, ‘‘cette déclaration, qui s’apparente à une prise de position officielle du BINUH, intervient dans un contexte marqué par la poursuite des négociations entre les partis politiques de l’opposition et la société civile, d’une part, et le pouvoir en place, d’autre part, sous les offices du Groupe des Eminentes Personnalités (GEP) de la Communauté Caribéenne (CARICOM), en vue de parvenir à une solution consensuelle à la crise sociopolitique et sécuritaire que traverse le pays depuis l’assassinat du Président Jovenel Moïse, en juillet 2021.’’
Elle souligne que les partis politiques, qui réclament la démission du Premier Ministre Ariel Henry à l’échéance du 7 février 2024, fondent leur revendication, entre autres, sur les dispositions du document de « Consensus national pour une transition inclusive et des élections transparentes » signé le 21 décembre 2022 entre le chef du Gouvernement et ses alliés politiques, dont l’article 20 dispose que ‘‘les signataires conviennent que la période de transition englobera les nouvelles élections générales qui se tiendront en 2023 et l’entrée en fonction d’un Gouvernement nouvellement élu le 7 février 2024.’’
Mme Civile note également que ledit Consensus a remplacé ou prorogé « l’Accord politique pour une gouvernance apaisée et efficace de la période intérimaire » du 11 septembre 2021 dont l’article 11 établit que l’une des missions du Gouvernement est de « créer les conditions pour la tenue des élections générales, au plus tard à la fin de l’année 2022, sous l’empire de la nouvelle constitution et l’installation des élus légitimes au début de l’année 2023 », qui n’a jamais pu être appliqué par manque ou absence de volonté de la part du Premier Ministre.
Selon elle, ‘‘il est clair que ledit document qui a été signé par M. Henry, puis adopté en Conseil des Ministres et publié dans le Journal officiel de la République, Le Moniteur, constitue un engagement juridico-politique opposable à l’ensemble de ses signataires.’’
« Il est indéniable que le chef du Gouvernement a piteusement échoué aussi bien à mettre en œuvre tous les engagements auxquels il a souscrit avec ses alliés politiques, à réaliser l’apaisement du climat sociopolitique et à rétablir la sécurité publique sur l’ensemble du territoire national en vue de faciliter la tenue des élections, qu’à garantir les services de base à la population et à redresser l’économie nationale », renchérit-elle.
Sterline Civile estime également que cette prise de position de Mme Salvador contrevient aux règles et principes qui gouvernent les relations diplomatiques, particulièrement à l’article 41, 1e alinéa de la Convention de Vienne du 8 avril 1963 qui stipule que : « sans préjudices de leurs privilèges et immunités (diplomatiques), toutes les personnes qui bénéficient de ces privilèges et immunités ont le devoir de respecter les lois et règlements de l’Etat accréditaires. Elles ont également le devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures de cet Etat ». Elle contrevient aussi à l’article 2, alinéa 7 de la Charte des Nations Unies stipulant que : « aucune disposition de la présente Charte n’autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétente nationale d’un Etat ».
Elle souligne que par souci de cohérence, ‘‘la Cheffe du BINUH gagnerait à rester dans la ligue des partenaires et amis de la communauté internationale qui n’ont eu de cesse d’affirmer qu’ils privilégient la recherche d’une solution haïtienne à la crise, à travers le dialogue et la concertation. Elle devrait donc s’abstenir de toute action, de toute déclaration intempestive et malencontreuse qui serait susceptible d’envenimer le climat sociopolitique ou entraverait le dialogue ou toute possibilité d’entente entre les acteurs.’’
‘‘D’une manière générale, écrit-elle, la communauté internationale se devrait de prévenir ou d’éviter toute interférence qui serait de nature à polariser davantage la classe politique ou à entrainer des dérapages préjudiciables au rapprochement des points de vue, au compromis indispensable à une issue heureuse, consensuelle, viable et pérenne à la crise. ‘’
« Ce que veut et demande Haïti c’est l’expertise technique et l’accompagnement solidaire de l’international pour l’aider à sortir de la spirale de l’instabilité, de la pauvreté et du sous-développement, non pas de ses diktats ou injonctions qui, de tout temps, se sont révélés contre-productifs voire néfastes », ajoute-t-elle.
Le 23 octobre dernier, Maria Isabel Salvador avait déjà déclarée devant le conseil de sécurité des Nations-Unies que : « Les élections sont la seule voie et le seul impératif pour restaurer les institutions démocratiques en Haïti. Seules la démocratie et la primauté du droit peuvent constituer la base à partir de laquelle Haïti peut progresser vers le développement et la croissance ».