Par Me Evens Fils, bâtonnier de Fort-Liberté
FORT-LIBERTÉ (NE), dimanche 6 août 2023-Là, c’est une excellente question qui nous ramène à la dynamique du droit. Le droit est une science normative. Il est tissé de nuance, de ressemblance, de dissemblance, d’invraisemblance, de différence malgré les apparences.
Au fait, pour le législateur de 1836, on ne peut pas être juge d’instruction, sans être juge de siège. C’est l’esprit de l’article 44 du CIC. Donc, celui qui est juge d’instruction est censé juge de siège aussi. Donc, tous les juges sont récusables parce que la fonction de tout juge est de juger. Mais, le juge d’instruction n’est qu’une appellation par analogie à la fonction principale du juge de siège.
Mais le juge d’instruction ne juge pas, il instruit, il mène des enquêtes, il cherche des indices. Il est un Officier de Police Judiciaire (OPJ), à ce titre. C’est pourquoi, il ne peut connaitre du jugement de l’ordonnance de son enquête. D’une manière littérale, le juge d’instruction est le juge de siège qui a aussi pour attribution de mener des enquêtes quand il ne juge pas, quand il ne remplit pas la fonction de juger.
C’est pourquoi l’arrêt de la Cour de Cass. 24 déc. 1872, se trouvant à la note 58, au bas de l’article 429 CIC annoté par Me Linstant Pradines est tranchant et incontestable.
On ne peut pas faire obstacle à une enquête. L’ordre public ne peut jamais être suspendu. Ce serait suspendre l’ordre public ou en annuler l’effet, ou plutôt l’existence, si un ou plusieurs citoyens pouvaient par des récusations, arrêter l’action de la police judiciaire. La loi ne peut vouloir et prescrire l’absurde.
D’ailleurs, une autre considération juridique fondamentale et primordiale: le juge d’instruction est saisi in rem. Il est saisi du fait énoncé dans la plainte ou le réquisitoire et non des personnes. Initialement, le juge d’instruction ne vise personne. Il peut même instruire contre X. Pourquoi une personne spécifique l’aurait donc récusé ?