Le parti AAA exige une enquête rigoureuse et transparente sur le meurtre de Jovenel Moïse et sur tous les autres crimes commis dans le pays 

Youri Latortue, Dirigeant du parti AAA

Port-au-Prince, samedi 24 juillet 2021-   Le Parti Ayiti An Aksyon (AAA) membre de l’Opposition plurielle, tient à confirmer qu’il continue de participer aux efforts communs des forces politiques haïtiennes et de la société civile en vue d’aboutir à une solution concertée à la crise, découlant d’une gouvernance désastreuse de l’Administration Publique; et aggravée par l’assassinat de l’ancien Président, Jovenel Moise.

Le Parti Ayiti An Aksyon s’est toujours opposé et continue de s’opposer aux appels à la violence; ce qui, à certaines occasions, lui a valu une grande incompréhension. Il s’est maintenu à distance de toute action malhonnête envers quiconque, et en particulier, ses adversaires politiques pour triompher dans la légitimité. Aussi, le Parti Ayiti An aksyon condamne, sans réserve, l’assassinat ignoble de l’ancien Président Jovenel Moise, perpétré le mardi 6 Juillet 2021, en sa résidence de Pèlerin 5. Il s’agit avant tout du meurtre d’un homme, et tout homme, quel qu’il soit, détient le droit inaliénable à la vie, à la sécurité, à la justice.

Priver le citoyen Jovenel Moise de l’opportunité de se défendre de ce qui lui est reproché, c’est également priver la nation des mérites d’un digne combat contre une gouvernance jugée inadéquate et corrompue. Nous tenons à rappeler dans ce cas, qu’il est question de la désacralisation d’un symbole d’autorité; accepter que ce symbole de souveraineté soit ainsi vilipendé, même si c’est la résultante d’une longue érosion, c’est accepter que la nation elle-même soit rabaissée et amoindrie.

Banaliser un tel crime, parce qu’il aurait abouti au départ du pouvoir, d’un Président contesté, irait à l’encontre du noble projet de renforcement de l’Etat de Droit que nous défendons depuis tant d’années.  Est-ce pourquoi, en rappelant la ligne du Parti, il convient aussi de mettre en exergue, avec emphase, notre appui à la poursuite d’une enquête rigoureuse et transparente contre les coupables.

Le Parti Ayiti An Aksyon profite aussi de l’occasion pour rappeler son engagement farouche -aux cotés des organismes de droit de l’homme- à combattre l’impunité et renforcer les bases d’une Haïti plus juste, plus équitable, plus vivable. C’est l’opportunité d’assurer que justice soit également rendue aux nombreuses victimes de son régime, tel qu’Erick Elias Diogène (Garde du Corps du Sénateur Youri Latortue), Me Monferrier Dorval, Antoinette Duclaire, Nehemie Joseph, Gregory Saint Hilaire, Jean Tatoo (membre du Parti) et bien d’autres, que nous nous proposons de continuer de rappeler, sans oublier les prisonniers politiques dont les conditions de détention se font de plus en plus inhumaines.

Le Parti Ayiti An Aksyon maintient aussi sa mobilisation contre la corruption endémique.  Lorsqu’en 2016, les élus législatifs du Parti ont dénoncé la mauvaise gestion du fonds Petrocaribe, Jovenel Moise leur avait promis son soutien une fois élu, ce qui lui avait valu l’allégeance d’Ayiti An Aksyon qui avait largement soutenu son élection.  Il s’était engagé à soutenir la reddition des comptes financés par le Pétrole Vénézuélien,  et bien d’autres, ce à quoi il a fini par systématiquement s’opposer.

Plus tard, les rapports de la Commission Beauplan, et ceux de la CSC/CA, ont tous confirmé les allégations soulevées.  Cependant, le refus par les autorités d’appuyer les demandes de reddition de comptes au sérieux, a cristallisé la rupture et défait les alliances politiques avec ceux qui ne se sont pas retrouvés dans la logique d’une administration assainie.  L’entêtement gouvernementale, de ne pas intervenir contre la corruption endémique; et même de l’aggraver avec une pratique de surfacturation, de  favoritisme et de détournement de fonds publics normalisée par des projets comme la « Caravane du Changement », ont forcé Ayiti An Aksyon à passer officiellement à l’opposition.

Si ce choix s’est fait au prix d’énormes sacrifices, il a également renforcé le Parti.  De nombreuses alliances avec des secteurs qui partageaient les inquiétudes d’Ayiti An Aksyon face au gaspillage, à la mauvaise gestion des ressources nationales, au banditisme d’Etat ont pu se solidifier, et fortifier un mouvement anti-corruption auquel AAA demeure encore fortement  rattaché.

C’est à la recherche d’une administration assainie d’abord, que le Parti Ayiti An Aksyon s’est forgé une ligne visant à documenter les torts, et à les dénoncer sans violence.  Il s’est toujours agi de valoriser les résultats, à travers des reformes efficaces et l’inclusion des secteurs marginalisés, tout en protégeant les droits de la personne.  Malheureusement les dérapages et la continuité des massacres comme faisant parti de la gestion des affaires courantes, a fini par décidé d’une rupture totale avec le régime au pouvoir.

Finalement, c’est l’obstination à ne pas vouloir moraliser la gestion des affaires du pays qui allait plus fortement amener la déstabilisation de l’équilibre fragile devant soutenir l’administration de Jovenel Moise.  Car pour calmer le mécontentement d’une jeunesse en quête de changement, l’oppression n’a pas tardé à se faire ressentir, tout comme l’impunité pour les oppresseurs d’abord,  a rapidement suivi. La politisation des forces de l’ordre, l’opacité des dépenses publiques, la micro gestion de l’Etat par le président de la République, ne pouvait qu’apporter plus de misère.

L’approche Gouvernementale s’est limitée à investir dans l’armement, dans la propagande et dans la coercition plutôt que dans l’assainissement et l’efficacité de la gestion du pays; et les Opposants, comme les manifestants sont devenus des personnes à traquer et à faire taire, lorsqu’ils refusaient les avantages illégalement proposés.

Le Parti AYITI AN AKSYON n’a jamais cessé –à travers un processus inclusif- d’œuvrer à des solutions concertées. Malgré les sacrifices exigés par une telle approche qui fait prévaloir le groupe, le Parti AAA considère avoir contribué aux propositions de sortie de crises suivantes :

  • L’Accord Marriott en novembre 2019 ;
  • L’Accord du 30 janvier 2021 ;
  • L’Accord du 5 juin 2021.

Ayiti An Aksyon a toujours prôné un départ ordonné pour remplacer le Président Jovenel Moise à la fin de son mandat le 7 Février 2021.  Pour que le Pays ne rentre pas dans un désordre et dans un tumulte social incontrôlable, il demeure encore engagée aux efforts visant le consensus, car la situation actuelle n’est pas le produit d’une révolution gagnée, mais le produit d’un acte barbare visant à plonger le pays dans une illégalité encore plus grande.

C’est justement dans l’esprit d’éviter tout dérapage que nous avions signe le Protocole d’entente du 9 Juillet 2021 faisant du Dr Ariel Henry le Premier Ministre et de Joseph Lambert le Président provisoire.  Cette entente était le fruit d’un difficile compromis qui devait garder le choix de l’ancien Président, soit M. Ariel Henry comme Premier Ministre, et admettre le choix du Parlement, soit le Sénateur Joseph Lambert comme Président.  Il s’agissait de combiner les forces fideles aux deux protagonistes, qui à eux deux arrivaient à rassurer plus de 100 regroupements, partis politiques conséquents et de la Société Civile.

Ce protocole devait être suivi d’une feuille de route devant assurer une cohésion dans les démarches du nouveau gouvernement.  Dans un esprit consensuel il s’agissait de rétablir une certaine stabilité combattre l’insécurité, freiner la corruption, assurer le respect des droits de l’homme et libérer les prisonniers politiques, tout en tenant compte des besoins immédiats telle les affaires courantes, et l’assistance à la rentrée scolaire 2021. Dans ce protocole, nous avons voulu combatte la continuité pour une nouvelle orientation devant préparer des élections crédibles, honnêtes et démocratiques.

Sensible au fait que les circonstances n’émanent pas d’une révolution populaire, mais d’un assassinat choquant, le Parti AAA a cru essentiel de faire preuve de pragmatisme.  Est-ce pourquoi, la solution proposée prévoit plusieurs étapes. Les forces de l’Opposition ont un rôle dans le bon déroulement des étapes en question pour assurer l’implémentation des mesures devant assurer des élections honnêtes.  Ces forces pourront ainsi se rassembler et se présenter en ordre serré aux élections ; à ce titre, elles doivent penser présenter leur programme de rupture par-devant la population dont il faut mériter la confiance.

Le Parti Ayiti An Aksyon, bien qu’il ait enlevé son soutien au Gouvernement du Premier Ministre Ariel Henry qui s’est inscrit dans la continuité du PHTK, au lieu d’avoir le courage de rester fidèle à ses engagements au temps des premiers échanges entre lui et l’Opposition, demeure attaché au Protocole d’Entente en rapport à son président provisoire, puisque c’est le seul document depuis environ 4 ans, qui ait été signé aussi largement par les  forces de l’opposition et les partis au pouvoir.

Le Parti AAA rappelle que plusieurs solutions haïtiennes ont été avortées parce qu’elles ne correspondaient pas à la vision d’Amis de l’Internationale.  Si tel est le cas, au lieu de s’opposer aux accords entre haïtiens, autant tenir des Etats Généraux qui incluraient lesdits Amis. Au moins, à ce titre, il serait évident pour les locaux, qu’ils sont sous occupation étrangère, et que la souveraineté nationale n’est qu’un leurre.  Cela dit, le Parti Ayiti An Aksyon est ouvert à toute coopération internationale respectueuse des principes du droit international public.

Toujours est-il que le Parti Ayiti An Aksyon réaffirme son engagement à un programme de rupture, par rapport aux pratiques en cours. Pour arriver à cette rupture, il faut des solutions consensuelles, aussi proches que possible du cadre légal haïtien qui exige un Exécutif bicéphale.  La nécessité d’un accord s’impose pour le bon déroulement de cette étape.  Finalement, pour harmoniser la collaboration et la complémentarité des rôles, il faut une feuille de route où les inquiétudes et les réserves peuvent être adressées, avec une exécution garantie.

Le Parti Ayiti An Aksyon, va continuer à travailler dans cette ligne et demande a ses membres, partisans et citoyens haïtiens en général de suivre les consignes du Parti afin d’arriver à une « révolution tranquille, pacifique »[1] pour le développement et l’épanouissement du peuple haïtien.

 

Fait à Port-au-Prince, le 24 Juillet 2021