‘’Le faire-semblant,’’ est une réflexion du professeur Serge H. Moïse que la rédaction de RHINEWS prend plaisir à partager avec ses lecteurs. Le choix du titre de cette réflexion n’est pas innocente. C’est un constat. Le faire semblant tend à devenir un mode de vie voire un élément de notre culture au niveau de notre société-une société où la majorité d’entre nous, vit une vie de procuration. On refuse d’être soi-même pour vivre dans la peau d’un autre. L’une des conséquences de ce comportement, c’est que nous nous déresponsabilisons puisque nous arrêtons d’être nous-mêmes. N’est-ce pas du faire- semblant ?
Par Me Serge H. Moïse,
Montréal, 19 septembre 2020- Simuler, mentir, c’est tromper, rouler, duper et même nuire, mais en faisant semblant de dire sincèrement la vérité. Les conséquences d’un mensonge peuvent varier d’un fait anodin et cocasse à la mise à mort dépendamment du contexte ou de l’importance des intérêts en jeu.
L’humanité en a fait l’expérience depuis la nuit des temps, ce qui explique l’emphase, et ce, dans toutes les cultures, qui est mise à enseigner dès le plus jeune âge, à ne point mentir.
On ne parviendra peut-être jamais à extirper de nos mœurs cet irrésistible penchant des uns et des autres à fignoler de temps à autre et pour une raison ou une autre, la vérité des faits. Qu’à cela ne tienne, encore faut-il toujours persister à proscrire cette ignoble pratique qui semble inhérente à la nature humaine et qui s’est toujours située aux antipodes de la vertu.
Rien de vraiment valable ne saurait se réaliser en dehors des prescrits de la morale et l’une des premières leçons de cette science, c’est d’être, autant que faire se peut, honnête avec soi-même et avec les autres.
Pourtant, il arrive aux prédicateurs, aux leaders communautaires ou politiques eux-mêmes de sombrer volontairement ou non dans ce malheureux travers.
L’on comprendra que les autres qui attendent que l’exemple viennent d’en haut, soient sceptiques et trop souvent réfractaires à leurs enseignements.
En politique comme ailleurs, la bonne volonté, la probité intellectuelle, le sens aigu de l’innovation sont, entre autres, les règles fondamentales de toutes démarches susceptibles d’améliorer les conditions de vie de l’ensemble de la population.
Nos décideurs semblent avoir fait leur deuil de ces principes élémentaires, et ce, depuis plusieurs décennies, d’où cette détérioration accélérée et sous toutes ses formes, de la problématique haïtienne.
Le poisson pourrit par la tête, dit le vieux proverbe, et cela se répète constamment au pays, sans apporter le moindre changement dans nos comportements. Á croire que les beaux discours et analyses ne sauraient suffire à faire renverser la vapeur. Ce n’est certes pas en nous gargarisant de terminologies ronflantes et apparemment savantes que nous allons relever le défi qui nous attend depuis pus d’un demi-siècle.
Nous attendons tout de la communauté internationale qui avoue être incapable de réaliser des miracles. Ses représentants n’ont pas à consentir les sacrifices qui nous répugnent, ils n’ont pas à risquer leurs vies à notre place alors que notre nouvelle devise est depuis quelque temps déjà : « Pitô nou lèd nou là ».
Tous ensemble, main dans la main, nous le pouvons. En effet, le miracle haïtien est encore possible, mais ce n’est certes pas l’affaire d’une personne ou d’un groupe. La preuve est faite par quatre, que les exercices de ‘’m’as-tu vu ?’’ n’ont servi à rien. Il est donc impératif et indispensable que nous mettions de côté nos intérêts personnels et mesquins, pour difficile que cela puisse paraître dans le contexte haïtien, afin d’amorcer la remontée lente mais sûre et rejoindre le concert des nations dites civilisées.
Tous ensemble, main dans la main, nous le pouvons. Oui en vérité, quand nous déciderons d’arrêter de faire semblant :
Semblant d’être compétents et intègres
Semblant d’aimer la mère-patrie
Semblant de nous aimer les uns les autres
Semblant de travailler au sauvetage du pays
Semblant de vouloir y instaurer la démocratie
Semblant de respecter la constitution et les lois
Semblant d’être fiers de notre haïtiannité.
Quand individuellement et collectivement, nous en aurons assez de cette laideur que nous projetons comme image, tant à l’intérieur du pays que dans la diaspora, nous les dignes filles et fils de la première république nègre, commencerons à mériter notre rédemption salvatrice. Cela ne dépend que de nous et personne ne le fera à notre place.