”Le besoin d’un nouveau contrat social haïtien, galvaudé en 2004, devient une nécessité en 2024 : Il faut organiser la Conférence Nationale Souveraine au plus vite”…

Yvener Adam, MPA-IO...

Par Yvenert Adam,

Les Fondements de la Conférence Nationale Souveraine (CNS)

 WEST PALM BEACH (Fl), vendredi 26 juillet 2024 Le groupe 184 d’André Apaid, Jr. a vu juste quand en 2004 s’est prononcé en faveur d’un nouveau contrat social pour Haïti. Malheureusement, il parait que cette demande de la classe possédante haïtienne était beaucoup plus de la propagande pour des objectifs violés que pour solutionner le chaos haïtien. Toutefois, il convient de rappeler l’engagement du feu Sénateur Turneb Delpé, des plateformes politiques RASANBLE de 2009 et MOPOD qui, en faveur d’un véritable nouveau contrat social, ont fait la promotion pour une Conférence Nationale Souveraine en Haïti. Delpé a cru qu’une Conférence Nationale Souveraine était un instrument pour changer les régimes politiques existants comme l’a suggéré les théories de Jean Jacques Rousseau dans le Contrat Social. Pour comprendre le bien-fondé de CNS et évaluer sa nécessité pour Haïti, il faut jeter un coup d’œil sur les résultats des CNS jusqu’ici réalisées.

Une conférence est le lieu de confrontation d’idées et de résolutions. Elle est nationale si elle réunit des délégués de différents secteurs politiques et géographiques du pays, et souveraine si ses résolutions ont la force de lois. On organise une conférence nationale souveraine dans le but de sortir du chaos et de fonder des gouvernements représentants la population toute entière. Parmi les pays ayant expérimenté l’organisation de conférence nationale souveraine, il y a les pays d’Afrique subsaharienne de la francophonie comme le Bénin, la RDC (autrefois le Zaïre), le Congo, le Gabon, le Togo, ou le Tchad. Ces pays étaient conscients que leur régime politique souffrait de crédibilité institutionnelle et qu’il fallait réconcilier le pays avec lui-même aux fins de reconstruire la confiance et renverser les tendances anti-démocratiques.

En effet, après leur indépendance, ces pays africains se sont retrouvés dans un chaos à gérer. Les empreintes des empires inégaux, fondés sur l’exploitation de la population et l’extraction des ressources demeuraient vivantes. Les Africains devenaient maitres de leur destin devraient construire leur pays. Malheureusement, ces Africains éduqués par des agents du système antérieur reproduisaient le modèle que les colonisateurs avaient utilisé. Il en résulte que le système de domination de l’homme par l’homme s’endurcit, avec la bourgeoisie gouverne la grande masse.  Fabien Eboussi Boulaga, Philosophe et Écrivain camerounais a écrit : « Le système imparfait résultant de la colonisation a fait retomber beaucoup de pays africains en état de nature, ce qui les a conduits à une crise politique et ensuite économique » (Besse, 2006). Pour résoudre cette crise politique et économique, Boulaga a recommandé l’organisation de conférence nationale. Il a écrit : « L’épure abstraite du contraire de la crise nous donne une définition générale de l’objet de la conférence nationale, considéré dans sa visée essentielle de faire sortir de l’état de nature par l’institution du domaine proprement politique. » (Boulaga, 2009).

Exemple de la Conférence Nationale Souveraine de Benin (CNSB).

Nous nous referrons à la CNSB pour sa réussite et pour avoir été la première des conférences nationales souveraines en Afrique francophone. La CNSB a duré 2 mois et 6 jours, allant du 22 Décembre 1989 au 28 Février 1990. Les causes fondamentales de la CNSB furent les problèmes qui se sont accumulés depuis l’indépendance du pays en 1960. Il y a eu des problèmes des retards de paiement des salaires, la répression aveugle gouvernementale par le régime Marxiste-Léniniste du président Mathieu Kérékou, et la volonté délibérée de la masse béninoise de finir avec les pratiques obscurantistes du régime existant. Ainsi, le but de la CNSB fut de doter le pays d’une constitution comportant la séparation du Parti et l’État, la création d’un poste de premier ministre, et la décentralisation du pouvoir.

Les travaux de la CNSB ont débuté le 22 Décembre 1989 avec le comité national préparatoire de la conférence des forces sous la présidence de Robert Dossou. Dès son entrée le 19 Février 1990, le délégué Alexis Hountondji a déclaré : « la conférence nationale proclame sa souveraineté et la suprématie de ses décisions. » Il en résulte que, le 25 Février, 377 délégués contre 17 ont voté pour la souveraineté de la conférence. A ce moment-là, la conférence a proclamé : « ses décisions sont exécutoires. » (Boulaga, 2009). La conférence s’est clôturée le 28 Février, et le rapporteur général, Albert Tévoédjrè, a déclaré : « une reconquête de soi, de sa dignité de manière à reprendre l’initiative historique, la responsabilité de son destin, dans l’amitié avec les autres peuples et nations. » Le président Kérékou a fait le geste patriotique que commande le moment historique en acceptant les conclusions de la conférence, et aidant à la mise en œuvre des décisions de la conférence.

Considérations et Recommandations

Il est clair qu’Haïti redevient un pays en état de nature ; donc une jungle. La politique du « mètdam et Koken » des politiciens haïtiens doit être enfin terminée. Un dossier comme la Conférence Nationale Souveraine est trop sérieux pour être traité avec du « mètdam et Koken ». Le temps du régime politique raciste, contre-productif et obsolète est révolu. Il est temps pour qu’on se mette à la dimension des ancêtres. Les forces vives de la nation en 1803 ont créé un drapeau haïtien ; aujourd’hui, les forces vives de 2024 doivent tout mettre en œuvre pour trouver du savon afin de nettoyer le bicolore trop sali. Tout le monde parle d’un pacte de gouvernabilité pour les prochaines décennies à venir, mais aucun homme politique n’est prêt à faire le sacrifice que cela implique. Le pays demande la réconciliation nationale afin que chaque acteur puisse apporter sa contribution à la reconstruction de l’État d’Haïti.

Pour ce faire, il n’y a qu’une seule voie : La Conférence Nationale SOUVERAINE. Oui, souveraine. Si la conférence nationale n’est pas souveraine, ses résolutions vont être ignorées ou jetées à la poubelle. Cela serait du gaspillage d’argent, de temps et d’énergie. Haïti ne peut pas payer ce luxe. Beaucoup pensent que l’haïtien est dépassé et qu’une solution haïtienne au chaos haïtien est une chimère. Robert Gelbard, Assistant Sous-Secrétaire d’État américain en 1992, avait déclaré: « J’ai établi que les Haïtiens ont un chromosome en moins, celui du compromis et du consensus, et d’autre part, un chromosome en plus, celui des conflits et des dissensions. » (Péan, 2016). L’haïtien doit démontrer le contraire en dotant le pays d’un nouveau contrat social, capable de juguler la crise et poser les jalons pour une prospérité pour tous. De la même manière que l’haïtien a pensé et réalisé 1804, de même il peut encore faire de grandes choses dans le présent. Il faut convoquer la Conférence Nationale SOUVERAINE au plus vite.

 

Yvener Adam, MPA-IO

ydams22@gmail.com

Références

 

  1. F. Eboussi Boulaga. Les Conférences Nationales : une affaire à suivre. Paris, Karthala, 2009.

 

  1. Leslie Péan. (8 Mars 2016). Pour un Ordre Social Humain en Haïti (3 de 5). Récupéré le 4 Juillet 2024 de :

https://www.alterpresse.org/spip.php?article19823=#nb1

 

  1. Magalie Besse. La Conférence nationale souveraine, un pouvoir constituant original. Récupéré le 8 Mai 2024 de :

https://ddata.over-blog.com/xxxyyy/1/35/48/78/Magalie-Besse-conference-nationale-congres-AFDC.pdf