MIAMI, mardi 26 novembre 2024—Le Comité pour la protection des journalistes appelle le CONATEL, l’autorité des télécommunications d’Haïti, à mettre fin à la suspension d’une émission populaire en soirée sur Radio Mega, l’une des plus grandes chaînes de diffusion du pays, alors que la sanction a été imposée sans procédure régulière.
« Les autorités haïtiennes devraient revenir sur la suspension de l’émission de Radio Mega ‘Boukante Lapawòl’ (Échange de paroles) et s’abstenir d’interférer davantage avec la libre circulation de l’information », a déclaré Katherine Jacobsen, coordinatrice du programme du CPJ pour les États-Unis, le Canada et les Caraïbes, à Washington, D.C.
« Les autorités haïtiennes feraient bien de se concentrer sur le rétablissement de l’ordre dans le pays, plutôt que d’accuser les journalistes de faire de la propagande.»
La suspension a été imposée le 22 novembre après qu’un chef de gang haïtien recherché, Jimmy “Barbecue” Cherizier, ait appelé à l’émission la nuit précédente pour dénoncer des allégations de corruption publique, affirmant qu’il s’était vu offrir un pot-de-vin important de la part d’un membre du Conseil Présidentiel de Transition au pouvoir pour négocier la paix avec les gangs.
C’était la deuxième fois en plusieurs semaines que Cherizier venait à l’émission sans accord préalable, a déclaré le propriétaire de Radio Mega, le journaliste chevronné Alex Saint-Surin.
Le CONATEL a invoqué un décret de 1977 pour prononcer la suspension, sans donner à Radio Mega la possibilité d’expliquer l’incident ou de se défendre juridiquement.
“Des dirigeants notoires ont grandement bénéficié de temps d’antenne, diffusant des messages de haine et de terreur contre la société”, a déclaré le CONATEL dans une lettre adressée à la station.
Le CONATEL n’a pas immédiatement répondu à une demande du CPJ, mais un porte-parole du gouvernement a déclaré au CPJ dans un message WhatsApp que Radio Mega avait prêté ses ondes à la « propagande » de Cherizier, ajoutant qu’Haïti était un « État faible » luttant pour se défendre contre Viv Ansamn, une coalition de gangs lourdement armés dirigée par Cherizier.
Cherizier a appelé le conseil à démissionner et a lancé une série d’attaques meurtrières ces derniers jours visant le bureau du Premier ministre et d’autres bâtiments gouvernementaux.
Des membres armés de Viv Ansamn contrôlent de grandes parties de la capitale en utilisant des tactiques telles que le viol, le meurtre, le recrutement d’enfants et l’enlèvement pour terroriser la population au cours des neuf derniers mois, selon les Nations Unies.
Le groupe de soutien aux médias haïtiens SOS Journalistes a rejeté les accusations du CONATEL contre Radio Mega, affirmant que « Boukante Lapawòl n’a jamais servi de plateforme de propagande pour les gangs ».