Le mandat constitutionnel du président Jovenel Moïse expire le 7 février 2021. C’est incontestable ! Et la constitution de 1987 amendée, à travers son article 134-2 est claire là-dessus. Pour dissiper tout doute, la rédaction de RHINEWS propose à ses lecteurs une analyse, en deux parties, qui met en lumière, au regard de la constitution, les raisons pour lesquelles, Monsieur Moïse doit indiscutablement rendre le pouvoir, le 7 février prochain…
Premiere partie!
Port-au-Prince, 26 janvier 2021– La fin du mandat du Président Jovenel Moise, depuis quelques temps, est sur toutes les lèvres. Elle a fait couler beaucoup d’encres et de salives et chacun y va de sa propre interprétation de l’article 134.2 de la version amendée de la constitution de 1987. Ledit article est ainsi libellé :
« L’élection présidentielle a lieu le dernier dimanche du mois d’octobre de la cinquième année du mandat Présidentiel. Le Président élu entre en fonction le 7 février suivant la date de son élection. Au cas où le scrutin ne peut avoir lieu avant le 7 février, le Président élu entre en fonction immédiatement après la validation du scrutin et son mandat est censé avoir commencé le 7 février de l’année de l’élection ».
C’est justement le cas pour monsieur Moise qui s’est installé dans ses fonctions de Président de la République le 7 février 2017. En effet, les joutes électorales l’ayant conduit à ce poste sont les premières et seules tenues sous l’administration du Président Martelly. Elles ont été initiées au cours du deuxième semestre de l’année 2015. Le premier tour, de celles portant sur les présidentielles, s’est déroulé le 25 octobre 2015. Les nombreuses et récurrentes dénonciations de fraudes et d’irrégularités graves l’ayant caractérisé, ont contraint le Conseil Electoral Provisoire, après maintes tentatives infructueuses, à renvoyer, sine die, le deuxième tour. Monsieur Martelly a donc laissé le pouvoir le 7 février 2016 sans avoir pu compléter ce processus électoral et transmettre à un nouveau Président élu.
Le gouvernement de transition, installé pour combler ce vide au niveau de l’exécutif, contrairement à ce que véhiculent les conseillers de Monsieur Moïse, n’avait pas à organiser une nouvelle élection. Son mandat était limité à la relance du processus électoral, initié au cours de l’année 2015, après évaluation des étapes déjà franchies.
Il s’agit d’une recommandation formulée par la commission spéciale, mise en place par le Président Martelly, pour faire le jour sur les dénonciations de fraude et les accusations de corruption et de malversation ayant entrainé l’arrêt du processus. C’est cette évaluation des étapes déjà franchies, réalisée par la Commission Indépendante de Vérification Electorale (CIEVE) qui, en substance, a recommandé la reprise du premier tour des présidentielles. Les seuls candidats ayant participé au premier tour du 25 octobre 2015 ont été habilités à y prendre part. L’année de l’élection de Monsieur Moïse est bien 2015 et en référence à l’article 134.2, son mandat prend fin effectivement le 7 février 2021.
Un vide institutionnel sciemment préparé comme entre 2011-2014
Le président Jovenel Moise, à l’instar de monsieur Martelly dont il est l’héritier n’a manifesté aucune velléité et n’a arrêté aucune décision relative aux cycles électoraux prévus par la constitution.
Les articles 90.1 portant sur la date retenue pour l’organisation des élections législatives et 95-3 définissant les modalités de renouvellement des membres du Sénat ont été purement et simplement ignorés. Les échéanciers électoraux d’octobre 2017 et 2019 n’ont pas été respectés.
Article 90.1 L’élection du Député a lieu le dernier dimanche du mois d’octobre de la quatrième année de son mandat ».
Article 95.3 Le renouvellement du Sénat se fait par tiers (1/3) tous les deux (2) ans
L’annonce présidentielle du premier janvier 2019 aux Gonaïves, laissant croire que l’année 2019 est décrétée année électorale, est restée un simple slogan.
Ainsi, au deuxième lundi de janvier 2020, les principales institutions du pays se sont retrouvées totalement dysfonctionnelles avec le non-renouvellement des mandats de leurs membres. Le pouvoir législatif est réduit à dix (10) sénateurs sur trente (30) et privé de la totalité des membres de la chambre des députés. Les organes élus des Collectivités Territoriales (conseils municipaux, conseils d’administrations des sections communales et assemblées locales), sont remplacés par des agents exécutifs intérimaires nommés à la seule initiative de l’Exécutif.
Le pouvoir exécutif s’est servi de ce vide parlementaire qu’il a lui-même provoqué pour installer au plus haut niveau de l’Etat des responsables sans l’approbation parlementaire préalable exigée par la constitution. C’est particulièrement le cas pour les commandants en chef de la Police Nationale et des Forces Armées d’Haïti, les Conseils d’Administration de la Banque de la République d’Haïti, de la Banque nationale de Crédit et des Ambassadeurs nouvellement accrédités auprès des pays amis. Ces nominations, pour être légitimes, doivent obéir aux prescrits de l’article 141 de la constitution se lisant ainsi « Le Président de la République nomme, après délibération en Conseil des Ministres, puis approbation du Sénat, le commandant en chef des Forces Armées d’Haïti, le commandant en chef de la Police Nationale, les Ambassadeurs et Consuls Généraux, les Conseils d’Administration des organismes autonomes ».
L’équipe gouvernementale que dirige Monsieur Jouthe Joseph a été appointée au cours de l’année 2020. Le Parlement était déjà rendu dysfonctionnel. Les exigences constitutionnelles entourant les modalités de formation du gouvernement et les responsabilités de ses membres vis-à-vis du Parlement ont tout simplement été ignorés.
Article 155. Le gouvernement se compose du Premier Ministre, des ministres et des secrétaires d’Etat. Le Premier Ministre est le chef du Gouvernement
- Le gouvernement conduit la politique de la nation et est responsable devant le Parlement dans les conditions prévues par la loi
- Le Premier Ministre en accord avec le Président choisit les membres de son cabinet ministériel et se présente devant le Parlement afin d’obtenir un vote de confiance sur sa déclaration de politique générale. Le vote a lieu au scrutin public et a la majorité absolue dans chacune des deux (2) chambres.
Ces individus qui, aujourd’hui, exercent les fonctions de Ministres, engagent les ressources de l’Etat et arrêtent des décisions capitales pour l’avenir du pays, ne détiennent pas la légitimité constitutionnelle exigée pour de tels actes. Ils font, tout simplement partie, d’un gouvernement de fait qui pourrait être poursuivi pour usurpation de titres et de qualités. Les actes et engagements qui émanent d’eux peuvent être, à tout moment remis, en question.