Port-au-Prince, 23 août 2020- Le directeur exécutif du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), Pierre Esperance considère ‘’l’accord de paix’’ intervenu entre Gabriel Jean-Pierre (Ti Gabriel), Matyas Saintil (G-9) et Iskar Andrice (G-9) comme une farce.
‘’On ne peut pas parler de paix si les chefs de gang continuent de disposer de leurs armes qu’ils peuvent utiliser à tout moment contre la population civile comme ils l’ont déjà selon M. Esperance, qualifiant l’initiative des trois (3) hommes de Cité Soleil qui étaient, il y a peu, à couteaux tirés, de pure démagogie.’’
Esperance souligne également que ceux qui ont commis des crimes abominables sur la population ne peuvent pas prétendre faire la paix sans avoir à rendre compte à la justice de leurs forfaits. ‘’Ce serait banaliser la vie d’innombrables innocents tués par des chefs de gang protégés par de hautes autorités et, qui, aujourd’hui cherchent à jouir encore de plus d‘impunité, fait remarquer le défenseur des droits humains.’’
Il rappelle qu’au moins neuf (9) massacres ont été commis dans la région métropolitaine de novembre 2017 à nos jours, soulignant également que plusieurs dizaines de personnes ont été tuées, d’autres sont portées disparues, des femmes ont subi des viols collectifs dont des mineurs, sans compter les déplacés qui se comptent par milliers.
Pierre Esperance rappelle qu’au moins deux massacres ont été perpétrés au Pont-Rouge et à Cité Soleil depuis la création du G-9 en famille et alliés, faisant plusieurs dizaines de victimes, notant que le chef de cette fédération de gangs, Jimmy Cherizier alias ‘’Barbecue’’ est accusé d’implication dans ces différentes tueries.
Selon M. Esperance cet ‘’accord de paix’’ aurait pour objectif de calmer l’opinion publique internationale et permettre à la CNDDR (Commission Nationale de Désarmement, Démantèlement et Réinsertion) d’obtenir des fonds qui seront utilisés pour réaliser des projets dont les chefs de gang auront le contrôle.
Gabriel Jean-Pierre, Matyas Saintil et Iskar Andrice qui reconnaissent avoir commis des actes cruels sur la population de Cité Soleil, informent avoir signé un accord de paix en date du 22 août 2020 et promettent d’œuvrer en vue de la reprise de la vie dans le plus grand bidonville du pays.
Les trois hommes qui ont entretenu jusque-là, un climat de terreur à Cité Soleil, demandent pardon à la population et promettent de travailler de manière à favoriser la reprise effective des activités scolaires, le fonctionnement des marchés publics, la circulation automobile afin que les citoyens puissent vaquer en toute tranquillité à leurs activités, écrivent-ils.
Le bilan des différentes attaques perpétrées à l’encontre de la population de Cité Soleil en juin et juillet 2020 s’élève à cent-onze (111) personnes assassinées dont douze (12) femmes et deux (2) mineurs, quarante-huit (48) personnes portées disparues dont deux (2) mineurs, vingt (20) personnes blessées par balles dont sept (7) mineurs.
Dix-huit (18) femmes et filles ont été violées parmi elles une dame de soixante-et-un (61) ans qui, sous le coup de la violence utilisée contre elle, est tombée en syncope. Au moins six (6) maisons ont été incendiées, selon un bilan non exhaustif du RNDDH.
En début du mois d’août, les États-Unis se déclarent profondément préoccupés par les pertes en vies humaines dans les communautés marginalisées du fait de la violence liée aux gangs. ‘’Nous constatons que les gangs armés violent systématiquement les droits humains des habitants de communautés telles que Cité Soleil, La Saline, Bel-Air, Martissant et Village de Dieu.’’
Le 12 août, c’est Bureau Intégré des Nations-Unies en Haïti (BINUH) qui a demandé aux autorités haïtiennes d’exécuter des mandats émis contre plusieurs chefs de gangs dont Jimmy Cherizier, alias Barbecue, auteurs présumés de crimes, d’abus ou de violations des droits humains dans le pays.
Le BINUH a fait remarquer que ces violations de droits humains pourraient constituer des crimes internationaux en vertu du droit relatif aux droits de l’homme et constituent également des crimes relevant du droit pénal haïtien”, a écrit le BINUH dans un communiqué en date du 12 août dernier, ajoutant que les auteurs doivent être arrêtés et poursuivis. Et l’Etat haïtien doit prendre des mesures pour protéger le droit inaliénable à la vie de tous les citoyens.