Deux ans après le massacre de La Saline, l’enquête judicaire sur cette affaire est toujours au point mort

Vue du quartier de La Saline

Port-au-Prince, 13 novembre 2020- Ce 13 novembre 2020 rappelle le deuxième anniversaire du sanglant massacre qui a été perpétré à La Saline, quartier populaire situé à l’entre Nord de la capitale.

Selon plusieurs rapports d’enquête d’organismes de défense des droits humains dont la FJKL et le RNDDH, au moins soixante-onze (71) personnes ont été massacrées, de nombreuses autres blessées, des femmes violées collectivement, des maisons incendiées et des milliers de déplacés.

Ceux qui ont fui, ont pris refuge à la Place d’Italie, au bicentenaire pour échapper à la fureur des bandits armés qui ont perpétré ce que les organisations des droits humains ont qualifié de massacre d’Etat.

Les corps de la plupart des victimes ont été brûlés ou dévorés par des chiens et des cochons affamés. Des extraits de vidéo montrant ces scènes d’horreur ont circulé en boucle sur les réseaux sociaux. Aucune mesure particulière n’a été prise pour sécuriser le reste de la population.

Les rapports d’enquête de ces organisations de défense et de promotion des droits humains et de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) ont indexé des cadres supérieurs de la fonction publique dont l’ancien représentant direct du président de la République, l’ex-délégué départemental de l’ouest, Pierrot Duplan et l’ancien directeur général du ministère de l’intérieur, Fednel Monchery comme les auteurs intellectuels qui auraient fourni les moyens logistiques pour perpétrer ce carnage.

Sont également accusés dans ce massacre, des policiers en service, des présumés chefs de gangs qui se sont fédérés ces derniers temps sous le label du G-9 en famille et alliés dont Jimmy Cherizier alias Barbecue qui ferait l’objet d’un avis de recherche pour son implication présumée dans cette affaire.

Deux (2) ans après cette tuerie, le dossier est toujours au point mort sur le plan judiciaire. Aucune avancée significative n’a été enregistrée dans le cadre de cette affaire que le pouvoir en place a toujours tenté d’ignorer bien que les Nations-Unies et les organismes haïtiens de défense des droits humains aient, dans plusieurs rapports d’enquête, établi clairement l’implication et la responsabilité des agents de l’Etat et du gouvernement dans le massacre.

Le juge qui instruit le dossier, Me Chavanne Etienne a déjà auditionné plusieurs individus arrêtés dans le cadre de cette affaire. Cependant, il ne peut plus poser aucun acte d’instruction dans le cadre du dossier en attendant que la Cour de cassation son rende son arrêt suite à une action en récusation exercée contre lui par Pierrot Duplan et Fednel Monchery.

Autre obstacle à l’instruction de cette affaire, c’est que le mandat de juge d’instruction du magistrat Chavanne Etienne est arrivé à expiration et n’a pas été renouvelé encore par le pouvoir exécutif. Il en résulte que le dossier piétine.

Dans les conclusions de son rapport d’enquête sur ce massacre daté de 2018, la FJKL avait recommandé aux autorités de ‘’mener une enquête judicaire sérieuse en vue d’identifier les responsables de ce massacre, procéder à leur arrestation et les soumettre à la justice répressive pour qu’ils répondent de leurs actes ; la justice devra déterminer si l’argent de l’Etat via la délégation de l’Ouest n’a pas été utilisé pour financer les bandits impliqués dans ce massacre aux fins de perturber les manifestations prévues pour la journée du 18 novembre 2018 visant à réclamer que lumière soit faite sur l’utilisation des fonds Petro Caribe.’’

L’organisation avait également demandé au pouvoir en place de prendre en charge les enfants des personnes assassinées jusqu’à la fin de leurs études professionnelles ou universitaires ; prendre en charge les déplacés et assurer leur retour sécurisé dans leur zone ; rétablir l’autorité de l’Etat dans la zone afin que la Mairie de Port-au-Prince reprenne le contrôle du marché de la Croix Des Bossales ; procéder aux désarmements des groupes armés ; d’identifier les détenteurs de l’autorité de l’Etat ou toutes autres personnes qui fournissent armes et munitions aux groupes armés.

Rien de tout cela n’a été fait. Au contraire, le 13 novembre 2019, soit un an plus tard après celui de La Saline, un autre massacre a été perpétré, cette fois au quartier historique de Bel-Air, a moins de deux (2) kilomètres du palais présidentiel.

Selon un rapport d’enquête de la FJKL, l’attaque a fait au moins quatre (4) morts, trente-cinq (35) maisons, vingt-et-un (21) véhicules et des motocyclettes incendiés.

Tout en recommandant a ce que la police fasse preuve de sa capacité à garantir la sécurité des citoyens sur l’ensemble du territoire national et que les auteurs des évènements du Bel-Air et de la ruelle Mayard soient identifiés, recherchés et soumis à la justice répressive sans délai, la FJKL a mis en lumière les liens existants entre certains gangs armés qui opèrent dans les quartiers populaires.

Un an après les événements du Bel-Air, rien n’a été fait pour inquiéter les auteurs des crimes commis dans ce quartier défavorisés.

Au contraire, la zone subit en permanence des attaques du G-9 en famille et alliés de l’intouchable Jimmy Cherizier ‘’Barbecue,’’ ‘’recherché activement,’’ par la police pour son implication présumée dans divers massacres perpétrés dans plusieurs quartiers populaires de la région métropolitaine.