NEW-YORK, lundi 24 février 2025- Dans un revirement spectaculaire, les États-Unis ont voté contre une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies condamnant la Russie comme l’agresseur dans la guerre en Ukraine, rejoignant ainsi 16 autres pays dans cette opposition. Ce changement de position marque une rupture avec le soutien sans faille apporté à l’Ukraine sous l’administration précédente et intervient alors que Washington défend en parallèle une résolution du Conseil de sécurité visant à ouvrir la voie à une solution pacifique au conflit.
Le vote à l’Assemblée générale de l’ONU, intervenu le 24 février 2025, jour du troisième anniversaire de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie, a tout de même abouti à l’adoption de la résolution avec une large majorité. Toutefois, le soutien explicite des États-Unis à Moscou constitue une évolution notable : lors d’un vote similaire en 2023, seuls sept pays, dont la Russie, s’étaient opposés à une telle résolution. Cette fois-ci, aux côtés de Washington et de Moscou, se trouvaient Israël, Haïti, la Hongrie, Palau et les Îles Marshall, ainsi que plusieurs nations africaines (Burkina Faso, Burundi, Centrafrique, Guinée équatoriale, Niger et Soudan) et des États régulièrement en opposition avec l’Occident, comme la Biélorussie, la Corée du Nord, la Syrie, l’Érythrée, le Mali et le Nicaragua.
Ce basculement s’inscrit dans la ligne tracée par le président Donald Trump, réélu pour un second mandat un mois plus tôt. Celui-ci a adopté une posture plus ambiguë sur la guerre en Ukraine, refusant de blâmer directement la Russie, critiquant les dépenses américaines dans ce conflit et prenant ses distances avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, autrefois soutenu par Washington. Néanmoins, Trump a laissé entendre qu’il pourrait rencontrer Zelensky dans les semaines à venir pour discuter des différends entre les deux pays.
Parallèlement, les États-Unis ont porté devant le Conseil de sécurité de l’ONU une résolution qu’ils ont rédigée, appelant à un retour aux principes fondamentaux de la Charte des Nations unies et à un règlement pacifique du conflit. Lors de son intervention devant le Conseil, l’ambassadrice américaine Dorothy Shea a insisté sur la nécessité de mettre fin à « la guerre la plus sanglante sur le continent européen depuis les cataclysmes successifs qui ont conduit à la création de ce Conseil ».
« Il est temps pour nous de ramener l’ONU, et en particulier le Conseil de sécurité, à son objectif initial : le maintien de la paix et de la sécurité internationales », a-t-elle déclaré, dénonçant les joutes diplomatiques qui, selon elle, ne font qu’alimenter le statu quo. « Poursuivre des querelles rhétoriques à New York peut donner aux diplomates un sentiment de justification, mais cela ne sauvera aucune vie sur le champ de bataille », a-t-elle ajouté.
La résolution américaine, qualifiée d’« élégante dans sa simplicité » par Dorothy Shea, repose sur trois paragraphes réaffirmant que « cette guerre est horrible, que l’ONU peut contribuer à y mettre fin et que la paix est possible ». L’ambassadrice a insisté sur le fait qu’il ne s’agissait pas d’un accord de paix, mais d’« une première étape symbolique et essentielle vers une résolution durable du conflit ».
L’initiative a toutefois été reçue avec scepticisme par plusieurs membres du Conseil, notamment les Européens, qui ont rappelé qu’ils souhaitaient une paix durable, mais « pas à n’importe quel prix ». En réponse, Dorothy Shea a assuré que les États-Unis partageaient cette ambition, soulignant que cette résolution « ne représente aucun coût, mais bien une voie vers la paix ».
Après son adoption, l’ambassadrice américaine a salué « une avancée cruciale » et a exhorté les membres du Conseil à « se joindre aux États-Unis sous la direction audacieuse du président Trump pour vaincre le fléau de cette guerre ». Elle a conclu en appelant à transformer cette première avancée en un véritable processus diplomatique capable de construire « un avenir pacifique pour l’Ukraine, la Russie et la communauté internationale ».
Si l’adoption de cette résolution par le Conseil de sécurité marque une percée diplomatique après trois ans d’impasse, le revirement des États-Unis à l’Assemblée générale de l’ONU pourrait néanmoins accentuer les tensions avec leurs alliés historiques en Europe et renforcer l’axe Pékin-Moscou. D’ailleurs, le président chinois Xi Jinping a profité d’un entretien en visioconférence avec Vladimir Poutine pour réaffirmer son soutien à Moscou. « L’histoire et la réalité nous montrent que la Chine et la Russie sont de bons voisins qui ne s’éloigneront pas, et de véritables amis qui ont traversé les épreuves ensemble », a-t-il déclaré, selon les médias d’État chinois.
Ce double jeu diplomatique des États-Unis, entre opposition à une résolution de condamnation de la Russie et promotion d’une initiative de paix, risque de redéfinir les équilibres géopolitiques autour du conflit ukrainien. Reste à voir si cette approche contribuera réellement à ouvrir la voie à une résolution du conflit ou si elle ne fera que compliquer davantage les rapports de force internationaux.