MUNICH,(Allemagne), vendredi 14 février 2025- Le vice-président américain JD Vance a vivement critiqué les dirigeants européens lors de la conférence de sécurité de Munich, accusant plusieurs gouvernements de réprimer la liberté d’expression et de ne pas respecter les principes démocratiques fondamentaux. Il a notamment dénoncé l’invalidation des élections présidentielles roumaines de novembre 2024 et s’en est pris aux politiques européennes en matière de liberté d’expression, en citant le cas d’Adam Smith-Connor au Royaume-Uni.
Dans son discours, Vance a affirmé que la liberté d’expression était « en recul » en Europe et a dénoncé ce qu’il considère comme une tendance inquiétante à criminaliser les opinions divergentes. « Je voudrais pouvoir dire qu’il s’agit d’une erreur isolée, d’un cas unique d’une loi mal écrite appliquée contre une seule personne. Mais non… La liberté d’expression, je le crains, est en retrait », a-t-il déclaré devant un auditoire composé de dirigeants et d’experts en sécurité internationale.
Il a également fustigé l’annulation des élections présidentielles en Roumanie, déclarant que la justification avancée, à savoir une prétendue interférence russe, relevait de la rhétorique de la guerre froide. Selon lui, qualifier les allégations de manipulation de l’opinion publique de « désinformation » ou de « cyberattaques hybrides » constitue une manière détournée de remettre en cause la volonté populaire. « Si votre démocratie peut être détruite par quelques centaines de milliers de dollars de publicité numérique venant de l’étranger, alors elle n’était pas très solide dès le départ », a-t-il lancé.
L’élection roumaine avait été invalidée après la publication de documents de sécurité indiquant que le pays avait été victime d’attaques hybrides agressives de la part de la Russie durant la période électorale, selon un rapport de Reuters. Calin Georgescu, un candidat de droite critique envers l’OTAN et opposé au soutien militaire à l’Ukraine, avait vu sa popularité grimper en flèche malgré un faible score initial en octobre. Il avait remporté le premier tour du scrutin avant que la Cour suprême n’annule l’élection en raison des soupçons d’ingérence étrangère.
Dans un autre volet de son discours, Vance a particulièrement visé le Royaume-Uni, qu’il a qualifié de pire exemple en matière de répression des libertés fondamentales. Il a cité le cas d’Adam Smith-Connor, un Britannique arrêté pour avoir prié en silence à proximité d’une clinique pratiquant l’avortement. « Il y a un peu plus de deux ans, le gouvernement britannique a inculpé Adam Smith-Connor, un physiothérapeute de 51 ans et vétéran de l’armée, pour le crime odieux d’avoir prié en silence pendant trois minutes à cinquante mètres d’une clinique d’avortement. Il ne bloquait personne, n’interagissait avec personne, il priait juste seul », a-t-il raconté.
Smith-Connor avait été reconnu coupable en 2023 d’avoir enfreint une ordonnance de protection des espaces publics, qui interdit les manifestations susceptibles d’influencer les décisions des personnes se rendant dans un centre d’avortement. Cette loi, selon Vance, illustre une dérive autoritaire inquiétante en Europe. « Lorsque les forces de l’ordre britanniques lui ont demandé pour qui il priait, il a répondu que c’était pour son fils à naître, qu’il avait avorté avec son ex-compagne des années auparavant. Cela n’a pas ému les officiers. Il a été reconnu coupable d’avoir enfreint la nouvelle loi sur les zones de protection, qui criminalise même la prière silencieuse. »
Le vice-président américain a également abordé la question du financement de la défense européenne, martelant l’une des revendications de longue date de Donald Trump : l’augmentation des dépenses militaires des alliés de l’OTAN. Tout en reconnaissant l’importance de la sécurité européenne, il a insisté sur le fait que les États-Unis ne devraient pas être les seuls à assumer le fardeau financier de la défense collective. « L’administration Trump est très préoccupée par la sécurité européenne et croit que nous pouvons parvenir à un règlement raisonnable entre la Russie et l’Ukraine. Mais nous pensons aussi qu’il est crucial que l’Europe prenne ses responsabilités de manière significative dans les années à venir », a-t-il déclaré.
Selon lui, la plus grande menace pour l’Europe n’est pas extérieure, mais intérieure. « Le plus grand danger pour l’Europe, ce n’est pas la Russie ou la Chine. C’est une érosion de ses propres valeurs fondamentales, des valeurs qu’elle partage avec les États-Unis », a-t-il affirmé. Son discours intervient dans un contexte de tensions croissantes entre Washington et ses alliés européens, notamment après un récent entretien de 90 minutes entre Donald Trump et Vladimir Poutine. Les discussions ont ravivé les inquiétudes des dirigeants européens sur l’engagement américain envers l’OTAN et le soutien à l’Ukraine.
Vance a prévu de rencontrer le président ukrainien Volodymyr Zelensky plus tard dans la journée, bien que l’entretien ait été retardé en raison d’un problème technique sur l’avion du secrétaire d’État Marco Rubio.
Son discours a suscité de vives réactions parmi les responsables européens. Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a vivement critiqué les propos du vice-président américain, les jugeant inacceptables. « La démocratie a été remise en question pour l’ensemble de l’Europe par le vice-président des États-Unis aujourd’hui », a-t-il déclaré depuis la tribune principale de la conférence. « Il parle de l’anéantissement de la démocratie. Et si je l’ai bien compris, il compare certaines parties de l’Europe à des régimes autoritaires… Ce n’est pas acceptable. »
Ces échanges tendus illustrent le climat actuel de défiance entre les États-Unis et leurs partenaires européens, alors que les divergences sur la sécurité, la gouvernance démocratique et la liberté d’expression deviennent de plus en plus visibles sur la scène internationale.