Dorothy Shea appelle à la réforme et à la responsabilisation du maintien de la paix de l’ONU face aux défis du multipolarisme et des nouvelles technologies…

WASHINGTON, mardi 25 mars 2025L’ambassadrice Dorothy Shea, Chargée d’Affaires ad interim des États-Unis auprès des Nations Unies, est intervenue hier lundi lors d’un débat ouvert du Conseil de sécurité sur l’adaptabilité des opérations de maintien de la paix de l’ONU face aux nouvelles réalités. Elle a souligné la nécessité de réformer ces missions afin de les rendre plus efficaces, responsables et adaptées aux défis contemporains.

Elle a d’abord exprimé sa gratitude envers le Secrétaire général António Guterres pour ses efforts visant à moderniser le maintien de la paix. Elle a également remercié la ministre des Affaires étrangères Rasmussen pour son leadership dans l’organisation de ce débat crucial, ainsi que Jenna Russo de l’International Peace Institute pour ses analyses éclairantes. L’ambassadrice a ensuite rendu hommage aux Casques bleus qui servent sur le terrain, parfois au péril de leur vie, et à ceux qui ont fait le sacrifice ultime pour la paix.

Le maintien de la paix des Nations Unies constitue un outil précieux pour répondre aux menaces pesant sur la paix et la sécurité internationales. Avec le soutien politique et financier de la communauté internationale, ces missions ont permis de réduire la violence, d’écourter les conflits, de favoriser la croissance économique des pays hôtes, de renforcer la souveraineté étatique et de faciliter des règlements politiques durables. À travers le monde, de nombreuses populations ont bénéficié de l’intervention des Casques bleus à des moments critiques de l’histoire de leurs pays.

Cependant, l’ambassadrice Shea a également insisté sur les nombreux défis auxquels ces opérations sont confrontées aujourd’hui. L’évolution vers un système international multipolaire entraîne un manque de consensus sur les mandats des missions. De plus, des attentes divergentes entre le Conseil de sécurité, les missions et les États hôtes compliquent leur mise en œuvre. Le retrait de la coopération des États hôtes, l’ingérence d’États voisins et l’utilisation d’outils technologiques émergents – comme l’intelligence artificielle et les drones – exacerbent encore ces difficultés, compromettant la sécurité des forces onusiennes et compliquant davantage la dynamique des conflits.

Face à ces défis, l’ambassadrice a exposé trois axes majeurs sur lesquels les États-Unis concentrent leurs efforts pour réformer le maintien de la paix.

D’abord, elle a insisté sur la nécessité d’une véritable reddition des comptes en matière de performance. Selon elle, des mécanismes de responsabilité solides pour tous les éléments d’une mission renforceront l’efficacité et l’efficience des opérations. L’évaluation des performances des unités sur le terrain doit être liée aux efforts de formation et de renforcement des capacités des pays contributeurs de troupes et de forces de police. Les États-Unis, en tant que leader mondial du renforcement des capacités en matière de maintien de la paix, ont adapté leurs stratégies pour garantir un impact mesurable.

Elle a aussi plaidé pour une responsabilisation accrue en matière de conduite et de discipline. Il est impératif d’encourager les performances positives, mais aussi d’imposer des sanctions rapides en cas d’échecs, d’inconduites ou d’inaction face à des menaces imminentes contre les civils. L’ambassadrice a souligné que des mesures concrètes, comme la suppression des remboursements et le rapatriement de certaines unités et personnels, doivent être systématiquement appliquées en cas de défaillance. Malgré l’adoption de la résolution 2436 du Conseil de sécurité, qui exige l’amélioration des méthodes d’évaluation des performances, des lacunes persistent et doivent être comblées par une utilisation plus rigoureuse des données disponibles.

Ensuite, elle a abordé la question de la lutte contre l’exploitation et les abus sexuels au sein des missions onusiennes. Les États-Unis exhortent le Secrétariat et les pays contributeurs à intensifier leurs efforts pour prévenir ces crimes et tenir responsables non seulement les auteurs, mais aussi ceux qui ferment les yeux sur ces agissements. Elle a réaffirmé la nécessité d’appliquer la politique de tolérance zéro de l’ONU, en refusant tout remboursement aux contingents impliqués et en procédant à des rapatriements systématiques. La priorité doit être mise sur la prévention, la poursuite des responsables et l’accompagnement des victimes afin de prouver un engagement sincère à éradiquer ce fléau.

Enfin, elle a mis en avant l’importance d’une planification stratégique intégrée. L’absence de coordination efficace entre le siège de l’ONU et les missions sur le terrain constitue une lacune majeure. Elle a insisté sur la nécessité d’améliorer la planification des opérations à New York et de renforcer la coordination entre le Secrétariat et les missions afin d’optimiser la gestion des ressources. Des objectifs clairs et des critères bien définis doivent être établis pour mieux évaluer l’exécution des mandats. Une meilleure exploitation des données déjà collectées permettrait de prendre des décisions plus éclairées et fondées sur des preuves.

L’ambassadrice Shea a conclu en affirmant que ces réformes sont essentielles pour garantir une utilisation plus efficace des ressources, sans compromettre l’efficacité des missions. Elle a souligné que les États-Unis, en tant que premier contributeur financier au maintien de la paix de l’ONU, ont investi plus de 15 milliards de dollars dans ces missions depuis 2016 et plus de 1,8 milliard dans des programmes de renforcement des capacités. Plus de 60 % des Casques bleus déployés ont bénéficié de cette formation, témoignant de l’engagement américain à améliorer la performance des forces onusiennes.

En tant que principal bailleur de fonds, les États-Unis attendent que ces réformes de bon sens soutiennent les efforts globaux de réforme de l’ONU. L’ambassadrice a insisté sur la nécessité d’une approche plus efficace, responsable et adaptable pour le maintien de la paix. Elle a appelé la communauté internationale à œuvrer collectivement en ce sens, notamment lors de la prochaine Réunion ministérielle sur le maintien de la paix qui se tiendra à Berlin, et au-delà.