Le monde au bord d’une nouvelle récession, alerte de l’ONU sur la guerre commerciale…

Pamela Coke-Hamilton

GENÈVE,(Suisse), vendredi 11 avril 2025, (RHINEWS)- Le monde pourrait entrer dans une nouvelle ère de récession économique si la guerre commerciale enclenchée par les États-Unis persiste, a averti vendredi Pamela Coke-Hamilton, directrice du Centre du commerce international (ITC), lors d’une conférence de presse tenue à Genève. Le Produit intérieur brut mondial pourrait chuter de 0,7 % d’ici 2040, selon les projections de l’ONU, en raison de la hausse des droits de douane imposée par Washington et des ripostes tarifaires qui en découlent.

« Je pense que les chaînes d’approvisionnement évolueront et les alliances mondiales seront réévaluées. Il y aura également des changements géopolitiques et économiques », a prédit Mme Coke-Hamilton, deux jours après que la Maison Blanche a annoncé une suspension temporaire de 90 jours des hausses tarifaires décidées sous l’administration Trump. La Chine reste cependant exclue de cette suspension et continue d’être frappée de droits de douane prohibitifs.

Selon Mme Coke-Hamilton, les premières victimes de ces politiques protectionnistes sont déjà identifiables : « Le Mexique, la Chine et la Thaïlande, mais aussi des pays d’Afrique australe, sont parmi les plus touchés, aux côtés des États-Unis eux-mêmes », a-t-elle affirmé, soulignant l’impact profond de ces décisions sur les exportations mondiales.

La directrice de l’ITC a précisé que malgré le moratoire, les droits de douane américains restent fixés à un niveau élevé, autour de 10 %, un coût que les exportateurs répercutent inévitablement sur les consommateurs finaux. Les importations chinoises, elles, sont désormais taxées à hauteur de 145 %, tandis que Pékin a répliqué en imposant des tarifs de 125 % sur les produits américains.

L’Organisation mondiale du commerce (OMC) estime que si cette escalade tarifaire perdure, les échanges entre les deux puissances économiques pourraient s’effondrer de 80 %. Mais même en considérant que les échanges sino-américains ne représentent que 3 à 4 % du commerce mondial, Mme Coke-Hamilton avertit que les effets globaux pourraient provoquer une contraction de 3 % du commerce international dans son ensemble.

Les flux commerciaux sont déjà en pleine mutation. Le Mexique cherche à compenser ses pertes en réorientant ses exportations vers le Canada, le Brésil, et dans une moindre mesure, l’Inde. Le Vietnam, quant à lui, réduit ses échanges avec les États-Unis, le Mexique et la Chine, tout en augmentant significativement ses exportations vers l’Union européenne, la Corée du Sud et d’autres marchés asiatiques.

Mais tous les pays ne disposent pas de la flexibilité nécessaire pour s’adapter. « Les économies émergentes sont moins bien équipées pour pivoter face aux instabilités. Elles manquent souvent de diversité industrielle et de capacité de transformation de leurs matières premières », a-t-elle expliqué. Elle cite en particulier le Lesotho, le Cambodge, le Laos, Madagascar et le Myanmar comme étant particulièrement vulnérables.

Pour Mme Coke-Hamilton, l’incertitude liée à ce moratoire de 90 jours n’apporte aucune stabilité aux marchés mondiaux. Que la suspension tarifaire soit prolongée ou non, « cette absence de prévisibilité affectera le commerce et les décisions prises par les entreprises », a-t-elle mis en garde.

« Ce ne serait pas la première fois que le système économique mondial connaîtrait des secousses. Nous l’avons constaté au cours des 50 dernières années, sous différentes formes. Celle-ci est probablement un peu plus brutale, un peu plus instable. »