WASHINGTON, DC, dimanche 15 décembre 2024 – Le Fonds monétaire international (FMI) a récemment publié une évaluation détaillée de l’économie haïtienne, mettant en avant des prévisions de stabilisation à moyen terme, mais conditionnant celles-ci à une amélioration rapide de la sécurité. Selon le FMI, Haïti pourrait atteindre un taux de croissance économique de 1,5 % d’ici quelques années, mais ce chiffre demeure tributaire d’un ensemble de réformes structurelles et d’un soutien accru de la communauté internationale.
Depuis la dernière consultation au titre de l’article IV en 2019, Haïti a traversé une série de crises qui ont accentué sa vulnérabilité économique. La pandémie de COVID-19, le tremblement de terre dévastateur de 2021, l’épidémie de choléra réapparue en 2022 et les conséquences de la guerre en Ukraine sur les prix des produits alimentaires et énergétiques ont plongé le pays dans une crise multidimensionnelle. Selon le FMI, l’économie haïtienne est aujourd’hui caractérisée par une base fiscale étroite, un secteur informel dominant représentant plus de 60 % de l’activité économique, et une dépendance excessive aux transferts de fonds des diasporas, qui représentaient environ 30 % du PIB en 2023
Depuis la dernière consultation de 2019 au titre de l’article IV du Fonds monétaire international (FMI), Haïti a été frappée par une série de chocs dévastateurs, notamment la pandémie de COVID-19, un tremblement de terre en 2021, des épidémies de choléra, et l’impact économique de la guerre en Ukraine, qui a provoqué une crise alimentaire sévère. Ces crises ont déclenché une augmentation de la faim aiguë dans le pays, aggravée par une détérioration dramatique de la sécurité au cours des dernières années. Cette instabilité a conduit à une hausse importante du nombre de personnes déplacées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, et a gravement compromis la croissance économique potentielle.
Les perspectives économiques d’Haïti, selon le FMI, restent particulièrement préoccupantes et marquées par une incertitude élevée. Le pays continue de subir un choc d’offre dû à l’insécurité, ce qui entrave sérieusement la croissance et nourrit l’inflation. « La situation sécuritaire continue de peser lourdement sur l’économie », a déclaré un porte-parole du FMI. Les recettes fiscales, qui sont essentielles pour reconstruire les infrastructures du pays après des années de perturbations sociales, progressent lentement, et l’exode des compétences continue de limiter les chances d’une reprise durable. En conséquence, la croissance devrait être pratiquement nulle en 2025, se stabilisant à 1,5 % dans les années suivantes, sous réserve d’améliorations substantielles de la situation sécuritaire.
Le FMI a salué les réformes entreprises par les autorités haïtiennes pour renforcer la résilience économique du pays et tenter de restaurer la stabilité macroéconomique. Les administrateurs du FMI ont souligné que la normalisation de la situation sécuritaire est essentielle pour améliorer les perspectives économiques du pays. Ils ont aussi appelé à un soutien renforcé de la communauté internationale pour accompagner les efforts de réforme et pour aider Haïti à reconstruire ses infrastructures essentielles.
Les administrateurs ont fait l’éloge des autorités pour leur gestion du budget, mais ont insisté sur la nécessité d’intensifier les efforts pour élargir la base fiscale et répondre aux besoins pressants du développement. Ils ont également suggéré de renforcer l’efficacité et la transparence des dépenses publiques et ont demandé un audit rapide des ressources utilisées dans le cadre de l’aide alimentaire d’urgence du FMI.
Les administrateurs ont également mis l’accent sur la préservation de la viabilité de la dette. Ils ont insisté sur le fait qu’Haïti devrait éviter les emprunts non concessionnels et maintenir une gestion prudente de sa dette publique. À cet égard, ils ont salué l’engagement des autorités à éviter le financement monétaire du déficit, ce qui est crucial pour maîtriser l’inflation, qui reste un défi majeur pour l’économie haïtienne. En dépit de la réduction des emprunts, l’inflation reste élevée en raison des ruptures dans les chaînes d’approvisionnement liées à l’insécurité. L’inflation a atteint 49,3 % en janvier 2023, avant de descendre à 29,3 % en août 2024, mais elle demeure préoccupante.
Les administrateurs ont aussi souligné l’importance des réformes structurelles et de gouvernance pour stimuler la croissance économique. « Les efforts visant à renforcer la gouvernance et à lutter contre la corruption sont cruciaux pour stimuler la croissance potentielle », ont-ils ajouté. Ils ont encouragé la publication rapide de l’évaluation diagnostique sur la gouvernance et du plan d’action correspondant, tout en insistant sur la nécessité d’une plus grande résilience face aux catastrophes naturelles et de la promotion de l’inclusion financière.
Le pays demeure extrêmement vulnérable aux catastrophes naturelles, et il est impératif de renforcer les capacités de résilience face à des événements comme les ouragans et les tremblements de terre, qui frappent régulièrement Haïti.
L’économiste Fritz Alphonse Jean, conseiller-président et membre du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), a souligné que Haïti est en train de subir un recul économique historique. Dans une analyse publiée le 10 décembre 2024, il a noté qu’une chute de 4 % du produit intérieur brut (PIB) en 2024 semble probable, ce qui ramènerait le PIB réel à environ 527 milliards de gourdes, soit un recul de 17 ans par rapport à 2007. « Ce niveau correspond à celui de 2007, et marque une régression de 20 % par rapport à 2018 », a-t-il affirmé, soulignant que la situation exige une planification rigoureuse et des mesures structurelles fortes pour relancer l’économie.
Fritz Alphonse Jean a averti que, pour que l’économie haïtienne retrouve son niveau de 2018 d’ici 2030, un taux de croissance annuel de 3,78 % serait nécessaire. Cependant, les prévisions du FMI, qui prévoient une croissance moyenne de seulement 1,33 % pour les trois prochaines années, alimentent des inquiétudes quant à la capacité du pays à redresser sa situation économique dans un délai raisonnable. Le conseiller-président insiste sur la nécessité d’une programmation économique nationale ambitieuse, qui doit débuter avec le budget rectificatif 2024-2025 et tenir compte des besoins spécifiques de chaque département d’Haïti.
En plus des réformes économiques, Fritz Alphonse Jean a souligné que la lutte contre l’insécurité reste un préalable essentiel à toute reprise économique. « La stabilisation du pays est une condition sine qua non pour encourager les investissements et permettre une reprise économique durable », a-t-il précisé. Il appelle à un effort collectif impliquant tous les départements pour surmonter cette barrière fondamentale.
Malgré les perspectives inquiétantes, il existe, selon lui, une opportunité dans cette crise. « Il est impératif de repenser nos priorités nationales, de mobiliser nos ressources et de bâtir les bases d’une croissance inclusive », a déclaré Fritz Alphonse Jean. Cette vision requiert une volonté politique ferme, une gestion budgétaire stratégique et un soutien international accru pour permettre au pays de surmonter cette épreuve.
Dans le même temps, la Banque Mondiale rappelle que le développement d’Haïti continue d’être freiné par l’instabilité politique et l’intensification de la violence. Le pays reste le plus pauvre d’Amérique latine et des Caraïbes, avec un PIB par habitant de seulement 1 693 USD en 2023 et un indice de développement humain (IDH) classant Haïti au 158e rang mondial.
Haïti continue d’afficher des indicateurs économiques et sociaux dramatiquement bas. La crise de l’insécurité, exacerbée par la violence des gangs, a conduit à une contraction continue du PIB depuis 2019, avec des prévisions de croissance négative en 2024.
Face à une telle situation, les perspectives à court terme restent incertaines. L’activité économique est toujours freinée par la violence des gangs et par l’incertitude politique. La croissance est attendue à peine positive en 2025 et 2026, à condition que la situation politique et sécuritaire s’améliore d’ici la fin de 2025 ou le début de 2026. Cependant, la pauvreté restera élevée, avec 36,6 % de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté en 2026, selon les projections.
Haïti reste parmi les pays les plus vulnérables au monde face aux catastrophes naturelles. Plus de 96 % de la population est exposée à des risques tels que les ouragans, les inondations et les tremblements de terre. Le séisme dévastateur du 14 août 2021, qui a frappé le sud d’Haïti, a rappelé une fois de plus la fragilité de l’île face aux catastrophes naturelles majeures.
Ainsi, pour que le pays puisse espérer un avenir meilleur, il est impératif qu’il fasse face à ses multiples défis en matière de sécurité, d’infrastructure et de gouvernance, tout en obtenant un soutien international soutenu.