PORT-AU-PRINCE, dimanche 25 décembre 2022- C’est le réseau national de défense des droits humains (RNDDH) qui révèle l’information dans une correspondance adressée à l’inspecteur général en chef de la police nationale d’Haïti (PNH), Fritz Saint-Fort.
Selon le RNDDH, depuis quelque temps, ‘‘les blindés de l’institution sont utilisés en vue de faire traverser certaines zones jugées dangereuses à des membres de la population, ce, moyennant paiement.’’
L’organisation souligner que le droit de monter à bord du blindé s’achète à deux mille cinq cents (2.500) gourdes au moins ou cinq cents (500) dollars américains. ‘‘Cette variation de prix repose sur le statut de la personne qui achète le service, du simple citoyen à l’entrepreneur,’’ soutient le RNDDH.
Le RNDDH affirme avoir été informé que les blindés sont aussi utilisés pour protéger des convois.
Selon les informations rapportées par l’organisation, pour accompagner un camion transportant des légumes, les frais varient entre deux-mille-cinq-cents (2.500) et cinq mille (5.000) gourdes ; pour accompagner des containeurs en provenance de la République Dominicaine, les frais varient entre sept-cents (700) et mille (1.000) dollars américains ; pour accompagner des camionnettes de transport en commun en provenance de Malpasse les jours de marché, les frais peuvent aller jusqu’à dix mille (10.000) gourdes.
C’est en raison de ce trafic que le policier Lincoln Bien-Aimé n’a pas pu prendre place a bord du blindé de la PNH déployé a Croix-des-Bouquets (Ouest) pour se rendre à Ganthier, a été assassiné ainsi que sa compagne le 2 décembre dernier.
Le RNDDH indique que le 2 décembre 2022, alors que Bien-Aimé et sa compagne montaient à bord du blindé en question, des agents qui s’y trouvaient déjà leur en ont interdit l’accès, arguant qu’il n’y avait pas suffisamment de places pour eux.
Ils sont retournés au sous-commissariat de Calvaire où des agents de l’Unité Départementale pour le Maintien de l’Ordre (UDMO) ont demandé à Lincoln Bien-Aimé d’informer le chef de troupe. Celui-ci a alors intimé l’ordre à Lincoln Bien-Aimé de prendre une motocyclette afin de rattraper le blindé qui venait à peine de se déplacer’’, rapporte l’organisation.
‘‘Toutefois, arrivés non loin du parquet près le tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets, la motocyclette a été stoppée par un groupe de bandits lourdement armés qui, après avoir identifié le policier Lincoln Bien=Aimé, l’ont criblé de balles ainsi que sa conjointe.
Selon la correspondance du RNDDH, ‘‘Bien-Aimé est décédé immédiatement. Son cadavre a été emporté par les bandits armés. Sa conjointe a reçu trois (3) balles. Elle avait été laissée pour morte sur la chaussée. Elle a été par la suite secourue par un riverain et conduite à l’hôpital. Pour sa part, le conducteur de la motocyclette n’a pas été touché.’’
L’organisation affirme que des riverains ont rapporté le blindé est revenu sur les lieux du crime. Il ne s’est même pas arrêté, ne serait-ce que pour récupérer le corps des victimes.
Ce n’est qu’arrivés à Ganthier que les policiers qui étaient à bord du blindé ont fait état de l’assassinat de l’agent Lincoln Bien-Aimé par des bandits armés du gang des 400 Mawozo.
Le RNDDH souligne que c’est en raison du fait que le blindé de la PNH devait récupérer des individus ayant payé leur passage ce jour-là que Lincoln Bien-Aimé et sa conjointe n’ont pas été autorisés à y monter.
Ces passages en convois monnayés ne garantissent en rien une arrivée indemne, selon le RNDDH, ajoutant que le 2 décembre 2022, après l’assassinat du policier Lincoln Bien-Aimé, parmi les chauffeurs de camionnettes qui avaient payé dix mille (10.000) gourdes pour se faire escorter par le blindé, cinq (5) ont été atteints de balles.
Selon l’organisation, ces informations alarmantes dénotent d’un niveau jamais atteint d’irrespect envers le code déontologique et les règlements généraux de l’institution policière.
‘‘Elles laissent comprendre que pour arrondir leur fin de mois, des agents de la PNH préfèrent exposer leurs collègues et frères et sœurs d’armes tout en oubliant leurs promesses d’intégrité et de probité envers la nation qu’ils servent’’, soutient le RNDDH.
‘‘Comment croire que la police est effectivement en train d’œuvrer en vue de ramener l’ordre dans le pays, quand le matériel ainsi que les équipements policiers sont trafiqués par ceux-là qui sont appelés à combattre le banditisme dans un contexte d’insécurité généralisée où la vie-même celle d’un policier, d’une policière-ne coûte rien ?’’ se demande l’organisation.
Se déclarant sidéré par ces faits troublants, le RNDDH invite l’IGPNH à diligenter rapidement une enquête autour des circonstances ayant entouré l’assassinat du policier Lincoln Bien-Aimé et des faits de trafic de matériels et d’équipements policiers à des fins économiques ; et à prendre les sanctions qui s’imposent contre tous agents-tes fautifs.