Trois des parties prenantes de l’accord du 3 avril 2024 propose une réorganisation de la transition pour une sortie de crise…

Palais National/ image d'illustration

PORTAUAUPRINCE, dimanche 12 janvier 2025– Dans un contexte marqué par une crise profonde et multidimensionnelle, plusieurs acteurs politiques et sociaux haïtiens ont soumis à la CARICOM une proposition conjointe pour réorganiser la transition en Haïti. Cette initiative, portée par le Collectif des Partis Politiques du 30 janvier, les Engagés pour le Développement (EDE) et le Groupe des Signataires de l’Accord du 21 décembre 2022- accord caduc avec la chute de l’ex premier ministre Ariel Henry, a été adressée au Groupe des Éminentes Personnalités (GEP) de la Communauté Caribéenne (CARICOM), représenté par M. Kenny Anthony.

Dans une lettre formelle, les signataires ont exprimé leurs préoccupations face aux blocages institutionnels et au manque d’efficacité du Conseil Présidentiel de Transition (CPT). Selon eux, ‘‘cet organe dans sa configuration actuelle n’est pas en mesure de répondre aux défis du moment ni d’assurer une gouvernance efficace. Ils rappellent que le pays continue de subir les conséquences désastreuses d’une crise sécuritaire alimentée par l’expansion des gangs armés. Cette insécurité a des répercussions graves sur l’économie, avec des pertes estimées à 1,34 milliard de dollars sur deux ans, mettant en évidence les failles structurelles de l’État haïtien.’’

Dans leur correspondance, les initiateurs insistent sur l’échec du CPT dans sa configuration actuelle. Ils estiment que cet organe, décrédibilisé par divers scandales et paralysé par des divisions internes, ne peut répondre efficacement aux défis auxquels le pays est confronté. Ils jugent impératif de réorganiser cette structure et proposent trois scénarios pour y parvenir.

Le premier scénario consiste à établir une présidence collégiale de trois membres. Cette présidence inclurait un représentant de la Cour de cassation, un membre issu de la société civile élargie et un autre désigné par le secteur politique. Cette composition vise à garantir un équilibre entre les différentes sensibilités présentes dans le paysage politique haïtien.

Le deuxième scénario prévoit la mise en place d’un CPT entièrement renouvelé, constitué de trois nouvelles personnalités sélectionnées par les neuf entités signataires de l’Accord du 3 avril 2024. Ces personnalités seraient choisies de manière à ne représenter aucun secteur particulier, mais à incarner une neutralité propice à une transition apaisée.

Le troisième scénario envisage une correction du CPT actuel. Cette option propose d’écarter les trois membres inculpés dans des scandales, de confirmer ou d’infirmer les quatre membres restants, et de déclarer le CPT caduc si aucun consensus n’émerge autour de ces derniers.

Quelle que soit l’option retenue, les signataires estiment que le départ des membres actuels du CPT est une condition sine qua non pour rétablir la confiance et progresser vers une gouvernance stable. Ils proposent un mécanisme pour accélérer ce processus, incluant des démarches auprès des institutions internationales pour faire pression sur les membres récalcitrants.

La proposition met également l’accent sur la nécessité d’une réforme du système sécuritaire, avec le renforcement des capacités de la Police Nationale d’Haïti et des Forces Armées d’Haïti, ainsi que la mise en place d’un service militaire obligatoire. Les signataires appellent à un engagement prioritaire pour rétablir la sécurité et créer un climat propice à des élections transparentes et crédibles, devant se tenir d’ici février 2026.

Les initiateurs insistent sur l’importance d’un consensus national impliquant à la fois les signataires et les non-signataires de l’Accord du 3 avril 2024. Ils demandent un amendement de cet accord pour l’adapter aux nouvelles réalités et réduire l’étendue des activités prévues, en concentrant les efforts sur la sécurité, la justice et les élections.

Dans leur correspondance adressée au GEP de la CARICOM, les signataires expriment l’espoir que cette proposition servira de base pour un dialogue constructif et une action concertée. Ils concluent en réaffirmant leur engagement à travailler pour une transition qui permette à Haïti de sortir de l’impasse et d’établir des institutions légitimes issues d’élections inclusives et transparentes.

Les représentants des signataires de cette correspondance continuent de siéger au sein du CPT malgré le désaveu des secteurs qui les avaient désignés. Parmi eux, Smith Augustin (REDEDE) et Louis Gérald Gilles (Accord du 21 décembre 2022), tous deux inculpés dans le scandale de détournement de 100 millions de gourdes de la Banque Nationale de Crédit (BNC). Emmanuel Vertilaire, représentant du parti Pitit Dessalines, figure également parmi les inculpés. Cependant, il bénéficie encore du soutien de son parti, dirigé par Jean-Charles Moïse, qui affirme que Vertilaire serait la cible d’une machination politique visant à ternir sa réputation.

 

Proposition conjointe