Réunis à Vilnius, les combattants de la corruption appellent à l’Intégrité globale…

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VILNIUS, samedi 22 juin 2024 – En juin 2024, plus de 2000 personnes de plus de 140 pays, représentant divers secteurs, se sont réunies en Lituanie pour participer à la 21e Conférence Internationale Anti-Corruption. L’événement, initié par Amnesty International, a été marqué par un sentiment d’urgence partagé et un engagement commun à travailler ensemble pour relever les menaces mondiales pressantes exacerbées par la corruption, défendre l’intégrité et assurer un avenir juste, pacifique et durable pour tous.

À une époque où la communauté mondiale fait face à des défis sans précédent, tels que des conflits croissants, des crises environnementales, l’érosion de la démocratie, des valeurs communes et des droits de l’homme, les participants ont reconnu l’influence pernicieuse de la corruption dans ces crises. « Nous avons réaffirmé notre dévouement à combattre la corruption comme une priorité essentielle pour notre avenir commun », ont-ils déclaré.

Lors de la 20e Conférence Internationale Anti-Corruption à Washington DC, en 2022, il a été conclu que la lutte contre la corruption est vitale pour défendre les valeurs démocratiques et la sécurité mondiale. La nécessité de restaurer la confiance dans les institutions, de protéger ceux qui combattent la corruption, de traiter la corruption qui nuit à l’environnement et de lutter contre la traite des êtres humains et le crime organisé a été soulignée. La Déclaration de Washington a mis en avant que « seule la transparence, la responsabilité et l’action collective peuvent nous permettre de surmonter la corruption et de préserver la démocratie ».

En ces temps tumultueux, alors que les tentacules de la corruption s’étendent à travers le globe, les enjeux n’ont jamais été aussi élevés. Le tissu même de nos sociétés est en danger, avec l’intégrité sous une attaque incessante de la part d’adversaires exploitant le chaos et l’impunité des puissants. L’urgence de cette mission n’a jamais été plus grande : « Nous devons nous lever ensemble, forts et unis, pour défendre tous ceux qui se dressent contre la corruption et pour l’intégrité », ont souligné les participants.

Inspirés par le thème de cette année, « Faire face aux menaces mondiales : Défendre l’intégrité », les participants se sont engagés à honorer les champions de l’intégrité et à protéger ceux qui se battent contre la corruption, peu importe leur origine ou d’autres dimensions de la corruption. « Nous appelons les gouvernements, la société civile et les organismes internationaux à renforcer les lois, les réseaux et les stratégies pour soutenir et protéger les lanceurs d’alerte », ont-ils affirmé.

La cupidité et la corruption sont à la racine d’un paradigme économique brisé et des crimes environnementaux associés, qui ont accéléré le changement climatique, la perte de biodiversité et l’effondrement des écosystèmes dont dépend toute vie. Les événements météorologiques catastrophiques des dernières années sont un avertissement imminent de ce qui est à venir. « Nous appelons les gouvernements, les entreprises et la société civile à lutter de manière décisive contre la corruption dans les projets de financement climatique », ont insisté les participants.

Les réseaux corrompus profitent de l’échec des réformes et de la capture des institutions démocratiques et des États. « Nous appelons tous à unir leurs forces pour démanteler leur entreprise mondiale », ont-ils déclaré, soulignant l’importance de corriger les échecs des réformes anti-corruption et de mettre les auteurs sur la défensive.

Prévenir la corruption minimisera également l’insécurité mondiale, la violence et les conflits, car ils sont profondément interconnectés. « Nous appelons tous à aborder les effets mortels de la corruption sur la paix et la sécurité humaine et à prendre des mesures pour arrêter la corruption », ont affirmé les participants.

Les entreprises non éthiques contribuent aux menaces mondiales actuelles. « Nous appelons les leaders d’intégrité dans le secteur des affaires à utiliser leur pouvoir pour promouvoir l’équité », ont-ils déclaré, en soutenant les efforts pour une économie mondiale durable et équitable.

Les avancées technologiques posent des risques sans précédent pour l’intégrité. « Nous nous engageons à travailler ensemble pour exploiter le pouvoir positif des dernières innovations technologiques pour accélérer la lutte contre la corruption », ont affirmé les participants, mettant en avant l’importance de maximiser le pouvoir de la technologie dans ce combat.

Le système multilatéral mondial, avec son accent sur les valeurs universelles de liberté, d’égalité et de solidarité, est assiégé. « Nous appelons tous à protéger les droits fondamentaux et la dignité des personnes dans le monde entier contre les ambitions des corrompus », ont-ils insisté.

Les richesses obtenues illégalement perpétuent la pauvreté, l’insécurité et les violations des droits de l’homme. « Nous appelons tous à arrêter le flux d’argent sale de ses origines à ses refuges prévus », ont déclaré les participants, soulignant la nécessité de collaborer pour identifier et récupérer les richesses et les actifs acquis illicitement.

Nous devons exposer et tenir responsables les facilitateurs de la corruption, en tenant les banquiers, les avocats, les comptables et les prestataires de services responsables pour avoir aidé les corrompus. « Nous appelons toutes les autorités compétentes à collaborer pour récupérer l’argent volé et réparer les dommages causés aux victimes de la corruption », ont-ils affirmé.

Investir dans des capacités de criminalistique de pointe, l’analyse de données et l’intelligence financière est primordial pour rester en avance sur les méthodes de plus en plus sophistiquées employées par les acteurs corrompus. « La formation continue et le renforcement des capacités sont essentiels pour découvrir les schémas de corruption complexes », ont souligné les participants.

Revitaliser la lutte contre la corruption nécessite de l’énergie, de l’intégrité et de la passion pour défendre la justice sociale. « Nous visons à élever le travail des leaders qui suscitent des mouvements sociaux avec des approches innovantes », ont-ils déclaré, insistant sur l’importance de l’action collaborative.

Les participants ont exprimé leur gratitude envers le gouvernement et le peuple de la Lituanie, en particulier le Service d’Investigation Spéciale de la République de Lituanie, pour avoir accueilli et soutenu la 21e IACC. Ils se réjouissent de continuer cette coopération pour défendre l’intégrité et la transparence.

La corruption représente un obstacle majeur au développement mondial, affectant particulièrement les pays sous-développés comme Haïti. Elle mine les institutions démocratiques, ralentit le développement économique et exacerbe les inégalités sociales. Haïti, déjà fragilisé par des catastrophes naturelles et une instabilité politique chronique, a été secoué par plusieurs scandales de corruption au cours des dernières décennies. Deux affaires retentissantes illustrent particulièrement bien l’ampleur de ce fléau : l’utilisation opaque des fonds alloués à la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) après le séisme du 12 janvier 2010, et la dilapidation des fonds du programme PetroCaribe.

En janvier 2010, un séisme dévastateur a frappé Haïti, causant des pertes humaines et matérielles considérables. En réponse, la communauté internationale a mobilisé des milliards de dollars pour la reconstruction du pays, sous la supervision de la CIRH. Toutefois, une grande partie de ces fonds a été mal gérée.

Des allégations d’inefficacité et d’opacité dans l’utilisation des fonds ont rapidement émergé. De nombreux projets n’ont jamais vu le jour ou ont été abandonnés, laissant les sinistrés dans une détresse persistante. Le manque de transparence dans la gestion de ces fonds a suscité des critiques virulentes et un sentiment de frustration parmi les citoyens haïtiens.

Le scandale du programme PetroCaribe a encore amplifié cette frustration. Mis en place en 2006, ce programme permettait à Haïti d’acheter du pétrole vénézuélien à des conditions préférentielles, les fonds économisés devant être investis dans des projets de développement. Cependant, des enquêtes ont révélé que près de 3,8 milliards de dollars de ces fonds ont été détournés ou mal utilisés. Des projets fictifs ou inachevés, des surfacturations et une gestion désastreuse des fonds ont été mis en lumière par des rapports successifs.

Face à ces révélations, plusieurs commissions parlementaires et la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) ont mené des enquêtes approfondies. Les rapports publiés par ces institutions ont confirmé les soupçons de malversation et de mauvaise gestion des fonds publics. Malgré les preuves accablantes et les recommandations pour des poursuites judiciaires, très peu de responsables ont été traduits en justice.

Ces scandales ont déclenché une mobilisation citoyenne sans précédent. En 2018, des milliers de Haïtiens sont descendus dans les rues pour exiger des comptes et réclamer justice. Le mouvement « Kot Kòb PetroCaribe a? » (Où est l’argent de PetroCaribe?) est devenu le symbole de cette lutte contre la corruption. Cependant, malgré cette pression populaire, les résultats concrets se font toujours attendre. Les responsables présumés continuent de vivre en toute impunité, et les fonds détournés n’ont pas été récupérés.

La lutte contre la corruption en Haïti demeure un défi de taille. Les scandales successifs ont non seulement épuisé les ressources nécessaires au développement du pays, mais ont également sapé la confiance des citoyens dans leurs institutions. Pour surmonter ces obstacles, il est crucial de renforcer les mécanismes de transparence et de reddition de comptes, d’assurer l’indépendance des enquêtes judiciaires et de soutenir les mouvements citoyens dans leur quête de justice et de vérité.

Selon la Banque mondiale, la corruption coûte chaque année entre 1 500 et 2 000 milliards de dollars à l’économie mondiale. Pour les pays en développement, ces pertes se traduisent par des routes en mauvais état, des hôpitaux sous-équipés et des écoles délabrées. La Banque mondiale estime que les pays en développement perdent environ 20 à 40 milliards de dollars chaque année en raison de la corruption, une somme qui pourrait être utilisée pour améliorer les infrastructures et les services essentiels.

La corruption a un impact dévastateur sur le développement mondial, érodant les institutions publiques et entravant la croissance économique. Pour surmonter ces défis, il est crucial de renforcer la transparence, la responsabilité et l’intégrité dans la gouvernance publique et de soutenir les efforts de lutte contre la corruption à tous les niveaux de la société.

Les causes de la corruption sont multiples et souvent interconnectées. La faiblesse des institutions en est une raison majeure. Des institutions inefficaces et incapables de faire respecter les lois et règlements créent un environnement où la corruption peut prospérer. L’absence de contrôles et de contrepoids permet aux individus de tirer parti des failles du système.

Un autre facteur est l’absence de transparence dans les affaires gouvernementales et commerciales, empêchant ainsi une surveillance publique efficace. Cette opacité facilite la dissimulation des actes de corruption et complique leur découverte. De plus, la faible rémunération des fonctionnaires dans de nombreux pays les pousse à chercher des moyens supplémentaires de subvenir à leurs besoins, y compris par des moyens corrompus.

L’influence des intérêts privés puissants est également une cause significative de corruption. Les groupes de pression peuvent exercer une influence indue sur les décisions politiques et économiques, aboutissant à des politiques qui servent leurs intérêts plutôt que ceux du public. Lorsque les actes de corruption ne sont pas sanctionnés et que les coupables ne sont pas tenus responsables, cela crée un climat d’impunité, encourageant la poursuite de pratiques corrompues sans crainte de répercussions.

Un autre aspect crucial est le manque d’éducation et de sensibilisation. Une population mal informée ou peu sensibilisée aux enjeux de la corruption est moins susceptible de demander des comptes aux responsables et de résister aux pratiques corrompues.

Pour combattre efficacement la corruption, il est essentiel de renforcer les institutions. Construire des institutions solides et indépendantes, capables de faire respecter la loi de manière impartiale, est crucial. Cela inclut la création de systèmes judiciaires indépendants, d’agences anti-corruption efficaces et de mécanismes de contrôle robustes.

Promouvoir la transparence dans les opérations gouvernementales et commerciales est également vital. L’adoption de lois sur la liberté d’information, la publication de rapports financiers détaillés et l’encouragement de l’open data peuvent grandement améliorer la transparence. En outre, offrir des rémunérations décentes aux fonctionnaires peut réduire leur inclination à recourir à la corruption pour compléter leurs revenus. Cela doit cependant être accompagné de contrôles rigoureux pour prévenir les abus.

Impliquer les citoyens dans le processus de gouvernance et encourager une culture de dénonciation peuvent aider à détecter et dissuader la corruption. Les citoyens informés et engagés sont des acteurs clés dans la lutte contre ce fléau. La mise en place de sanctions strictes et de peines sévères pour les actes de corruption est également essentielle pour créer un effet dissuasif. Les autorités doivent montrer qu’elles sont prêtes à punir sévèrement ceux qui s’engagent dans des pratiques corrompues.

Il est également important d’éduquer la population sur les méfaits de la corruption et sur les moyens de la combattre. Les campagnes de sensibilisation peuvent changer les attitudes et les comportements envers la corruption. Les technologies modernes, comme les systèmes de gestion électronique, les plateformes de surveillance en temps réel et les outils d’analyse de données, peuvent être utilisés pour détecter et prévenir la corruption, permettant une meilleure traçabilité des transactions et des décisions.

La corruption est souvent un problème transnational qui nécessite une coopération internationale. Les pays doivent travailler ensemble pour traquer les flux financiers illicites, extrader les coupables et harmoniser les lois anti-corruption. Une approche globale et intégrée est nécessaire pour combattre efficacement la corruption. Cela implique de renforcer les institutions, d’augmenter la transparence, de garantir des sanctions sévères et d’encourager la participation active des citoyens. Seule une action collective et déterminée peut mener à un changement durable et à un monde plus juste et