“Quand les nations chrétiennes s’affrontent : une guerre en pleine Semaine Sainte”…

Sonet Saint-Louis, Avocat

À l’occasion de la Semaine Sainte, alors que le monde chrétien s’apprêtait à célébrer la résurrection du Christ, un professeur haïtien, Sonet Saint-Louis, propose une lecture profondément critique et géopolitique de l’actuel conflit russo-ukrainien, dans un contexte où les nations chrétiennes elles-mêmes semblent s’entredéchirer.

LA GONÂVE, samedi 19 avril 2025 (RHINEWS)- Selon Sonet Saint-Louis, « les nations chrétiennes sont en guerre et nourrissent une détestation mutuelle. Le christianisme, jadis fondement de la civilisation occidentale, semble désormais à terre ». Loin d’un simple affrontement armé, il perçoit dans cette guerre un signe du déclin spirituel et moral de l’Occident.

Il observe une rupture croissante entre la Russie et ses voisins européens. « Pourquoi ces distances croissantes entre les pays européens et la Russie, un pays qui fait pourtant partie de l’Europe, et dont l’héritage chrétien a contribué à forger des valeurs communes dans le monde occidental ? », s’interroge-t-il. Pour Saint-Louis, la réponse se situe dans la négation d’un dialogue véritable et dans le rejet systématique des revendications russes, perçues comme archaïques par les élites occidentales.

Dans les médias français, notamment, il affirme avoir relevé une hostilité constante à l’égard de la Russie : « Il est surprenant de constater qu’aucune référence positive n’est faite à la Russie. Les experts français invités à commenter cette guerre meurtrière […] sont tous, pour la plupart, des professeurs d’université ou des anciens dirigeants. Leur seul rôle semble être de déverser leur haine contre la nation russe. » Il déplore un climat de propagande et une perte de crédibilité intellectuelle de la part de ces commentateurs, qualifiant la situation de « honteuse ».

Sur le plan international, il estime que la position américaine, bien qu’elle reste globalement hostile à la Russie, comporte une ligne alternative incarnée par Donald Trump. « Donald Trump et certains milieux aux États-Unis demeurent lucides et souhaitent mettre fin à cette guerre », écrit-il. Pour l’ancien président américain, dont il cite la déclaration selon laquelle « cette guerre ne se serait jamais éclatée s’il avait été président en 2022 », la Russie aurait été poussée à l’affrontement par l’attitude des pays européens.

Toujours selon Sonet Saint-Louis, la stratégie des Européens consiste à « empêcher que le conflit ne prenne fin », car une trêve dans les conditions actuelles avantagerait Moscou, qui est militairement en position favorable. Il affirme que « les Européens ne renoncent pas à l’idée d’une défaite stratégique de la Russie », ce qui prolongerait la guerre pour plusieurs années. Il décrit une fracture idéologique, opposant une logique d’affaires (incarnée par Trump) à « des bellicistes européens, guidés par une posture idéologique », notamment Emmanuel Macron et le gouvernement britannique.

À ses yeux, « l’Europe sans la Russie » est le projet stratégique de l’Union européenne, avec pour objectif de « rendre insignifiant le plus grand pays du continent ». Un projet qui, selon lui, justifie les ruptures diplomatiques, économiques et militaires avec Moscou.

Il redoute les scénarios qui se dessinent à court terme. « En envisageant l’envoi de troupes de réassurance en Ukraine, après un probable cessez-le-feu, la France et l’Angleterre ne risquent-elles pas d’aggraver la tension géopolitique et militaire ? » Il s’inquiète aussi du rôle des États-Unis dans une telle configuration et de l’absence d’une vision commune. Il décrit une tension grandissante, où l’OTAN pourrait approcher toujours plus des frontières russes, préparant, selon lui, le terrain à « une guerre à grande échelle ».

Dans ce tableau inquiétant, le professeur voit une marginalisation croissante de l’Europe dans les discussions de paix. « Cette dernière semble en effet être mise à l’écart, notamment par Donald Trump et le Président Vladimir Poutine, dans leurs efforts pour trouver une issue à la guerre », écrit-il.

Il note enfin que la France, par la voix de son président Emmanuel Macron, « désigne la Russie de Vladimir Poutine comme une menace existentielle ». Une politique qui, selon lui, pourrait davantage relever d’une stratégie de mobilisation fondée sur la peur que d’une réponse pragmatique à la situation. « Est-il en train de suivre une politique basée sur l’agitation, utilisant la peur et l’angoisse pour fédérer l’Europe ? », questionne-t-il.

Sombre et prophétique, la conclusion du professeur Saint-Louis évoque l’éventualité d’un cataclysme nucléaire : « Cette prochaine guerre mondiale, si elle se produit, sera une tragédie sans précédent pour la civilisation humaine », prévient-il. Et d’ajouter, dans un avertissement solennel : « Une guerre nucléaire, dans laquelle personne ne sortira gagnant, ne doit jamais avoir lieu, sauf si nous sombrons dans l’absurde et la folie ».

En guise d’espoir, il lance un appel à la paix : « Un monde exempt de guerre, voilà ce qui fonde notre véritable espérance. Peut-être sommes-nous en train de quitter une époque pour entrer dans l’accomplissement d’une promesse de paix perpétuelle promise par le créateur sous l’égide de son royaume. »

Sonet Saint-Louis est professeur de droit constitutionnel et de méthodologie avancée de la recherche juridique à la Faculté de droit et des sciences économiques de l’Université d’État d’Haïti. Il enseigne également la philosophie. Il signe cette tribune depuis l’île de La Gonâve, en Haïti, le 18 avril 2025.