NEW-YORK, lundi 18 novembre 2023 – La violence incontrôlée des gangs en Haïti entrave la normalisation du pays et pousse les forces vives nationales à fuir, a déploré le Président de l’Assemblée générale, Dennis Francis, lors d’un exposé informel sur Haïti tenu ce lundi matin à New York.
Au cours de sa visite les 20 et 21 novembre, M. Francis a tenu des réunions bilatérales avec des membres du gouvernement intérimaire, dont le Premier ministre Ariel Henry, le Ministre des Affaires étrangères Jean Victor Généus, la Ministre de la Justice Emmelie Prophète Milcé et la Ministre de la Femme Sofia Loréus.
Le manque de sécurité a dominé toutes les discussions, a rapporté le chef de l’Assemblée générale. La “terreur des gangs en maraude” impacte tous les aspects de la vie quotidienne du peuple haïtien, le privant de ses libertés et de ses droits et entravant le développement durable du pays.
Le Président a décrit des écoles transformées en refuges pour les personnes déplacées par la violence des gangs, ainsi que des parents enlevés contre rançon en accompagnant leurs enfants à l’école. Il a souligné des rapports alarmants faisant état de la perte d’environ 40 % des agents de santé d’Haïti, ceux-ci ayant quitté le pays à la recherche d’un avenir meilleur ailleurs. Il a également exprimé sa préoccupation face aux violences sexuelles brutales subies par des femmes et des filles.
“Cette violence en Haïti doit clairement cesser”, a martelé M. Francis, avertissant que le détournement du regard par la communauté internationale la décrédibilise.
La Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti, María Isabel Salvador, a confirmé par vidéoconférence que l’insécurité s’est aggravée en 2023, avec une augmentation des assassinats, des enlèvements et des incidents de violence sexuelle et sexiste par rapport à l’année précédente. La capacité de la Police nationale haïtienne à faire face à cette insécurité est en déclin, avec plus de 1 600 agents ayant quitté la force cette année.
Les officiers restants sont confrontés à des conditions désastreuses, avec un équipement, une formation et une rémunération inadéquats, ce qui entrave considérablement leur efficacité contre les gangs armés de plus en plus lourdement équipés. Certains Haïtiens ont même formé des groupes d’autodéfense en raison de la perte de confiance envers la police.
L’émigration touche tous les secteurs de la société haïtienne, et le Président de l’Assemblée générale a souligné l’importance du déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité, autorisée par le Conseil de sécurité le 2 octobre. Actuellement, 80 % de la capitale, Port-au-Prince, est contrôlée par les gangs, et leur influence s’étend également dans des zones rurales.
Alors que la Mission se prépare à son déploiement, M. Francis a appelé les acteurs civils et politiques d’Haïti à intensifier leurs efforts pour restaurer les institutions démocratiques et donner à la Mission l’espace nécessaire pour remplir son rôle. Il a exhorté les élites politiques haïtiennes à abandonner leurs préoccupations égoïstes et à donner la priorité aux citoyens d’Haïti, qui ont trop enduré et méritent une chance de réussir.
Haïti est l’un des neuf pays au monde confrontés à un risque de famine, avec 4,35 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire, l’un des pires taux mondiaux par rapport à la population du pays. La crise a également entraîné un quasi-effondrement des services sociaux de base, comme les soins de santé et l’éducation, avec un million d’enfants non scolarisés, augmentant le risque de recrutement par des gangs. Médecins Sans Frontières a annoncé la fermeture de ses activités au centre d’urgence Turgeau à Port-au-Prince la semaine dernière.
La Présidente du Conseil économique et social, Paula Narváez Ojeda, ainsi que le Président du Conseil de sécurité, José Javier De la Gasca Lopez Domínguez, ont également participé à l’exposé.