PORT-AU-PRINCE, mardi 23 avril 2024– Selon Me Samuel Madistin, la situation actuelle en Haïti présente une série de défis majeurs à relever. En adoptant une approche axée sur les droits humains, nous pouvons identifier les nombreux obstacles auxquels l’État doit impérativement faire face.
Il affirme que l’approche axée sur les droits humains est un cadre qui guide les actions des acteurs politiques en fonction des valeurs fondamentales des droits de l’homme. C’est un paradigme de gouvernance démocratique mettant en avant la dignité humaine, l’égalité, la non-discrimination, ainsi que les obligations de l’État envers ses citoyens en termes de protection, de respect, de garantie et de réalisation de leurs droits.
Les défis auxquels l’État doit faire face aujourd’hui pour permettre à la population de vivre dans la dignité sont nombreux, mais nous pouvons les aborder en mettant en avant quelques points cruciaux, déclare Madistin, soulignant la nécessité de rétablir de l’ordre public et de la sécurité publique.
Il souligne que la première priorité de l’État est de protéger la vie et les biens de ses citoyens. ‘‘Actuellement, les forces de l’ordre sont dépassées et les gangs exercent leur contrôle sur certaines régions. Il est impératif de procéder à des recrutements massifs et à une formation intensive pour renforcer les rangs de l’armée et de la police.’’
« Nous devons nous fixer des objectifs ambitieux. Par exemple, il est nécessaire de former au moins quinze mille soldats dans un délai de quatre à six mois, avec des centres de formation dans différentes régions du pays. Cela doit être accompagné de l’acquisition d’équipements et d’armements adaptés pour permettre à l’État de rétablir son monopole sur l’usage légitime de la force », insiste-t-il.
‘‘Il est important de souligner que chaque emploi créé en Haïti a un impact significatif sur la vie de nombreux citoyens. En investissant dans l’armée et la police, l’État peut non seulement améliorer la sécurité publique, mais également créer des emplois directs et indirects pour des milliers de personnes, contribuant ainsi à la stabilité économique du pays’’, selon lui.
Au-delà de la sécurité, la population a besoin de se sentir en sécurité. Cela nécessite un renforcement du système de renseignement du pays, ainsi que le développement des capacités préventives et opérationnelles de la police et de l’armée. Il est essentiel d’éliminer les zones de non-droit à travers le pays, de renforcer les forces de police administratives et judiciaires, et d’assurer la liberté de circulation pour tous les citoyens, garantissant ainsi une sécurité publique effective dans toutes les régions du pays.
La situation en Haïti exige des mesures audacieuses et immédiates pour relever les défis en matière de sécurité et de dignité humaine. En adoptant une approche axée sur les droits humains et en investissant dans les forces de l’ordre, l’État peut progresser vers un avenir plus sûr et plus prospère pour tous les Haïtiens.
Dans son analyse, Me Samuel Madistin souligne également les défis majeurs auxquels sont confrontées les institutions publiques en Haïti, mettant en lumière leur dysfonctionnement alarmant. Il met en exergue la crise profonde qui sévit au sein du système judiciaire, avec des tribunaux inactifs et une justice en état de mort cérébrale, laissant le champ libre aux gangs pour occuper le palais de justice à Port-au-Prince.
Mais ce n’est pas seulement le système judiciaire qui est en crise ; l’administration centrale de l’État montre également des signes de dysfonctionnement, avec des services essentiels comme la douane et la Direction Générale des Impôts (DGI) qui peinent à fonctionner normalement. L’incapacité de l’État à payer ses employés et à assurer des approvisionnements vitaux en carburant, produits alimentaires et médicaments menace de plonger le pays dans une crise humanitaire imminente.
Madistin appelle à un renforcement urgent des institutions publiques, tant au niveau central que local, pour restaurer l’ordre et la stabilité. Il souligne la nécessité de permettre au système judiciaire de fonctionner efficacement et de remplir sa mission, ainsi que de restaurer le contrôle des marchés publics par les collectivités territoriales.
En outre, Me Madistin met en lumière l’urgence d’une vaste campagne d’accompagnement social pour aider les populations touchées par les crises récentes, notamment les centaines de milliers de déplacés internes. Il souligne que la sécurité ne peut être garantie sans un programme social solide qui permette aux personnes déplacées de retourner chez elles en toute sécurité et de reprendre leurs activités.
Les ravages causés par les gangs, qui ont incendié des institutions vitales telles que des hôpitaux, des pharmacies et des écoles, nécessitent une intervention de l’État pour aider à la reconstruction et à la reprise des activités. L’accès aux soins de santé, à l’éducation et au logement doit être facilité, et une politique de protection sociale doit être mise en place pour soutenir les communautés vulnérables.
Me Madistin souligne l’importance de relancer l’économie nationale pour sortir le pays de la récession prolongée. Il appelle à des mesures énergiques de lutte contre la corruption, la fraude fiscale et la contrebande, ainsi qu’à une augmentation du salaire minimum pour stimuler les revenus des ménages. Il insiste sur le rôle essentiel de l’État dans le développement du secteur agricole pour dynamiser l’économie rurale et garantir la sécurité alimentaire.
Dans le paysage politique actuel, poursuit Madistin, la mise en place d’élections justes et équitables est plus qu’un simple devoir, c’est une nécessité impérieuse. L’éminent avocat Me Samuel Madistin souligne avec pertinence que les élections constituent un droit fondamental, celui de choisir nos dirigeants de manière démocratique et de leur demander des comptes par la suite.
Madistin met en lumière l’importance cruciale que les règles électorales soient équitables pour tous les acteurs politiques, gouvernementaux comme de l’opposition. Cette équité doit également s’étendre aux candidats ainsi qu’à des groupes spécifiques tels que les femmes et les personnes handicapées, garantissant ainsi une représentation inclusive.
Un point essentiel soulevé par Madistin est l’impératif pour les partis au pouvoir de ne pas abuser de leur position pour maintenir leur pouvoir par des moyens déloyaux. Il suggère même d’interdire la participation aux prochaines élections des partis politiques qui composent actuellement le Conseil Présidentiel Provisoire (CPT), afin d’éviter tout conflit d’intérêts.
En proposant que les partis au pouvoir jouent uniquement le rôle d’arbitre lors des élections à venir, Madistin insiste sur la nécessité d’un esprit de sacrifice pour le bien commun. Tout détournement de ce principe pourrait conduire à une nouvelle crise post-électorale, mettant en péril la stabilité du pays.
La fuite massive des cerveaux, conséquence directe du climat d’insécurité, représente un obstacle majeur au développement économique d’Haïti. Me Samuel Madistin souligne avec justesse l’urgence de mettre un terme à cette hémorragie. Il met en avant la nécessité d’une politique incitative visant à encourager le retour des professionnels qualifiés qui ont quitté le pays en raison de l’insécurité.
Madistin souligne également les conséquences dévastatrices de cette fuite des cerveaux sur la reprise économique d’Haïti, mettant en garde contre les difficultés de remplacement rapide de ces professionnels qualifiés.
En se référant à l’exemple du président salvadorien Nayib Bukele, Me Samuel Madistin met en lumière le pouvoir de la volonté politique dans la réalisation de progrès significatifs. Il insiste sur le fait que faire de la politique devrait être motivé par un désir sincère d’aider son peuple, et non par des intérêts personnels.
Madistin souligne également l’importance d’un leadership responsable et engagé, conscient des défis auxquels fait face la nation. Il appelle à un renforcement de l’État, mettant en garde contre les conséquences désastreuses d’un manque d’action décisive de la part des dirigeants.