Michaëlle Jean sonne l’alarme : « Haïti pa kapap ankò »

Michaelle Jean, ancienne gouverneure generale du Canada...

MONTRÉAL, vendredi 28 mars 2025Face à l’agonie d’Haïti, Michaëlle Jean, ancienne gouverneure générale du Canada et fille de la terre natale, ne peut plus se taire. Dans une déclaration poignante, elle dresse un tableau alarmant de la situation du pays, où l’effondrement de l’État a laissé place à une spirale de violence et de désespoir. « Haïti pa kapap ankò », lâche-t-elle, dans un cri de détresse qui résonne comme un ultime avertissement.

Les gangs ont pris le contrôle du pays, imposant leur loi de terreur à une population abandonnée. « L’État ne nous protège plus », constate-t-elle avec amertume. Depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse, la nation est emportée dans un engrenage infernal qui ne cesse de s’aggraver. Chaque jour, de nouveaux territoires tombent sous la coupe des groupes armés, réduisant à néant toute autorité étatique. La capitale, Port-au-Prince, n’est plus qu’un champ de bataille où la mort et la désolation règnent en maîtres.

La tragédie est d’une ampleur inédite. Plus d’un million de personnes ont été chassées de leurs maisons et survivent désormais dans la rue, dans des conditions inhumaines. Les écoles ferment leurs portes, privant les enfants de leur avenir. Les hôpitaux sont à l’agonie, incapables de soigner les malades. Pourtant, au cœur de ce chaos, les politiciens continuent leurs luttes intestines, s’acharnant à se disputer un pouvoir vidé de toute substance, sans aucune vision pour sauver la nation.

Michaëlle Jean ne se limite pas à dénoncer l’effondrement du pays ; elle lance un appel vibrant à une mobilisation d’envergure. Face à ce qu’elle qualifie de projet criminel visant la destruction d’Haïti, elle incite les victimes et leurs alliés à opposer une réponse collective, forte et organisée.

Déterminée, elle en appelle à la conscience du peuple haïtien, en Haïti comme dans la diaspora, l’invitant à se lever et à assumer pleinement sa responsabilité citoyenne. « Lemoment est venu de reprendre le contrôle de notre destin », insiste-t-elle.

Dans cet élan, elle propose la tenue d’un Congrès patriotique, un espace de dialogue inclusif où toutes les forces progressistes du pays pourraient s’unir pour repenser et poser les bases d’une reconstruction nationale solide et durable.

Trois axes majeurs émergent de cet appel. D’abord, la nécessité absolue de restaurer la sécurité. « Sans sécurité, il n’y a pas de pays. Sans sécurité, il n’y a pas de vie », rappelle-t-elle. Il est impératif de reprendre le contrôle du territoire, de rétablir les connexions entre la capitale et les provinces, de permettre aux familles déplacées de regagner leurs foyers et de relancer la vie économique et sociale.

Ensuite, il faut briser le cycle des transitions politiques sans fin. Seul un processus électoral libre et souverain, à l’abri des manipulations mafieuses et des ingérences étrangères, permettra au peuple de choisir ses dirigeants légitimes et de reconstruire les institutions du pays sur des bases solides.

Enfin, il est temps de réinventer la gouvernance. « Le système qui nous a menés à ce désastre peut-il continuer ? » questionne-t-elle. Haïti ne peut plus se permettre d’être l’otage de groupes politiques et d’intérêts mafieux qui ne servent que leurs propres ambitions. Il faut un nouvel ordre institutionnel capable de protéger l’héritage des ancêtres et d’empêcher que l’histoire ne se répète.

Dans cet engagement, Michaëlle Jean tient à être claire : il ne s’agit pas d’une quête de pouvoir. « Nous ne cherchons aucune position dans une quelconque transition. Haïti est notre pays, et nous voulons le sauver. » L’heure n’est plus aux demi-mesures ni aux déclarations creuses. L’heure est à l’action. Elle appelle chaque Haïtien, où qu’il se trouve, à rejoindre cette initiative pour faire du Congrès patriotique un premier pas décisif vers le renouveau national.