“ Malgré l’escalade terrifiante de la violence, l’avenir d’Haïti est prometteur”…

Ulrika Richardson, Coordonnatrice résidente et humanitaire des Nations-Unies...

Offrir des alternatives à la jeunesse haïtienne et renforcer les institutions locales : une urgence pour redonner espoir à Haïti

PORT-AU-PRINCE, samedi 28 décembre 2024– Dans une entrevue avec ONU Info, Ulrika Richardson, Coordinatrice résidente et humanitaire des Nations Unies pour Haïti, a brossé un tableau alarmant de la crise multiforme qui secoue le pays. Marquée par la violence des gangs, l’instabilité politique, le déplacement de plus de 700 000 personnes et une insécurité alimentaire généralisée, la situation actuelle exige des actions décisives pour protéger les plus vulnérables et envisager un avenir durable.

Une escalade terrifiante de la violence

Ulrika Richardson a décrit une recrudescence des massacres, notamment à Port-au-Prince et dans l’Artibonite, où des actes de déshumanisation continuent de déchirer le tissu social. “Ces atrocités ne font qu’aggraver le traumatisme collectif du peuple haïtien”, a-t-elle déclaré. Les Nations Unies s’emploient à intégrer des programmes de santé mentale et de soutien psychosocial dans leur réponse humanitaire, tout en insistant sur la nécessité d’une sécurité accrue pour permettre un redressement durable.

Face à l’incapacité des forces de sécurité locales à protéger les citoyens, les efforts se concentrent sur l’assistance aux familles déplacées, souvent plusieurs fois. “Il est impératif de garantir des conditions de vie décentes pour ces personnes, mais la sécurité reste une condition préalable pour répondre aux défis humanitaires et amorcer une reprise économique”, a-t-elle ajouté.

Des jeunes piégés entre pauvreté et violence

Le recrutement des enfants par des gangs armés illustre une des facettes les plus tragiques de cette crise. Selon l’UNICEF, le nombre de mineurs enrôlés a augmenté de 70 % en un an, avec des enfants dès l’âge de huit ans contraints de servir comme messagers ou informateurs. Richardson souligne que cette dérive résulte d’un manque criant d’opportunités. “Si la seule option pour survivre est de rejoindre un gang, qu’attendons-nous de ces jeunes ?”

Les Nations Unies insistent sur la nécessité de proposer des alternatives viables, telles que des emplois, une éducation accessible et un accès sécurisé aux régions non gangrenées par la violence. “Ce n’est pas une fatalité. Haïti regorge de ressources humaines et d’une créativité immense”, a affirmé la haute fonctionnaire.

La sécurité : clé de la stabilité politique et économique

La Coordinatrice a également évoqué les défis liés à la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS), encore en phase de pré-déploiement. Malgré le rôle moteur du Kenya et des contributions limitées de la communauté internationale, elle insiste sur l’urgence d’un soutien accru pour renforcer la sécurité, une étape fondamentale pour avancer vers des élections crédibles et une paix durable.

Pour Richardson, la stabilité politique repose sur un environnement sûr permettant aux citoyens de participer à la vie démocratique. “Le gouvernement haïtien s’est engagé dans un ambitieux programme électoral et de réforme constitutionnelle, mais cela nécessite des investissements dans la reprise économique et la paix sociale”, a-t-elle expliqué.

Tirer les leçons des erreurs passées

En revenant sur les investissements massifs après le séisme de 2010, Ulrika Richardson a critiqué leur faible impact sur le renforcement des institutions locales. “Pourquoi ces fonds n’ont-ils pas été utilisés pour consolider les capacités productives du pays ? L’absence de stabilité décourage aujourd’hui les investisseurs étrangers.”

Elle a plaidé pour une approche centrée sur le leadership haïtien, en reconnaissant le rôle historique d’Haïti comme membre fondateur des Nations Unies. “Les Haïtiens doivent diriger ce processus. Notre rôle est de les soutenir dans leur vision d’un avenir meilleur.”

Un avenir possible, mais exigeant

Malgré les nombreux défis, Richardson reste optimiste quant au potentiel d’Haïti à redevenir un symbole d’espoir, d’indépendance et de liberté. “Le destin d’Haïti est aussi prometteur que celui de n’importe quel autre pays. Il y a eu des erreurs, mais nous devons en tirer des leçons et améliorer les choses.”

Offrir des opportunités à la jeunesse, restaurer la sécurité et renforcer les institutions locales ne sont pas des choix, mais des impératifs pour redonner à Haïti une place de leader dans la région caribéenne. L’urgence d’agir, aujourd’hui et non demain, est désormais au cœur de l’engagement des Nations Unies.