Magalie Habitant, Prophane Victor, Eliinor Devallon : les mécanismes d’une collusion politique et médiatique avec les gangs de « viv ansanm » dévoilés par des informations accablantes

Profane Victor, ancien depute, Magalie Habitant, ancienne directrice generale du SNGRS et Elionor Devallon, ancien directeur de la C.A.S...

PORT-AU-PRINCE, lundi 14 avek 2025, (RHINEWS)- Des informations obtenues par la rédaction de RHINEWS mettent en lumière un système de collusion organisé entre plusieurs personnalités politiques haïtiennes de premier plan et les réseaux armés les plus violents du pays. Les données disponibles révèlent l’implication directe de Magalie Habitant, ancienne directrice du SNGRS ; de l’ancien député Prophane Victor ; et du directeur de la Caisse d’assistance sociale (CAS), Eliinor Devallon, dans un vaste réseau criminel soutenant la coalition « viv ansanm » dirigée par Jimmy Chérizier alias Barbecue.

Le dossier contient des éléments matériels, des déclarations, des conversations WhatsApp, des relevés téléphoniques, des saisies de biens, ainsi que des constats circonstanciés montrant une architecture de soutien actif, continu et structuré entre les sphères politiques, administratives et les chefs de gangs.

Arrêtée le 9 janvier 2025 à Thomassin, Magalie Habitant était à bord d’un véhicule enregistré au nom de GMS Rent A Car, accompagné de son chauffeur Lenès Jean Philippe. Ce dernier détenait plusieurs téléphones dont l’un servait à effectuer des transactions « Mon Cash » au profit de Jimmy Chérizier et de Kempès Sanon.

Lors des premiers interrogatoires, Habitant a reconnu avoir été en communication avec des chefs de gang tels que Chérizier, Sanon, Johnson André alias Izo, Claudy Célestin alias Chen Mechan, Ezéchiel Alexandre alias Ze An, et Jeff Larose alias Jeff Gwo Lwa. Elle admet également avoir utilisé les numéros de téléphone de son chauffeur pour envoyer de l’argent, sans toutefois préciser les montants.

Parmi les extraits les plus accablants retrouvés sur son téléphone, figure une note vocale où elle transmet à Prophane Victor une demande du chef de gang Kempès Sanon :

« Kòm se batay nap batay, fòk nou jwenn 20 kès bal, kès la 3500 sa fè 70,000 dola… nap jwenn mayi. »

À cette requête, Victor aurait répondu qu’il n’était pas en mesure de fournir une telle quantité, sans nier avoir eu l’échange. Il a justifié cette communication par des menaces qu’il aurait reçues d’un autre gang, Kraze Baryè, selon ses dires.

L’interpellation de Prophane Victor à Vivy Mitchell, le 12 janvier 2025, s’est soldée par la découverte de plusieurs véhicules, passeports, chèques, livrets bancaires, et documents d’identité. Le domicile abritait aussi plusieurs individus identifiés comme proches collaborateurs : Joseph Saget alias Djo, Claudel Victor, Eder Victor, Peterson Félix, Evens Monnier, Jensen Ghandi Victor et Jacquelin Glaude.

Des transactions bancaires d’envergure, dont un chèque de plus de 2 millions de gourdes émis par l’entreprise CELISE au profit du FDI, ainsi que d’autres au nom de Joseph Saget, ont été saisies. L’entreprise CELISE, propriété de Prophane Victor, est soupçonnée d’avoir servi de support logistique et de couverture à ces opérations.

Joseph Saget, chauffeur de Victor depuis 2017, a reconnu avoir été armé par ce dernier pour assurer sa sécurité et a confirmé sa communication avec des numéros associés aux chefs de gang mentionnés. Les données téléphoniques lient son appareil à ceux de Magalie Habitant, Réginald Exil, et même un juge Dorsainvil.

Directeur de la CAS, Eliinor Devallon a été arrêté le 30 janvier 2025 à Turgeau en compagnie de deux agents de la PNH, détachés illégalement auprès de lui. Son implication ressort clairement d’un échange vocal entre Barbecue et Magalie Habitant, où cette dernière affirme que le directeur général de la CAS a promis l’envoi de 350,000 gourdes en soutien au gang.

Les données extraites de son téléphone et les témoignages montrent que Devallon agissait comme levier administratif pour injecter des ressources financières publiques au profit de l’organisation criminelle « viv ansanm ».

Mais la largesse de Devallon ne se limitait pas au soutien direct aux gangs. Un message texte adressé au PDG d’une station de radio très populaire de la capitale, révèle qu’il a imprimé un chèque de 4 millions de gourdes au nom de ladite station, sans précision sur les motifs ou les prestations associées. Il aurait reconnu avoir effectué ce type de transactions pour d’autres médias, dint une agence en ligne également bien connu sur l’échiquier médiatique en Haïti

Les communications analysées révèlent une constellation de noms interconnectés autour du noyau formé par Habitant, Victor et Devallon. Parmi eux figurent :

– Chalè, impliqué dans des discussions de revente de véhicules volés ;

– Tipouchon, Celelou, Sonson et Kervens Louis, tous décrits par Habitant comme ses « camarades politiques » et médiateurs avec les gangs ;

– Guy Philippe, avec qui elle admet des relations purement politiques ;

– Alain Auguste, inspecteur général de la PNH, dont l’ascension aurait été soutenue par le réseau ;

– Jeff Larose, bénéficiaire présumé d’un véhicule blindé offert par un homme d’affaires et dont Habitant aurait négocié avec les gangs le retour des camions détournés.

Les informations obtenues indiquent que la coalition « viv ansanm » est responsable d’au moins une dizaine d’assassinats ciblés de policiers entre février 2024 et février 2025, dont Luciana Pierre, Espénat Célestin, Jeff Petit Dieu, James Dorsainvil et Dunny Crépín. Plusieurs civils, militants politiques et religieux figurent également parmi les victimes.

Magalie Habitant est également citée dans plusieurs notes de renseignements comme commanditaire indirect d’enlèvements, de séquestrations contre rançon, d’incendies criminels et d’attaques armées. Elle est pointée du doigt dans l’enlèvement d’un groupe d’élèves en 2020 par le gang 400 Mawozo, dans l’attaque contre le convoi diplomatique chilien en 2019, et dans le kidnapping des religieux de la Route de Malpasse en 2021.

À travers des échanges détaillés, il est confirmé que les responsables politiques impliqués discutaient de l’achat d’armes et de munitions, de véhicules, de liquidités, et de transferts logistiques. Ils s’appuyaient sur des structures formelles (entreprises, banques, institutions publiques) pour dissimuler ces flux.

La volonté exprimée par Magalie Habitant de positionner Alain Auguste à la tête de la PNH avec l’appui de la coalition « viv ansanm » constitue un indice sérieux d’une stratégie de prise de contrôle institutionnelle au service d’intérêts criminels.

Les faits établis dans les informations obtenues par RHINEWS démontrent que la compromission entre politiques et gangs en Haïti a franchi un seuil inédit. Ce n’est plus une tolérance implicite, mais une orchestration délibérée, un pacte souterrain structuré autour de personnalités publiques, de services administratifs, de dispositifs économiques et de réseaux armés.

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Vitelhomme Innocent, chef du gang Kraze Barye, Jimmy Barbecue Cherizier , chef de la federation des gangs G-an Fanmi e Alye, Izo du gang 5 seconde de Village de Dieu, Jeff, chef de gang de Canaan, Lanmo San Jou, chef du gang 400 Mawozo….

Ces derniers mois, l’organisation terroriste « Viv Ansanm », dirigée par Jimmy Chérizier alias « Barbecue », a intensifié ses exactions dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, l’Artibonite et le Plateau Central. Les attaques ciblent indistinctement civils, infrastructures vitales et institutions publiques, provoquant une crise humanitaire sans précédent.

En décembre 2024, les quartiers de Delmas 19, Delmas 30, Tabarre 25 et 27 ont été le théâtre d’attaques sanglantes. Des dizaines de personnes ont été tuées, dont des enfants, et plusieurs maisons incendiées. À Petite-Rivière de l’Artibonite, le gang « Gran Grif », affilié à « Viv Ansanm », a massacré au moins dix personnes et enlevé plusieurs autres. Des véhicules ont également été incendiés lors de ces attaques.   

Entre le 6 et le 11 décembre 2024, le gang dirigé par Micanor Altès, alias « Wa Mikanò », a orchestré un massacre dans le quartier de Wharf Jérémie, à Cité Soleil. Selon un rapport conjoint du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), au moins 207 personnes ont été exécutées, dont 134 hommes et 73 femmes. La majorité des victimes étaient des personnes âgées, accusées à tort de sorcellerie suite à la maladie du fils du chef de gang. Les victimes ont été traquées à leur domicile ou dans des lieux de culte, capturées, interrogées dans un prétendu « centre de formation », puis conduites vers un site d’exécution où elles ont été abattues ou tuées à l’arme blanche. Les corps ont ensuite été brûlés ou mutilés pour effacer les preuves.     

En octobre 2024, la localité de Pont-Sondé, dans le département de l’Artibonite, a été le théâtre d’un massacre perpétré par le gang Gran Grif. Selon des rapports, au moins 115 personnes ont été tuées, y compris des bébés et des personnes âgées. L’attaque aurait été motivée par la volonté du gang de punir la communauté pour son refus de se soumettre à leur contrôle. Les habitants ont été terrorisés, et de nombreuses maisons ont été incendiées, provoquant des déplacements massifs de population.

Ces massacres s’inscrivent dans un contexte plus large de violence généralisée en Haïti, où les gangs armés commettent des atrocités en toute impunité, ciblant les civils, les infrastructures essentielles, et exacerbant la crise humanitaire. Les attaques contre des hôpitaux, des écoles, des lieux de culte, ainsi que les déplacements forcés de populations, les enlèvements contre rançon, et les violences sexuelles, notamment contre des mineures, sont devenus monnaie courante. La communauté internationale a appelé à des actions coordonnées pour restaurer la sécurité et l’État de droit en Haïti.

Les groupes armés ont ciblé des infrastructures vitales. En décembre 2024, lors de la réouverture de l’Hôpital Général à Port-au-Prince, une attaque a causé la mort de deux journalistes et d’un policier. Des hôpitaux, des pharmacies, des universités et des installations policières ont été incendiés ou détruits, aggravant la crise sanitaire et éducative.

La presse haïtienne est également prise pour cible. En mars 2025, des stations de radio telles que Radio Caraïbes, Radio Mélodie et Radio Télé Plurielle ont été incendiées. Ces attaques visent à bâillonner les médias et instaurer un climat de peur généralisé.

La violence des gangs a entraîné le déplacement de plus d’un million de personnes, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Les civils fuient les zones de conflit, exacerbant la crise humanitaire.

Malgré quelques opérations des forces de l’ordre, l’État haïtien peine à contenir la montée en puissance des groupes armés. La destruction des infrastructures publiques et l’extension du contrôle territorial des gangs témoignent de l’effondrement progressif des institutions.