PORT-AU-PRINCE, lundi 16 décembre 2024 – Malgré le refus des trois conseillers-présidents Louis Gérald Gilles, Smith Augustin et Emmanuel Vertilaire de se présenter au cabinet d’instruction, le magistrat en charge du dossier poursuit son enquête. Le juge Benjamin Félismé a récemment auditionné Onold Fontaine, un policier proche de Louis Gérald Gilles, le vendredi 13 décembre 2024.
D’autres personnes, telles que Fritz William Michel, ancien Premier ministre désigné, Éric Smarki Charles et Marie Myrtho Midy Louis, directrice de la carte de crédit à la BNC, seront également entendues en tant que témoins, selon une source proche du dossier. Bien que convoqués, aucun des trois inculpés n’a comparu devant le juge d’instruction.
Louis Gérald Gilles a récusé tous les magistrats instructeurs du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, tandis qu’Emmanuel Vertilaire a interjeté appel. Les trois conseillers, qui continuent de clamer leur innocence, soutiennent que leur statut ne leur permet pas de répondre devant un tribunal de droit commun, affirmant être justiciables uniquement devant la Haute Cour de justice. Cette position a suscité de vives réactions, plusieurs secteurs appelant à leur mise à l’écart pour permettre le bon déroulement de la justice.
Selon une source proche du dossier, le juge Félismé pourrait prochainement émettre des mandats d’amener à l’encontre des conseillers-présidents afin de les contraindre à se présenter devant la justice. Cette décision interviendrait dans le cadre d’une affaire qui a pris une ampleur nationale, avec de graves accusations portées contre ces hauts responsables.
En octobre 2024, l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) a, à l’issue de son enquête, exigé des poursuites pénales contre Louis Gérald Gilles, Smith Augustin, Emmanuel Vertilaire et Raoul Pascal Pierre Louis, président du Conseil d’Administration de la Banque Nationale de Crédit (BNC), pour leur implication présumée dans des actes de corruption.
Cette affaire a émergé à la suite de pourparlers relatifs à la reconduction de Raoul Pascal Pierre Louis à la tête de la BNC. Une réunion déterminante s’est tenue à l’hôtel Royal Oasis, dans la chambre 408, entre Raoul Pascal Pierre Louis et les membres du CPT, en présence du consul Lonick Léandre. Cette rencontre aurait été organisée par Louis Gérald Gilles, un proche de Raoul Pascal Pierre Louis.
Il a été rapporté que, lors de cette réunion, les membres du CPT auraient exigé une somme de 100 millions de gourdes pour assurer la reconduction de Pierre Louis à la tête de la BNC. Ces accusations sont étayées par une lettre adressée au Premier ministre Gary Conille le 24 juillet 2024, ainsi qu’un procès-verbal établi par le juge de paix Fritz Veus. Des échanges sur WhatsApp entre Pierre Louis et Louis Gérald Gilles confirment également ces allégations.
Raoul Pascal Pierre Louis aurait proposé un prêt, une ligne de crédit ou l’utilisation de biens de la BNC pour satisfaire cette demande. Dans ce cadre, la direction des opérations de carte de crédit de la BNC a émis quatre cartes de crédit préapprouvées, d’un montant total de 20 000 USD pour trois membres du CPT et de 13 500 USD pour Lonick Léandre. Ces cartes ont été utilisées, et des paiements ont commencé dès l’ouverture de l’enquête.
L’ULCC, dans son rapport, a conclu que les membres du CPT avaient abusé de leurs fonctions et se rendaient coupables de corruption passive et de versement de pots-de-vin, des actes réprimés par la loi du 12 mars 2014 sur la prévention et la répression de la corruption. Raoul Pascal Pierre Louis, de son côté, est accusé de corruption active et de complicité.
Les analyses des communications téléphoniques ont révélé des échanges fréquents entre Pierre Louis, Léandre et Gilles, renforçant les soupçons d’un arrangement illicite. Par ailleurs, l’utilisation des fonds d’intelligence de la Présidence pour financer ces transactions soulève de graves inquiétudes.
Face à ces révélations, l’ULCC a recommandé des poursuites pénales contre les trois conseillers-présidents pour abus de fonction, corruption passive et détournement de fonds publics. Elle a également demandé des poursuites contre Raoul Pascal Pierre Louis pour corruption active, et contre Lonick Léandre, considéré comme un instigateur clé. Ces recommandations marquent une étape cruciale dans la lutte contre la corruption en Haïti.
Au cœur de cette affaire se trouve une lettre dans laquelle Raoul Pascal Pierre Louis accuse les membres du CPT d’avoir exigé des fonds en échange de sa reconduction. Cette correspondance, datée du 24 juillet 2024, a provoqué un tollé dans les sphères politiques et économiques du pays.
L’ULCC, après avoir activé une commission d’enquête, a convoqué Pierre Louis pour vérifier ses accusations. Lors de son audition, il a confirmé l’authenticité de ses propos et révélé que la réunion en question avait été orchestrée dans une ambiance de secret, où l’utilisation de téléphones portables était interdite. Cette mesure inhabituelle, selon Pierre Louis, visait à protéger la confidentialité de discussions potentiellement illicites.
Les membres du CPT ont rejeté ces accusations, qualifiant la réunion de simple rencontre de courtoisie. Cependant, la commission d’enquête a pu établir que la réunion avait bel et bien eu lieu et que des avantages financiers avaient été accordés aux membres impliqués.