PORT-AU-PRINCE, mardi 3 octobre 2023– Le juge d’instruction, Martel Jean-Claude rend son ordonnance de clôture dans le cadre de l’enquête sur le scandale de trafic illégal d’armes et de munitions impliquant l’église épiscopale d’Haïti (EEH).
Dans ce document transmis au parquet de Port-au-Prince, le magistrat instructeur ordonne le renvoi hors des liens d’inculpation d’une quinzaine de personnes accusées d’implication dans cette affaire.
Il s’agit des prêtres épiscopaux Fritz Désiré, Frantz Cole, Jean Mardoché Vil ; les nommés Gina Jean-Louis Rolles, Jean-Marie Gilles, Mamion Saint-Germain, Jean-Ralph Gracia, Steeve Jean, Prévilon Renet, Trévol Moïse, Jude Alain Louis, Gérald Ramplais, Ronald Docteur, Kléberson Jules et Dianika Jules.
Ils sont accusés de transport et de trafic illégal d’armes à feu, de munitions, de complicité de transport et de trafic illégal d’armes à feu, de munitions, de financement du terrorisme, fausse monnaie, fraude fiscale, d’évasion fiscale, de contrebande et d’association de malfaiteurs.
Dans son ordonnance, le juge instructeur estime qu’il n’y a pas lieu à suivre contre ces personnes dont la plupart sont écrouées et d’autres en fuite.
Si le parquet près le tribunal de première instance de Port-au-Prince n’interjette pas appel de cette ordonnance, ces personnes devraient être libérées.
Cependant, selon l’ordonnance rendue par le juge Martel Jean-Claude, une dizaine d’autres individus sont renvoyés devant le tribunal de première de Port-au-Prince jugeant en ses attributions criminelles siégeant sans assistance de jury.
Il s’agit de l’africain Vundla Sikumbuzo, Samson François, Lovenie Louis-Jean, Alland Dolcé, Alerte Isaac, Franklin Batista, Fernand Jean-Pierre, Remy Lindor, Johnny Docteur et Dieuné Day.
Les charges retenues contre eux sont transport et trafic illégal d’armes à feu, de munitions, de fausse monnaie et d’association de malfaiteurs ; faits prévus et réprimés par les articles 10 et 16 du décret du 23 mai 1989 sur le contrôle des armes à feu et munitions, les articles .97, 224 et 225 du code pénal, lit-on dans l’ordonnance.
Estimant qu’il y a lieu à suivre contre eux, le juge ordonne qu’ils soient pris de corps et écroués à la prison civile de la Port-au-Prince s’ils ne s’y trouvent déjà.
Cependant, le magistrat estime qu’il n’y a pas lieu à suivre contre eux pour les faits de financement du terrorisme, de fraude fiscale, d’évasion fiscale et de contrebande.
Le 13 juillet 2022, une opération de vérifications de deux conteneurs destinés à l’Église Episcopale d’Haïti en provenance de la Floride, a été réalisée à la douane de Port-au-Prince.
Les inspections réalisées ont révélé que lesdits conteneurs -ont été dédouanés suivant la déclaration de douane effectuée par la commissaire en douane Gina Jean-Louis Rolles à la douane de Port-au-Prince à partir de la franchise douanière octroyée à l’Église Episcopale d’Haïti par l’Etat haïtien.
Selon les informations obtenues du Booking List et le Booking Ship et la déclaration de douane, les conteneurs de numéro BMOU 6103158 et SEFU4212981 ont été envoyés par Fernand Jean-Pierre.
L’ordonnance révèle que Isaac Alerte et Remy Lindor figurent comme étant les personnes pour lesquelles les conteneurs étaient destinés.
‘‘Au cours de cette opération, poursuit l’ordonnance, les agents douaniers et de la police nationale d’Haïti ont découvert plus d’une vingtaine d’armes à feu (fusils et pistolets) en pièces détachées, de munitions, de chargeurs ainsi que de faux billets en devise américaine.’’
Au cours de son interrogatoire au cabinet d’instruction, souligne l’ordonnance, Samson Francois a déclaré qu’il a été dépêché par Monsieur Remy Lindor pour se rendre à la douane de Port-au-Prince en vue de superviser le dédouanement des conteneurs identifiés respectivement aux numéros BMOU 6103158 ct SEFU4212981 envoyés de la Floride étant par Alerte Isaac, Franklin Batista, Fernand Jean-Pierre et Remy Lindor au nom de l’Église Episcopale d’Haïti pour le compte de Dieuné Day.
L’instruction révèle que les documents utilisés pour procéder au dédouanement des conteneurs aux numéros BMOU 6103158 et SEFU4212981 au nom de l’Église Episcopale d’Haïti ont été contrefaits vu qu’aucune trace de ces documents n’a été retrouvée au Ministère des Cultes, entité qui devrait recevoir la demande de franchise pour le compte de l’Eglise Episcopale d’Haïti.
Selon l’ordonnance, les conteneurs ont été dédouanés au nom de l’Église Episcopale d’Haïti à la suite de la complicité de Monsieur Vundla Sikumbuzo, ancien émissaire de l’Eglise Episcopale Américaine auprès de l’Église Episcopale d’Haïti, qui a transmis les documents de la franchise de l’Église Episcopale d’Haïti à Lovenie Louis-Jean qui elle-même s’est assurée du suivi pour le dédouanement des conteneurs avec l’aide de Alland Dolcé qui a remis les documents à la commissionnaire en douane Madame Gina Jean-Louis Rolles.
L’ordonnance souligne que le numéro de téléphone de Rubens Vilmont a été inscrit sur une boite contenant les armes à feu et munitions, ce qui laisse croire qu’il est celui qui devrait recevoir ce colis trouvé à l’intérieur de l’un des conteneurs.
‘‘Il a été établi que Rubens Vilmont et Fernand Jean-Pierre ont des liens, ce qui fait croire que l’inscription de son numéro de téléphone sur l’une des boites contenant les armes à feu et munitions ne relève pas d’un simple hasard’’, selon l’ordonnance.
L’instruction établit que la franchise octroyée à l’Église Episcopale d’Haïti a été utilisée à son insu par un réseau de malfaiteurs formé de Vundla Sikumbuzo, Samson François, Lovenie Louis-Jean, Alland Dolcé, Alerte Isaac, Franklin Batista, Fernand Jean-Pierre, Remy Lindor, Johnny Docteur et Dieuné Day.
Elle précise qu’aucune demande de franchise n’a été adressée par les responsables de l’Église Episcopale aux autorités compétentes en la matière.
L’ordonnance du magistrat instructeur indique que « l’enquête n’établit aucun lien entre les personnes impliquées dans ce trafic et les responsables et employés de l’Église Episcopale d’Haïti à savoir Frantz Cole, Jean Mardoché Vil, Jean Marie Cherfils, Mamion Saint-germain et Fritz Désiré. »
Selon l’ordonnance, ‘‘l’enquête a confirmé le lien entre les responsables et employés de l’Église Episcopale d’Haïti et M. Vundla Sikumbuzo, cependant, elle n’a pas pu établir que ce dernier avait bénéficié de l’aval ou de la complicité des responsables et des employés de l’Église Episcopale d’Haïti pour trafiquer sa franchise au profit des auteurs des faits de transport et de trafic illicite de d’armes à feu et de munitions.’’
‘‘L’instruction n’a pas permis d’établir non plus l’implication de l’Église Episcopale d’Haïti via ses employés inculpés dans le cadre de cette affaire à savoir Frantz Cole, Jean Mardoché Vil, Jean-Marie Gilles, M. Mamion Saint-Germain et M. Fritz Désiré dans le processus ayant abouti au dédouanement desdits conteneurs avec la franchise octroyée à l’Eglise Episcopale d’Haïti’’, souligne l’ordonnance.