PORT-AU-PRINCE, jeudi 13 juin 2024 – Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), se dit préoccupé par la composition du nouveau gouvernement dirigé par le Premier ministre Garry Conille. Selon M. Espérance, Conille se serait laissé influencer par les barons du PHTK et leurs alliés dans le choix des personnalités qui dirigent les ministères régaliens.
Le militant des droits humains estime que Conille a donné un coup aux secteurs qui souhaitent que ces ministères ne soient pas confiés à des partis politiques pour éviter l’utilisation des fonds publics lors des prochaines élections.
“Il a fait le mauvais choix en s’alliant avec les mêmes secteurs qui ont pillé, gangstérisé et démoli toutes les institutions nationales. Depuis qu’il s’est réconcilié avec ceux qui l’ont poussé à démissionner en 2012, Conille s’attèle à réhabiliter le régime PHTK et ses alliés au détriment des intérêts du pays,” déclare Espérance.
“Ceux qui détiennent ces portefeuilles ministériels peuvent n’avoir rien à se reprocher, mais s’ils sont inféodés aux secteurs qui les ont recommandés, il y a un risque que cela se passe très mal, puisque l’ancien régime reprend du poil de la bête,” soutient Espérance.
Selon Pierre Espérance, il est inacceptable qu’après tant de luttes menées par les Haïtiens pour débarrasser le pays des régimes cleptocrates, ce soient ceux qui sont sanctionnés par la communauté internationale pour leur implication présumée dans le financement des gangs armés et la corruption qui continuent d’influencer la formation du gouvernement, appelé à diriger une transition qui se veut être de rupture.
Pour Espérance, Conille a déjà trahi le peu de confiance que certains secteurs plaçaient en lui. “En s’associant à ceux qui ont dilapidé les fonds du programme Petro Caribe et siphonné d’autres fonds publics, il a choisi son camp, celui des bourreaux et des ennemis d’Haïti et du peuple haïtien. C’est un mauvais départ pour lui et son gouvernement. Conille et son équipe devront s’évertuer à prouver aux Haïtiens qu’ils les représentent en tant que gouvernement d’Haïti. Ils doivent fournir la preuve à travers des résultats probants en matière de lutte contre les gangs, quel que soit leur rang dans la société, contre les corrupteurs et les corrompus, et en engageant des poursuites contre les dilapidateurs des fonds publics,” déclare Espérance.
‘‘Se laisser influencer par d’anciens parlementaires véreux et d’anciens Premiers ministres et hauts fonctionnaires du régime décrié, qui ont conduit le pays à une catastrophe sans précédent, n’est pas innocent’’, soutient M. Espérance, soulignant que cela participe d’un choix délibéré pour maintenir le statu quo et détruire les aspirations démocratiques des Haïtiens qui se battent pour un changement de système.
Garry Conille et son gouvernement ont pris fonction officiellement mercredi 12 juin 2024, dans un contexte de crise multidimensionnelle. Le pays est plongé dans un chaos sans précédent, marqué par une insécurité galopante alimentée par des bandes criminelles fédérées, qui assiègent la capitale haïtienne depuis plus de trois ans.
Les institutions publiques sont paralysées, l’économie est en chute libre, et la population vit dans une situation humanitaire désastreuse. Les pénuries de nourriture, de carburant et de médicaments se multiplient, tandis que les services de base comme l’éducation et la santé sont quasiment inexistants. Cette crise multidimensionnelle est exacerbée par une instabilité politique chronique et une corruption endémique qui entravent toute tentative de redressement et de développement durable du pays.