Les Haïtiens de Springfield et les Vénézuéliens d’Aurora, pris pour cible par Trump, craignent les répercussions de ses fausses accusations et menaces de déportation

Donald Trump, Ex-president des Etats-Unis...

SPRINGFIELD, (Ohio), samedi 14 septembre 2024- Dans un contexte où l’ancien président Donald Trump continue de diaboliser les immigrants, les Haïtiens de Springfield, Ohio, et les Vénézuéliens d’Aurora, Colorado, se trouvent sous le feu des projecteurs en raison des accusations et menaces infondées émises par celui-ci.

À Springfield, les cuisiniers du restaurant haïtien Rose Goute Creole se préparaient pour le service de midi lorsque le téléphone sonna. Une voix moqueuse demanda s’ils avaient des chats ou des chiens. Cette question faisait écho à des propos tenus par Trump lors d’un débat présidentiel, où il avait faussement accusé les Haïtiens de la ville de “manger les animaux de compagnie des habitants”. Romane Pierre, le gérant de 41 ans, préféra répondre avec politesse pour ne pas inquiéter son personnel, déjà nerveux après ces attaques publiques. Pourtant, cette plaisanterie désobligeante était loin d’être l’incident le plus grave. Plus tôt dans la journée, une menace à la bombe avait visé l’hôtel de ville, et deux écoles primaires avaient été mises en confinement en raison de la montée des tensions dans cette petite ville de l’Ohio.

Ces déclarations incendiaires, amplifiées par les médias de droite et les réseaux sociaux, ont exacerbé les craintes au sein des communautés d’immigrés. Des familles haïtiennes gardent leurs enfants à la maison, craignant le harcèlement scolaire, tandis que certains signalent des cas d’intimidation dans la rue ou dans les magasins. À Aurora, où des milliers de Vénézuéliens se sont installés depuis 2022, certains migrants se sont vu refuser des emplois ou des logements en raison de leur nationalité, et des groupes armés prétendant offrir protection sont apparus, nourrissant davantage les tensions.

Dans ces deux villes, malgré les efforts des autorités locales pour démentir les accusations de Trump, celui-ci persiste à les répéter lors de ses rassemblements. Il affirme que des gangs vénézuéliens dominent Aurora et que des immigrés haïtiens illégaux “s’emparent” de Springfield, bien que les responsables locaux aient clairement expliqué que la plupart des Haïtiens dans cette ville sont en situation régulière. En réalité, ces immigrants contribuent à l’économie locale, remplissant des emplois non pourvus dans une région historiquement blanche en déclin économique.

Cependant, la croissance rapide de la population haïtienne, estimée à environ 20 000 personnes depuis 2020, a créé des tensions. La ville peine à répondre à la demande en logements, et les services publics, notamment les écoles et les hôpitaux, sont sous pression. Les tensions se sont intensifiées après un accident en août impliquant un conducteur haïtien sans permis valide, qui a percuté un bus scolaire, tuant un enfant de 11 ans et en blessant 23 autres.

Pendant ce temps, à Aurora, la ville est confrontée à une autre tempête médiatique liée aux accusations concernant le gang vénézuélien Tren de Aragua. Bien que des membres de ce gang aient été arrêtés, les autorités locales ont précisé que l’idée que ces criminels avaient “pris le contrôle” de certains complexes d’appartements était exagérée. Néanmoins, la peur s’est répandue parmi les résidents vénézuéliens. Certains témoignent de conditions de vie précaires et d’une montée de la xénophobie, exacerbée par les propos de Trump.

Les attaques verbales et les rumeurs ont conduit des groupes locaux à intervenir, certains prétendant protéger les résidents contre les gangs, ce qui a engendré encore plus de méfiance. Dans ce climat tendu, de nombreux immigrants, qu’ils soient haïtiens ou vénézuéliens, se sentent pris au piège entre une réalité déformée par la rhétorique politique et les difficultés quotidiennes auxquelles ils sont confrontés.

Viles Dorsainvil, président du Haitian Community Help & Support Center à Springfield, tente de changer la perception des Haïtiens dans la ville. Avec une présentation PowerPoint qu’il avait préparée bien avant les récentes déclarations de Trump, il cherche à montrer que ces immigrants sont ici pour travailler et contribuer à la société américaine. Il insiste : les Haïtiens de Springfield ne mangent ni chiens ni chats, et ils partagent des valeurs communes avec leurs voisins américains.

Malgré ces efforts, de nombreuses familles haïtiennes et vénézuéliennes envisagent de quitter ces villes, se demandant si elles sont encore en sécurité dans ce climat de peur et de suspicion croissante.

 

Cet article de  et ://www.washingtonpost.com/nation/2024/09/14/trump-immigrants-haitian-venezuelan-springfield-aurora/