VATICAN, (Rome), lundi 27 janvier 2025-
Dans une interview accordée à l’Associated Press à Rome, Leslie Voltaire, président du Conseil présidentiel de transition en Haïti, a qualifié de « catastrophiques » les décisions de l’administration Trump visant à suspendre les programmes d’aide, expulser des migrants et bloquer l’accueil des réfugiés. Cette déclaration intervient après une rencontre avec le pape François au Vatican, où Voltaire a sollicité l’aide internationale pour faire face à la crise en Haïti.
« Je frappe aux portes des gens qui aiment Haïti. Le pape aime Haïti et il est prêt à aider », a déclaré Voltaire.
Le président haïtien par intérim a discuté avec le souverain pontife de la situation désastreuse dans son pays, marqué par la violence des gangs, une insécurité alimentaire généralisée touchant près de la moitié des 11,4 millions d’habitants, et une absence de services de base. Selon Voltaire, la perte de l’aide humanitaire aggraverait drastiquement cette crise déjà insupportable.
Voltaire a rappelé des déclarations polémiques de Donald Trump au cours de son premier mandat, où il avait qualifié Haïti et certains pays africains de « pays de merde ». À l’époque, la Maison Blanche n’avait pas nié ces propos mais avait déclaré que le président soutenait des politiques migratoires accueillant « ceux qui peuvent contribuer à notre société ».
Les nouvelles politiques américaines pourraient entraîner l’expulsion de près de 1,5 million d’Haïtiens vivant aux États-Unis, dont environ 150 000 bénéficient du Temporary Protection System (TPS). « Haïti ne peut pas gérer un tel afflux de personnes », a souligné Voltaire.
Selon un rapport de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) publié ce mois-ci, le nombre de déplacés internes en Haïti a triplé en un an, dépassant désormais le million de personnes, en raison de la violence des gangs. À Port-au-Prince, où 85 % du territoire est sous leur contrôle, les violences ont conduit à l’effondrement des services de santé et à une aggravation de l’insécurité alimentaire.
Plus de 200 000 Haïtiens ont été renvoyés de force au pays au cours de l’année écoulée, principalement depuis la République dominicaine. Parallèlement, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a signalé plus de 5 600 homicides en Haïti l’an dernier, soit une augmentation de 20 % par rapport à 2023.
Malgré la puissance croissante des gangs depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021, Voltaire se dit convaincu que des élections générales peuvent avoir lieu d’ici novembre 2025, à condition que la force multinationale de police soit renforcée.
Actuellement dirigée par le Kenya, cette force comprend un peu plus de 600 agents, loin des 2 500 espérés. Le Bénin a promis l’envoi de 2 000 soldats supplémentaires, tandis que des contingents du Guatemala et du Salvador ont déjà commencé à arriver.
Voltaire insiste sur la nécessité de mener un référendum sur une nouvelle constitution avant les élections, affirmant que 80 % du pays reste accessible pour organiser un tel scrutin. Cependant, il exclut toute participation des gangs au processus politique, qu’il qualifie de « criminels ».
Lors de sa rencontre avec le pape François, Voltaire a demandé l’organisation d’une conférence internationale de solidarité pour Haïti. Selon lui, le pape a noté cette proposition et le secrétaire d’État du Vatican, Pietro Parolin, a exprimé l’intention de convaincre des pays comme le Mexique et le Canada de contribuer à cette initiative.
Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a récemment averti que sans soutien international accru, les gangs pourraient prendre le contrôle total de Port-au-Prince, entraînant un effondrement complet des institutions étatiques en Haïti.
Cet article de Trisha Thomas a été publié initialement en Anglais sur: https://apnews.com/article/voltaire-haiti-pope-francis-vatican-ed83defc47478996b6c4133da233abb7#