PORT-AU-PRINCE, samedi 12 octobre 2024- Le Secteur Paysan Populaire Haïtien (SPPH), par le biais d’une note rendue publique le samedi 12 octobre 2024, a fermement dénoncé les déportations massives de citoyens haïtiens en République dominicaine. Selon le SPPH, ces expulsions sont discriminatoires et s’inscrivent dans une longue histoire de tensions entre les deux nations voisines. Le secteur paysan qualifie ces actions de manifestations de racisme et exhorte les autorités haïtiennes à réagir de manière plus proactive pour protéger leurs concitoyens.
Cette réaction intervient alors que les déportations d’Haïtiens par les autorités dominicaines se multiplient depuis ces dernières années. Le contexte de la crise migratoire actuelle reflète des contentieux historiques qui ont souvent marqué les relations entre Haïti et la République dominicaine. En 2013, une décision controversée de la Cour constitutionnelle dominicaine a rétroactivement retiré la nationalité à des dizaines de milliers de Dominicains d’origine haïtienne, aggravant ainsi les tensions entre les deux pays. Depuis lors, des vagues d’expulsions ont régulièrement visé les travailleurs haïtiens vivant en République dominicaine, principalement dans les secteurs agricoles et de la construction.
En 2023, selon les rapports officiels, plus de 200 000 Haïtiens avaient été expulsés de la République dominicaine, une hausse par rapport aux années précédentes. Cette situation alarmante a suscité l’indignation au sein des organisations de droits de l’homme, qui dénoncent le traitement inhumain réservé aux migrants haïtiens. Le SPPH, dans sa note, appelle à une révision des méthodes employées par les autorités dominicaines, estimant que les expulsions massives sans respect des droits fondamentaux renforcent les divisions entre les deux peuples.
René Momplaisir, porte-parole du SPPH, a mis l’accent sur la nécessité pour les autorités haïtiennes de se préparer à mieux accueillir les Haïtiens expulsés. « Il est de notre devoir d’accueillir nos frères et sœurs avec respect et dignité. Nos paysans, qui font face à des défis énormes, doivent recevoir un soutien accru pour que les migrants rapatriés puissent bénéficier de conditions de vie décentes, même temporairement », a déclaré Momplaisir. Le secteur paysan appelle ainsi à une meilleure gestion des terres rurales et à une redistribution des ressources pour aider à réintégrer les déportés dans les dix départements du pays.
Les tensions entre Haïti et la République dominicaine ne sont pas nouvelles. En plus des disputes territoriales historiques, les différends autour des travailleurs migrants haïtiens exacerbent les relations bilatérales. Déjà en 1937, le tristement célèbre massacre de milliers d’Haïtiens par les forces dominicaines sous le régime de Rafael Trujillo avait marqué un tournant sombre dans l’histoire commune des deux pays. Aujourd’hui encore, ces souvenirs amers et les actions discriminatoires à l’encontre des migrants haïtiens continuent de hanter la relation entre les deux peuples.
Alors que la pression monte sur le gouvernement haïtien pour négocier de meilleures conditions de traitement pour ses ressortissants, le SPPH insiste sur le fait que la solution durable réside dans le renforcement du secteur agricole haïtien. « Tant que nos paysans n’auront pas les moyens de subsister dans leur propre pays, l’exode vers la République dominicaine se poursuivra, avec toutes les souffrances qu’il entraîne », souligne la note du SPPH.
Dans ce contexte, le SPPH exhorte les autorités haïtiennes à non seulement dénoncer ces déportations sur la scène internationale, mais également à prendre des mesures concrètes pour améliorer les conditions de vie des Haïtiens dans les zones rurales. Le secteur plaide pour une politique agricole inclusive, capable de freiner l’exode rural et de permettre aux Haïtiens de vivre dignement dans leur propre pays, loin des persécutions et des humiliations subies de l’autre côté de la frontière.
Alors que la communauté internationale appelle au respect des droits humains, la situation des Haïtiens en République dominicaine demeure un enjeu brûlant. Le SPPH, par ses déclarations, espère encourager un sursaut de solidarité nationale et internationale pour mettre fin à ces déportations massives et injustes.