Le RNDDH dénonce le blocage du dossier de corruption impliquant trois conseillers présidents par le Parquet de Port-au-Prince…

Les Conseillers-presidents: Emmanuel Vertilaire, Smith Augustin et Louis Gerald Gilles...

PORT-AU-PRINCE, mardi 4 février 2025Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) exprime sa vive préoccupation face au traitement du dossier de corruption impliquant les conseillers présidents Smith Augustin, Emmanuel Vertilaire et Louis Gérald Gilles. Ces derniers sont inculpés pour abus de fonction, sollicitation de pots-de-vin et corruption passive. Le RNDDH dénonce particulièrement l’attitude du Parquet près le Tribunal de première instance de Port-au-Prince, qu’il qualifie d’« ambivalente et attentiste », entravant ainsi l’avancement de l’affaire.

Selon l’organisation de défense des droits humains, le 5 octobre 2024, le Parquet avait transféré au Cabinet d’instruction le rapport d’enquête de l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC), reçu trois jours plus tôt, et avait émis un réquisitoire d’informer pour ouvrir une enquête judiciaire. Le doyen du Tribunal de première instance avait désigné le magistrat instructeur Benjamin Félisme pour traiter l’affaire. Le 17 janvier 2025, ce dernier a transmis au Parquet son cahier d’information pour réquisitoire définitif, une procédure qui devait être rapidement suivie d’effets.

Or, un mois plus tard, le commissaire du gouvernement Maître Frantz Monclair n’a toujours pas retourné le dossier, violant ainsi l’article 7 de la loi du 26 juillet 1979 sur l’Appel pénal, qui fixe un délai de cinq jours francs pour répondre. « Ce blocage constitue une obstruction à la justice », affirme le RNDDH, qui y voit une manœuvre délibérée du Parquet pour freiner l’avancement du dossier.

Le RNDDH note également un changement suspect à la tête du Parquet : le commissaire Lionel Constant Bourgoin, qui avait initié la saisine du Cabinet d’instruction, a été remplacé dans des circonstances troubles. Désormais, le Parquet semble adopter une stratégie attentiste, attendant l’arrêt-ordonnance de la Cour d’appel, saisi par le magistrat Claude Jean, pour décider du sort du dossier. Cette Cour, présidée par le juge Dufresne Guillaume, tarde d’ailleurs à rendre sa décision, bien qu’elle ait conclu ses audiences le 15 janvier 2025.

Pour le RNDDH, cette lenteur est d’autant plus préoccupante que la Cour d’appel ne peut en aucun cas suspendre l’instruction en cours. « L’appel interjeté en vertu de l’article 13 de la loi du 26 juillet 1979 n’est pas suspensif », rappelle l’organisation. Ainsi, le magistrat instructeur Benjamin Félisme devrait pouvoir poursuivre son travail jusqu’à l’ordonnance de clôture.

Le RNDDH souligne également que cette obstruction judiciaire pourrait exposer Maître Frantz Monclair à une action en prise à partie, en raison de la violation des délais légaux. L’organisation rappelle que dans toute affaire de corruption, l’État haïtien est la principale victime, représentée par la Direction Générale des Impôts (DGI), qui pourrait légalement intervenir pour exiger la poursuite du dossier.

Face à cette situation, le RNDDH interpelle le ministre de la Justice et de la Sécurité publique, Dr Patrick Pélissier, ainsi que les Parquets concernés et la Cour d’appel de Port-au-Prince, leur demandant d’assumer pleinement leurs responsabilités. « Il est impératif que l’État haïtien prouve sa volonté de lutter contre la corruption en cessant de protéger ceux qui en sont accusés », martèle l’organisation.

Le RNDDH rappelle que la lutte contre la corruption est un combat essentiel pour garantir le respect des droits économiques et sociaux en Haïti. « L’État doit disposer de ressources suffisantes pour répondre aux besoins de la population, et cela ne sera possible que si la corruption est combattue avec rigueur », conclut l’organisation.