PORT-AU-PRINCE, mercredi 11 mai 2022– Réagissant à la guerre qui a eu lieu la semaine dernière entre des gangs rivaux à la Plaine du Cul-de-sac, le RNDDH estime que cette nouvelle attaque armée est enregistrée en raison du fait que la vie n’a aucune importance en Haïti tant pour les autorités en général que pour celles-là même qui sont appelées à protéger la population.
L’organisation indique dans un rapport partiel que, du 24 avril au 6 mai 2022, un massacre d’une cruauté inouïe a été perpétré.
‘‘Pourtant, souligne le RNDDH, au plus haut niveau de l’Etat, aucune réaction n’a été enregistrée, en dépit du fait que des bilans partiels mais pas moins lourds, de pertes humaines et matérielles, aient déjà été présentés.
Des affrontements particulièrement meurtriers déroulés du 24 avril au 6 mai entre les gangs ‘‘400 Mawozo’’ et ‘‘Chen Mechan’’ et alliés, ont fait au moins cent-quarante-huit (148) morts dont sept (7) bandits membres du gang des Chen Mechan, exécutés par leur chef, Claudy Célestin alias Chen Mechan connu encore sous le nom de Stevenson Pierre, selon un rapport d’enquête partiel du réseau national de défense des droits humains (RNDDH).
Le parquet près le Tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets a affirmé avoir mis l’action publique en mouvement contre quelques-uns des bandits impliqués dans le massacre à la Plaine du Cul-de-Sac.
‘‘Toutefois, souligne l’organisation des droits humains, les exactions perpétrées dans la zone tant par le gang des 400 Mawozo que par la base des Chen Mechan ne datent pas du 24 avril 2022.’’ Rappelant que, les rares fois où des bandits membres des 400 Mawozo ont été arrêtés, ils ont été rapidement libérés par le parquet près le tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets, sur instance d’autorités politiques de ladite zone.
Selon le RNDDH, les juges de paix des tribunaux localisés dans les zones touchées par cette énième guerre, ne se sont pas mobilisés pour procéder à des constats et élaborer des procès-verbaux, en vue de les transférer au parquet, pour la mise en mouvement de l’action publique.
‘‘Les autorités policières, encore une fois, sont indexées par une frange de la population victime qui estime que l’institution policière a pris fait et cause pour la base des Chen Mechan’’, soutient l’organisation, soulignant, cependant qu’au-delà du nombre de victimes, ce sont des hommes, des femmes et des enfants – donc des personnes – qui ont été assassinés. Ce sont aussi de nombreux enfants qui sont devenus orphelins, sous le regard parfois indifférent mais souvent complice, des autorités étatiques.
Le RNDDH affirme que ‘‘depuis plusieurs années, les autorités étatiques qui se sont succédé ont fait choix de la gangstérisation de l’Etat comme nouvelle forme de gouvernance. Elles fournissent des armes et des munitions aux gangs armés, pratiquent et favorisent la contrebande pour faciliter l’entrée sur le territoire national d’armes illégales dont 76 % passent par le port de Port-au-Prince.’’
« Et, pour ne pas avoir à se justifier, depuis 2012, sous la présidence de Joseph Michel Martelly, les différentes brigades anti-contrebande qui opéraient dans les ports, aéroports et postes frontaliers du pays ont été toutes démantelées », écrit l’organisation dans un rapport.
L’organisation souligne que le plus grand fournisseur en armes et munitions – tant des gangs armés membres du G-9 an Fanmi e Alye que des gangs qui ont choisi de ne pas faire partie de cette coalition – reste et demeure l’Etat haïtien. Viennent ensuite des anciens élus, des membres du secteur privé des affaires et d’autres personnalités politiques qui veulent prendre le pouvoir et qui croient que les gangs armés constituent la seule voie à leur portée, pour ce faire.
Le RNDDH estime qu’il est regrettable qu’à chaque attaque armée, il est reproché à l’institution policière de s’allier à l’un des gangs protagonistes, généralement ceux qui sont proches du pouvoir et regroupés depuis juin 2020, autour du G-9 an Fanmi e Alye. Cette attitude a toujours eu pour conséquence de porter les groupes rivaux à être plus virulents dans leurs attaques.
En guise de recommandation, le RNDDH demande de : mettre fin à la protection des gangs armés, de fin au trafic illégal d’armes et de munitions qui leur permettent d’alimenter les gangs armés, fin à la politisation de la PNH, de porter la PNH à mettre fin à cette pratique d’appuyer les gangs armés du pouvoir, d’enquêter sur les policiers qui sont de connivence avec les bandits armés, particulièrement ceux qui mettent à la disposition du G-9 an Fanmi et Alye, des matériels et équipements policiers.
L’organisation appelle également à la reprise du contrôle du territoire aujourd’hui livré aux gangs armés, a la fin au règne de l’impunité et à la protéger la population haïtienne.