Le Parquet de Port-au-Prince fait appel tardivement de l’ordonnance rendue dans l’affaire du trafic d’armes et de munitions impliquant l’Eglise Episcopale d’Haïti…

Des armes saisies dans un container dedouane...

PORT-AU-PRINCE, jeudi 12 octobre 2023– Le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince, Me Jean Elder Guillaume a interjeté appel de l’ordonnance rendue par le juge d’instruction Martel Jean-Claude dans le cadre du dossier de trafic illicite d’armes à feu et de munitions impliquant l’Eglise Episcopale d’Haïti (EEH).

L’ordonnance a envoyé hors des liens de l’inculpation tous les prêtres et employés de, aucune charge n’étant retenue contre eux.

Elle a également révélé que la franchise de l’Église Épiscopale d’Haïti a été falsifiée par des fonctionnaires de l’État en poste au Ministère de l’Économie et des Finances agissant de concert avec un réseaux de faussaires qui, eux, sont renvoyés par devant le tribunal siégeant avec assistance de jury pour y être jugés.

Cependant, l’appel du commissaire du gouvernement semble avoir peu de chance d’aboutir compte tenu de certaines irrégularités relevées dans cette démarche.

Contacté par RHINEWS à ce sujet, l’un des avocats de l’EEH, Me Samuel Madistin a confié que le délai légal imparti au commissaire du gouvernement pour interjeter appel d’une ordonnance du juge d’instruction est d’un (1) jour franc (3 jours ordinaires) à partir de la date de réception du dossier du greffier du juge d’instruction.

A l’expiration de ce délai on a constaté dans le registre destiné à la réception de déclaration d’appel des ordonnances que le parquet n’a pas interjeté appel. On a demandé au greffier un certificat attestant qu’il n’y a pas d’appel du parquet. Le greffier a donné rendez-vous aux avocats pour venir prendre le certificat, ont souligné Madistin et un autre membre du conseil de la défense de l’EEH, qui a requis l’anonymat.

Le délai dont disposait le commissaire était épuisé le 4 octobre dernier, l’ordonnance lui ayant été communiqué formellement le 2 octobre 2023.

Selon le constat requis par les avocats de la défense, ‘‘jusqu’au mercredi 11 octobre il n’y a toujours pas eu d’appel dans le registre destiné à recevoir les déclarations d’appel et le greffier a dit qu’il y a une déclaration d’appel qui est faite mais dans le registre destiné aux formalités pour la prestation de serment.’’

‘‘Faite dans la précipitation et apparemment sous pression, la déclaration d’appel du parquet a été reçue sur une mauvaise forme, ce qui, légalement devrait contribuer à la rendre invalide et irrecevable’’, selon l’autre source.

« Comme il est difficile d’antidater une déclaration dans le registre de déclarations d’appel parce qu’on reçoit tellement de déclarations régulièrement, il est plus facile d’antidater une déclaration dans le registre de prestation de serment puisque ce registre est utilisé occasionnellement », a déclaré Me Madistin.

‘‘Pourquoi tout ça ? S’interroge l’avocat, précisant que le délai du commissaire du gouvernement pour interjeter appel étant très court. Ce délai est probablement épuisé quand le commissaire a reçu les instructions de son gouvernement pour interjeter appel dans le but de ne pas libérer les détenus’’, a-t-il ajouté.

Cependant, l’homme de loi souligne que ‘‘même si l’appel est irrégulier, c’est aux juges de la cour d’appel de le déclarer irrecevable. Les gens vont rester en prison en attendant l’arrêt de la Cour d’appel.  Les inculpés vont rester plus longtemps’ en prison par décision du gouvernement à travers son commissaire du gouvernement en violation de la loi’’, a déploré Me Madistin.

Il a fait remarquer que même dans la déclaration du greffier par devant le juge de paix qui a constaté qu’il n’y a pas d’appel, déclaration faite en présence du doyen du tribunal il a dit que le commissaire s’était pressé devant lui le mercredi 3 octobre pour faire sa déclaration d’appel. Or, mercredi était 4 octobre, date a laquelle le délai légal était complètement épuisé, a-t-il insisté.

« Tout ceci démontre les manipulations du pouvoir politique dans le cadre de ce dossier alors que ce sont des fonctionnaires de l’Etat du ministère de l’économie et des finances qui ont falsifié les documents de l’église pour monter ce dossier d’après ce que l’instruction a révélé », a déclaré Samuel Madistin.