PORT-AU-PRINCE, dimanche 3 septembre 2023– Apres plusieurs mois d’investigation, le bureau des affaires financières et économiques (BAFE), une entité de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), n’est toujours pas en mesure de retracer les sources de financement du complot ayant abouti à l’assassinat du président Jovenel Moïse dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021.
Dans le cadre de cette enquête toujours en cours, le BAFE a analysé de nombreux comptes bancaires et les transactions y relatives de personnes mises en cause dans le meurtre de Moïse, mais se garde de tirer aucune conclusion définitive.
Dans son rapport partiel, le BAFE qui a reçu commission rogatoire du juge instructeur, Walter Wesser Voltaire en charge du dossier, souligne que lors de l’interrogatoire des nommés James Solage et Joseph Vincent, ‘‘ils avaient déclaré avoir reçu un montant de quatre-vingt mille dollars américains (80,000.00 USD) pour soudoyer quatre-vingt (80) agents de I’USGPN, afin qu’ils facilitent le libre accès à la barrière principale de la maison du couple présidentiel et celles du Palais National, acte ayant abouti à l’assassinat du président de la République.’’
Dans ce cas, précise le rapport, et les corrompus et les corrupteurs doivent être poursuivis. Solage et Vincent ont été transférés aux Etats-Unis où ils ont été inculpés et doivent être jugés pour leur implication présumée dans l’assassinat de Moïse.
Le rapport fait référence également à la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP) qui avait avait confirmé ne pas détenir dans ses archives l’existence de contrats passés entre l’Etat Haïtien et la firme dénommée Matador SA, ‘‘alors qu’un chèque d’un montant exorbitant évalué à quarante-et-un millions six cent quarante mille gourdes (41, 640, 000. 00 HTG) a été tiré du Trésor Public, au nom de Matador SA, pour achat de matériels et d’équipements de sécurité pour la présidence.’’
En plus, poursuit le rapport, ‘‘ces infractions sont aussi justifiées par la lettre de virement référencée : DGTCP/DCP/SCC/BRH/570/04-2021, qui a été soumis à la BRH afin de créditer le compte de la firme dénommée Matador SA, domicilié à la SOGEBANK, d’un montant de trois millions quatre cent quatre-vingt-dix-neuf mille cinq cents dollars américains (3, 499, 500. 00 USD), pour l’achat d’équipements et de matériels de sécurité.’’
Cette correspondance a été adressée d’abord par le secrétaire général du Palais National
Lyonel Valbrun au Ministre de l’Economie et des Finances, le sieur Michel Patrick Boisvert, lui demandant de donner suite urgente à la facture de la Firme dénommée Matador SA, avant d’être soumise à la BRH. Par ailleurs, non seulement la CNMP n’est pas au courant mais encore, ces décisions ont été prises à l’insu des Directions des Forces de l’ordre, les seules compétentes pour l’achat de tels matériels.
En guise de recommandation, le BAFE juge util,e entre autres, que l’ex-Secrétaire général du Palais National, Lyonel Valbrun, le Ministre de l’Economie et des Finances, Michel Patrick Boisvert ainsi que la Banque de la République d’Haïti (BRH), soient contactés pour qu’ils fournissent des explications claires (avec preuves à l’appui), concernant les montants exorbitants [(quarante-et-un millions six cent quarante mille gourdes (41, 640, 000. 00 HTG) & les trois millions quatre cent quatre-vingt-dix-neuf mille cinq cents dollars américains (3, 499, 500. 00 USD)] alloués à l’achat de matériels et d’équipements de sécurité pour la Présidence, alors que tout achat de matériels et d’équipements de sécurité devrait concerner les Directions des forces de l’ordre du Pays.
Le document recommande que la même démarche soit entreprise auprès de l’Office National d’Assurance (ONA) afin de recueillir toutes les données relatives à la transaction payée sur présentation de facture, datée de septembre 2019, de la firme Matador SA, retracée dans les archives dudit Office.
Le rapport souhaite que le Directeur de l’Académie Nationale de Police soit contacté pour l’obtention de la liste des policiers Agent IV, affectés au Palais National, ayant faits des réclamations après le résultat du concours d’ août 2019, puisque selon les renseignements reçus, certains de ces policiers avaient comploté contre l’Ex-président de la République, Jovenel Moïse.
Il recommande de procéder, d’une part, à la vérification des adresses relatives aux résidences, aux immeubles et aux entreprises mentionnées à travers les documents de la DGI ; et d’autre part, à celles qui seront fournies par I’UCREF concernant les multiples mis en cause, afin de poser des scellés sur les biens susceptibles d’être saisies.
Le rapport suggère que l’ex-magistrat instructeur Gary Orélien pour qu’il réponde à des interrogations concernant l’ordonnance de soit communiqué » qu’il a communiqué au Parquet de Port-au-Prince en décembre 2021, sollicitant auprès du Commissaire du Gouvernement Me Jacques Lafontant, pour une main levée du mandat d’écrou en faveur des nommés : Cicéron Cédernier, Sincère Jacques, Willey Cangé et Paul Eddy Amazan, auquel le Commissaire du Gouvernement a fait opposition.
Il souhaite l’ex-ministre de la justice, Dorcé soit invité pour qu’il réponde aux interrogations lui concernant, pour avoir sollicité auprès du Juge instructeur Gary Orélien la prise de cette décision, en dépit du fait qu’il était ministre de la Justice et de la sécurité publique, lequel ne devait ni poser ni encourager aucun acte pouvant menacer la sureté intérieure de l’Etat.
Le document recommande de procéder à l’extraction, pour des séances d’audition, des nommés Dimitry HERARD et Jean Laguel Civil, pour qu’ils soient entendus autour des fàits occasionnant l’assassinat du Président de la république et de la tentative d’assassinat de son épouse, puisque les deux mis en cause étaient respectivement ancien responsable de l’USP et ancien coordonnateur du service de sécurité de la présidence, à l’époque des faits.
‘‘Il est évident que leurs auditions pourront aider à faire avancer I’enquête financière afin de découvrir de nouvelles pistes’’, selon le BAFE.
Le rapport estime qu’il faut procéder à l’audition des nommés James Solage, et Joseph Vincent pour qu’ils fournissent beaucoup plus d’informations relatives à l’origine du fond évalué aux quatre-vingt mille dollars américains (80,000.00 USD) qu’ils avaient déclaré (rapport Direction des Affaires Criminelles -BAC) avoir reçu pour soudoyer quatre-vingt (80) agents de I’USGPN, afin de faciliter le libre accès à la barrière principale de la résidence du couple présidentiel et celles du Palais National.’’
Il recommande de contacter l’institution financière UNIBANK, pour se renseigner sur les origines des fonds, en devise américaine, comptabilisant deux cent quarante-quatre mille deux cent soixante-dix-neuf dollars et deux centimes (244, 279, 02 USD) qui ont crédité le compte numéroté 0102 1052 01529055, domicilié à la UNIBANK pour la période allant du 07 janvier 2020 au 13 décembre 2022 ; ainsi que sur l’identité des bénéficiaires ayant reçu de multiples transferts et virements ; Contacter la UNIBANK à propos des millions de gourdes qui ont brièvement crédité, en date du 03 mars 2022, le compte numéroté 102 1051 1529047 et qui en a été débité cinq jours plus tard, soit le 08 mars 2022, à partir d’un chèque de direction ; puisque ce comportement fait allusion à des mouvements financiers susceptibles d’être qualifiés de transactions douteuses ; Contacter la UNIBANK au sujet de l’origine des montants évalués à quarante-quatre mille dollars (44, 000. 00 USD) qui, une fois transférés sur le compte numéroté 102 1051 15 047, sont immédiatement débités (à quatre reprises) pour recevoir automatiquement un autre crédit d’un montant identique ; vu que cela qui fait allusion à des transactions qualifiées de « douteuses ».
Il souhaite l’approfondissement l’enquête autour des nommés Steve Saint Hubert, Fritz Junior GEORGES, Christelle Vaval et Stanley Clervil et Saint Hubert Steve & Izmery Marie Emmanuelle Tara qui sont les bénéficiaires ou signataires de plusieurs comptes suspectés d’être utilisés pour blanchir des avoirs.
L’enquête doit être approfondie également autour des entreprises dénommées Gaspro, Totto DINE & Drink, Beta Consulting SA et Matador dont toutes les tentatives visant à vérifier les adresses fournies par les institutions bancaires ont été vaines, selon le rapport du BAFE, appelant à l’approfondissement de l’enquête sur les quatorze comptes sur lesquels le nommé Steve Saint-Hubert et ses acolytes sont signataires.
Il espère avoir des réponses de I’UCREF pour pouvoir mieux approfondir l’enquête financière, en tirant des conclusions autour des actions posées par les mis en cause (policiers & non policiers) indexés dans l’acte d’assassinant de I ‘Ex-Président de la République Jovenel Moïse.
Le rapport recommande de se renseigner minutieusement sur les entreprises et immeubles, dont les informations fournies par la DGI, enregistrées aux noms des nommés : Jean Laguel Civil, Christian Emmanuel Sanon, Marie Jude Gilbert Dragon, Reynaldo Corvington, Jaar Rodolphe, Joel Joseph John, Joseph Felix Badio, Windelle Coq Thélot, Vitelhomme Innocent, Samir N. Handal, Joseph Gerald Bataille, Gerard FORGES, Sainphor Liné Baltazar, Gordon Phenil Desir, Paulas Eugene et James Solages, afin de pouvoir saisir ou confisquer ceux qui sont susceptibles d’être saisis ou confisqués.
Il recommande de contacter des partenaires étrangers afin de faire le lien avec les institutions financières de leur pays respectif comme moyen pouvant permettre d’élargir le cadre de l’enquête financière autour des étrangers indexés dans l’acte d’assassinat du de l’ex-Président Jovenel Moïse.
Le BAFE fait état d’un ensemble de difficultés auxquelles il a été confronté au cours de l’enquête. Ces difficultés étaient d’ordre sécuritaire, financier, administratif, et problème de carburant entre autres.
Selon le rapport, ‘‘certains mis en cause dans l’affaire, dont Manuel Antonio Grosso Guarin, il a dénoncé les principaux acteurs qui ont concocté ce plan macabre, à savoir les nommés Christian Emmanuel Sanon, Rodolph Jaar alias Dodôf, Joseph Félix Badio, John Joel Joseph, Ashcard Pierre Joseph et Antonio Intriago. Ce dernier étant identifié comme un responsable de projets de la CTU en Ham. De plus, il a pointé du doigt le nommé Rodolph JAAR alias Dodôf, chez qui toutes les mises en place de cette susdite attaque ont été finalisées, sans oublier leur arsenal logistique qui y était stocké chez ce repris de justice’’, souligne le document.
Le rapport affirme que, « quant aux effets volés au domicile des victimes, ces individus mis en cause ont reconnu avoir emporté deux (2) mallettes remplies de billets d’argent, des documents, des passeports, des chéquiers et des fusils d’assaut confisqués des mains des policiers qui étaient de garde cette nuit-là. De son côté, le nommé Alex Miyer Ena a précisé que les mallettes volées se trouvaient respectivement entre ses mains et son acolyte Carlos Yepes Clajo, alors qu’il a affirmé que le serveur des caméras de surveillance a été emporté par son acolyte Angel Mario Yarce Sierra
Selon le rapport, ce dernier a reconnu qu’à l’issue de l’assassinat, il avait récupéré des mains de son acolyte Javier Romero Medina, une mallette ainsi que des serveurs des caméras de surveillance
Toutefois, souligne le rapport, il a essayé de nier son implication présumée dans l’assassinat du Président Jovencl MOÏSE en indexant à son tour ses acolytes Mauricio Javier Romero Medin a et Duberncy Giraldo Capador dit Manuel comme ceux-là qui étaient montés à l’étage, et qui ont investi la chambre de I’ancien Président Jovenel Moïse.
Qui a finance l’assassinat du président Jovenel Moïse ? Quel a été le montant mobilisé pour exécuter ce projet macabre ? L’énigme demeure presqu’entier, deux ans après le meurtre du président, survenu dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021.