NEW-YORK, vendredi 21 juin 2024– Ce vendredi 21 juin 2024, le Conseil de sécurité des Nations Unies a tenu une réunion privée cruciale pour discuter de la situation désastreuse en Haïti. Cette réunion, convoquée à la demande de l’Équateur et des États-Unis, avait pour objectif principal de faire le point sur le déploiement de la mission de soutien à la sécurité multinationale (MSS) que le Conseil a autorisé le Kenya à diriger par la résolution 2699 du 2 octobre 2023.
La mission MSS a été mise en place pour aider Haïti à lutter contre les activités des gangs et à rétablir la sécurité dans le pays.
Cependant, son déploiement initialement prévu pour février 2024 a été retardé pour plusieurs raisons, notamment des défis judiciaires au Kenya, une recrudescence de la violence des gangs en Haïti entraînant une transition politique, et un manque de financement.
Lors de cette réunion, l’ancienne ministre kenyane de la Défense, Monica Juma, actuellement conseillère nationale en sécurité du Kenya, a informé le Conseil de la situation actuelle et des efforts en cours pour coordonner le déploiement de la mission MSS.
Juma a expliqué que, bien que des efforts significatifs aient été faits, des obstacles importants demeurent, notamment des problèmes d’équipement et de logistique, ainsi qu’un financement insuffisant. “La mission est essentielle pour rétablir la sécurité en Haïti, mais nous avons besoin de davantage de soutien international pour surmonter les défis actuels,” a-t-elle déclaré.
La mission MSS doit comprendre jusqu’à 2 500 personnels policiers déployés par phases, avec un coût annuel estimé à environ 600 millions de dollars. À ce jour, huit pays ont officiellement notifié leur intention de contribuer à cette mission, parmi lesquels les Bahamas, le Bangladesh, la Barbade, le Belize, le Bénin, le Tchad, la Jamaïque et le Kenya.
Cependant, des contributions financières adéquates restent un obstacle majeur, malgré des promesses de financement substantiel, notamment de la part des États-Unis qui ont promis 300 millions de dollars. En raison des retards dans la dispersion de ces fonds, le déploiement a été continuellement repoussé.
La situation politique en Haïti est marquée par une transition difficile. Le Conseil présidentiel de transition (CPT), mis en place le 25 avril 2024 suite à un accord facilité par la Communauté des Caraïbes (CARICOM), est chargé de superviser la transition vers des élections et de coordonner avec la communauté internationale pour accélérer le déploiement de la mission MSS.
Le CPT a nommé Garry Conille, un ancien médecin et fonctionnaire des Nations Unies, au poste de Premier ministre intérimaire. Conille a présenté un nouveau cabinet le 12 juin, incluant des personnalités telles que Carlos Hercule, ancien chef du barreau de Port-au-Prince, au poste de ministre de la Justice, et Dominique Dupuy, ancienne ambassadrice d’Haïti à l’UNESCO, comme ministre des Affaires étrangères.
Malgré ces efforts, la violence des gangs continue de semer le chaos en Haïti. Le rapport le plus récent du Secrétaire général de l’ONU sur le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) révèle que 1 660 personnes ont été tuées et 845 blessées par la violence des gangs entre janvier et mars 2024. Cette période est la plus violente depuis la mise en place du mécanisme de surveillance des droits humains de BINUH en 2022.
La violence endémique a des conséquences humanitaires dévastatrices, entraînant une augmentation de 60 % du nombre de personnes déplacées entre mars et juin 2024, atteignant plus de 578 000 personnes. En outre, Haïti est désormais considéré comme une “zone de famine de plus haute préoccupation” par le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), avec 1,6 million de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë.
La violence des gangs ne se limite pas aux pertes humaines. Le rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés a enregistré 383 violations graves contre 307 enfants en Haïti en 2023. Ces violations incluent le recrutement et l’utilisation d’enfants par les gangs, ainsi que des attaques contre les écoles et les hôpitaux. La situation est si grave que la mission MSS est vue comme essentielle non seulement pour rétablir la sécurité, mais aussi pour protéger les droits des enfants et des civils.
La réunion spéciale du Conseil de sécurité de l’ONU visait à réévaluer la situation en Haïti et à déterminer les prochaines étapes pour le déploiement de la mission MSS. La nécessité de stabiliser le pays, de protéger les droits de l’homme et d’assurer une transition politique pacifique reste urgente et cruciale pour l’avenir d’Haïti. Les contributions et la coopération internationales seront déterminantes pour le succès de cette mission et pour le rétablissement de la sécurité et de la stabilité en Haïti. “Nous devons agir rapidement et avec détermination pour aider Haïti à sortir de cette crise,” a conclu Monica Juma.