Selon un article du Miami Herald,
PORT-AU-PRINCE, Haïti- Jeudi, 30 novembre 2023– L’une des figures les plus controversées d’Haïti est de retour dans sa patrie tourmentée après avoir été expulsée jeudi des États-Unis. Guy Philippe, l’ancien commandant de la police haïtienne qui a dirigé une rébellion en 2004 renversant le président Jean-Bertrand Aristide, et qui a ensuite échappé pendant près d’une douzaine d’années aux agents de la Drug Enforcement Administration (DEA) des États-Unis, est arrivé à bord d’un vol de l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) en compagnie d’une douzaine d’autres déportés, rapporte le Miami Herald.
Le vol a décollé d’Alexandria, en Louisiane, à 5h57 et est arrivé en Haïti quelques minutes après 10 heures, précise l’article.
Sa présence a été confirmée par le Bureau de la Migration Nationale, chargé de recevoir les déportés renvoyés en Haïti.
En 2017, Philippe a été condamné à neuf ans de prison par un juge fédéral de Miami après avoir plaidé coupable d’une conspiration de blanchiment d’argent impliquant des allégations selon lesquelles il aurait empoché plus d’un million de dollars de trafiquants de cocaïne colombiens.
Malgré un accord avec les procureurs fédéraux pour éviter de passer le reste de sa vie en prison, il a continué de clamer son innocence et a accusé les autorités américaines de l’avoir “enlevé” d’Haïti, où il se rendait pour prêter serment en tant que sénateur lorsqu’il a été arrêté par la police haïtienne.
En septembre dernier, Philippe a été libéré d’une prison fédérale d’Atlanta et transféré en garde à vue de l’immigration après avoir tenté plusieurs fois de faire réduire sa peine tout en se représentant lui-même avant et pendant l’ère de la pandémie.
Plusieurs responsables haïtiens contactés par le Miami Herald avant l’arrivée du vol ont déclaré n’avoir pas été avertis par le Département de la Sécurité intérieure du retour imminent de Philippe.
Une liste des passagers du vol, envoyée à Port-au-Prince, ne comportait initialement que 17 noms, tous des personnes renvoyées pour avoir enfreint la loi sur l’immigration américaine, selon le Bureau de la Migration Nationale d’Haïti.
La présence de Philippe en Haïti, un pays encore sous le choc de l’assassinat de son président en 2021 et maintenant confronté à l’expansion constante de gangs armés hors de la capitale et dans ses campagnes, suscite des inquiétudes compte tenu du paysage volatile, du vide de leadership en cours et de la popularité et des liens politiques de Philippe.
Lors des élections de 2016, Philippe s’est présenté pour représenter la région rurale de Grand’Anse en tant que sénateur, et a remporté le scrutin.
Son arrestation a eu lieu au début de janvier 2017 alors qu’il visitait une station de radio dans la capitale avant sa prestation de serment. Il a ensuite été remis à la DEA.
Bien que Philippe ait tenté de revendiquer l’immunité contre les poursuites en tant que sénateur élu en Haïti, il a fini par plaider coupable en avril 2017 à l’accusation de conspiration de blanchiment d’argent.
L’accord lui a permis d’éviter un procès pour une accusation de trafic plus grave qui aurait pu le condamner à la prison à vie.
Au lieu de cela, il a fait face à une peine pouvant aller jusqu’à 20 ans pour la condamnation de blanchiment d’argent et a obtenu moins de la moitié de cette peine de la juge de district américaine Cecilia Altonaga.
La condamnation de Philippe a mis fin à une enquête fédérale sur le trafic de drogue, le blanchiment d’argent et la corruption aux plus hauts niveaux du gouvernement haïtien, qui a débuté dans les années 2000 lorsque l’île d’Hispaniola, partagée par Haïti et la République dominicaine voisine, est devenue un hub tristement célèbre pour l’expédition de cocaïne sud-américaine vers les États-Unis.
Pendant des années, Aristide, renversé en 2004 lors d’une révolte armée dirigée par Philippe, avait été enquêté par un grand jury fédéral de Miami pour avoir accepté des pots-de-vin liés à la drogue, bien que des accusations n’aient jamais été portées.