NEW-YORK, mardi 24 janvier 2023– « La violence liée aux gangs a atteint des niveaux jamais vus depuis des décennies. Les meurtres et les kidnappings ont augmenté pour la quatrième année consécutive », a déclaré Helen La Lime devant le conseil de sécurité des Nations-Unies lors de la présentation mardi du dernier rapport du secrétaire général de l’ONU), Antonio Guterres sur Haïti.
« En 2022, 1359 kidnappings ont été enregistrés, plus du double de 2021, une moyenne de 4 par jour. Les meurtres ont également augmenté d’un tiers en un an, avec un total de 2183 », a précisé La Lime.
La violence des gangs « fait partie de stratégies bien définies conçues pour asservir la population et étendre les territoires qu’ils contrôlent », a-t-elle souligné, dénonçant l’utilisation des viols de femmes et d’enfants comme « tactique pour répandre la peur ».
La police haïtienne est équipée de nouveaux véhicules blindés, notamment fournis par le Canada, mais « débordée et en manque cruel de personnel et de ressources », elle « n’a pas été en mesure, à elle seule, d’empêcher la montée alarmante de la violence des bandes organisées », selon le rapport.
Le rapport indique que ‘‘la police nationale d’Haïti (PNH) reste une priorité pour le gouvernement, avec une augmentation de près de 50 % de l’allocation budgétaire pour l’année en cours à 162 millions de dollars. La police utilise les véhicules blindés qu’elle a achetés, et qui continuent d’arriver en Haïti, pour lancer des opérations contre les gangs, dont certaines ont plus de succès que d’autres. Mais l’enjeu reste de maintenir et de consolider les acquis après opérations.’’
Helen La Lime a ajouté que ‘‘le consensus national et les sanctions sont deux développements importants qui peuvent contribuer de manière significative à surmonter la crise et aider à atténuer des souffrances indicibles. Ils offrent une voie claire vers la restauration de la démocratie et de la légitimité. Le troisième élément qui renforcera à la fois la PNH et ces développements est le déploiement d’une force internationale spécialisée, comme demandé par le gouvernement en octobre. Cela doit encore se concrétiser’’, a-t-elle insisté.
Selon elle, « réalité est que sans ce déploiement international, fonctionnant de manière intégrée avec la PNH, les effets très positifs du processus politique et des sanctions jusqu’à présent resteront fragiles et susceptibles d’être inversés. Les Haïtiens souhaitent massivement cette assistance afin de pouvoir vaquer à leurs occupations quotidiennes en paix. La population vit dans la peur et n’est que trop consciente des limites des forces de police ».
Cette demande a déjà été répétée également par l’ambassadeur d’Haïti à l’ONU Antonio Rodrigue pour qui « L’heure est grave, il nous faut beaucoup plus d’action, il n’y a pas de place pour la lassitude », a-t-il déclaré devant le Conseil, notant que « sans sécurité, on ne peut prétendre à des élections honnêtes, transparentes et démocratiques » et au rétablissement du fonctionnement des institutions dans le pays.
Mme La Lime s’est également félicitée de l’accord du 21 décembre 2022, arguant que ce consensus identifie un calendrier pour l’installation d’un gouvernement élu d’ici février 2024 et énumère les mesures immédiates à prendre pour la promotion de réformes fiscales visant à accroître la collecte des recettes de l’État et à rétablir les services publics. Un « Haut Conseil de transition » a maintenant été créé et nommé, qui travaillera avec le gouvernement pour faire des nominations à la Cour de cassation (la plus haute cour du pays), au Conseil électoral provisoire, et nommera un comité chargé de réviser la constitution.
« L’accord n’est en aucun cas conclu, et il reste fondamentalement ouvert. Une série de tables rondes, qui incluront des discussions sur l’établissement d’une feuille de route électorale inclusive et d’un plan de sécurité nationale, offrent des opportunités à ceux qui sont intéressés, mais ne se sont pas encore engagés, à s’engager dans l’effort, a déclaré La Lime.
Selon La Lime, « l’expiration du mandat des 10 derniers sénateurs en fonction le 9 janvier signifie qu’il ne reste plus un seul élu dans le pays. Bien qu’il s’agisse d’un défi profond, ce vide institutionnel offre à Haïti l’occasion de faire le point, d’examiner les causes profondes du dysfonctionnement et de mettre le pays sur la bonne voie pour y remédier ».
La demande d’intervention militaire étrangère en Haïti produite par Ariel Henry le 6 octobre 2022 ne s’est toujours pas concrétisé. A date, de nombreux pays se sont dit prêts a y participer, mais aucun d’entre eux ne veut en assumer le leadership.
Le Canada qui s’est montré plus ou moins enthousiaste à prendre la tête de cette intervention a posé comme condition que tous les partis politiques acceptent le déploiement des troupes étrangères en Haïti.