République dominicaine, vendredi 25 avril 2025 — Dans un communiqué publié ce jeudi, la Red Malunga, réseau pour la justice globale et contre le racisme antinoir, a exprimé son « rejet catégorique » face aux nouvelles politiques migratoires du gouvernement de la République dominicaine ciblant les migrants haïtiens et les Dominicains d’ascendance haïtienne.
Selon l’organisation, les mesures, entrées en vigueur le 21 avril, ont « intensifié les rafles migratoires » et « institutionnalisé la violence » à l’encontre de ces communautés, exposant les personnes concernées à des violations systématiques de leurs droits humains.
« Dans un contexte où le monde réclame une solution réelle et efficace à la crise haïtienne, et alors que les peuples afrodescendants du monde entier ont exigé, lors du Forum permanent de l’ONU à New York, la restitution de la dette historique envers Haïti », rappelle la Red Malunga, « il est inadmissible de rester silencieux face à cette politique de violence raciale. »
Le communiqué souligne que la situation actuelle des Haïtiens et de leur diaspora est « intrinsèquement liée à la vision négative de la révolution haïtienne », laquelle, historiquement, « a défié l’ordre colonial en arrachant liberté et dignité pour les peuples asservis ». Dès lors, argue l’organisation, « il est incohérent de réclamer une réparation historique sans tenir compte des souffrances contemporaines du peuple haïtien, sur son territoire comme dans l’exil. »
La Red Malunga qualifie les expulsions forcées de migrants haïtiens en pleine recrudescence des violences internes dans leur pays de « crime » et de « violation des engagements internationaux » relatifs à la protection des personnes déplacées par les conflits. « La communauté internationale, qui se mobilise promptement pour d’autres crises humanitaires, ne peut faire preuve d’indifférence face à cette situation », dénonce l’organisation.
La Red Malunga fait état d’une liste d’exactions préoccupantes :
1) Détentions et expulsions de femmes enceintes depuis des hôpitaux dominicains ;
2) Arrestations massives et indifférenciées, laissant enfants et personnes âgées livrés à eux-mêmes ;
3) Poursuites policières dangereuses sur la base du profilage racial, ayant parfois entraîné des décès ;
4) Destructions de domiciles à toute heure, et violences exercées par des citoyens et des employeurs.
« Ces pratiques, bien qu’anciennes, se sont intensifiées et banalisées », constate la Red Malunga, évoquant un véritable « apartheid social » auquel est confrontée la population haïtienne en République dominicaine.
L’organisation dénonce également que « des dizaines de femmes enceintes ont été arrêtées par des agents migratoires dans plusieurs hôpitaux », selon des témoignages relayés dans les médias locaux. Par ailleurs, des proches de victimes rapportent que « de jeunes filles noires dominicaines sans papiers sont régulièrement confondues avec des Haïtiennes et arrêtées de manière arbitraire ».
Depuis l’annonce, en octobre 2024, d’un plan prévoyant l’expulsion de 10 000 migrants par semaine, « la violence contre cette population n’a cessé de croître », avertit la Red Malunga.
Le réseau dénonce en particulier l’opération du 22 avril dans le quartier de Mata Mosquito à Friusa, « où, en moins de 24 heures, des centaines de personnes ont été arrêtées et expulsées sans protocole permettant d’individualiser les situations ».
L’organisation rappelle que la République dominicaine est liée par de nombreux instruments juridiques internationaux garantissant « la vie, la dignité et les droits fondamentaux de toutes les personnes présentes sur son territoire, quel que soit leur statut migratoire ». « Si la protection des frontières est un droit souverain », reconnaît la Red Malunga, « elle ne saurait en aucun cas justifier les violences infligées à des femmes enceintes et à des enfants, qui ne représentent aucune menace pour la sécurité nationale ».
La Red Malunga souligne enfin une contradiction flagrante : « Alors que le gouvernement dominicain reconnaît officiellement la gravité de la crise haïtienne et appelle la communauté internationale à l’aide, ses actions à l’intérieur de ses frontières témoignent d’une politique de répression raciste. »
Concluant son appel, la Red Malunga exige « l’arrêt immédiat du profilage racial, de la persécution migratoire systématique et des politiques de ségrégation ». Elle appelle les mouvements afrodescendants et la communauté internationale « à élever la voix contre cette violence institutionnalisée » et à « exiger du gouvernement dominicain le respect de la dignité humaine de tous, sans distinction ».