OUANAMINTHE, le jeudi 11 janvier 2024– Le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Fort-Liberté (Nord-Est) Evens Fils jette un éclairage juridique sur l’affaire Guy Philippe, appelant à la prudence dans l’interprétation de la compétence territoriale du droit pénal. Au cœur de ses remarques se trouvent trois considérations cruciales qui méritent une attention particulière.
- Interprétation Rigoureuse de la Loi Pénale : Le Bâtonnier met en garde contre toute tentative de déformer le sens d’un texte législatif, soulignant la nécessité de respecter l’interprétation stricte de la loi pénale. Il rappelle que la Constitution elle-même doit être interprétée avec rigueur, soulignant que la précision du législateur ne peut être ni ajoutée ni retranchée par interprétation.
- Compétence Territoriale et Effets Extraterritoriaux : Évoquant la compétence territoriale du droit pénal, le Bâtonnier souligne que bien que l’application soit territoriale, les effets ne le sont pas nécessairement. Il illustre ce point en expliquant qu’un Haïtien jugé aux États-Unis pour un crime ne peut être rejugé en Haïti pour le même acte, conformément au principe “non bis in idem”. Il insiste sur le fait que le lieu de l’infraction et du jugement importe peu en considération des personnes.
- Impact des Conventions Internationales : L’évolution du droit international, grâce à des conventions et traités, modifie le paysage juridique interne. Le Bâtonnier cite la Convention des Nations Unies Contre la Criminalité Transnationale Organisée comme exemple. Ces accords internationaux, une fois ratifiés, s’incorporent au droit haïtien, offrant de nouveaux moyens pour aborder les défis mondiaux de la criminalité transnationale.
Le Bâtonnier met en avant des voix d’autorité, telles que Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU, et des experts du droit tels qu’Anne Weyembergh et Gilles de Kerchove, pour étayer la pertinence des conventions internationales. Ces accords, souligne-t-il, remettent en question l’idée de limiter les effets des jugements en matière pénale au territoire où ils ont été rendus.
S’attardant sur la coopération judiciaire internationale, le Bâtonnier note la circulation des décisions judiciaires pénales entre Haïti et les États-Unis. Cette collaboration étroite, également observée en Europe, est fondée sur le principe de la reconnaissance mutuelle des jugements, comme stipulé dans l’article 82 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE).
Le Bâtonnier appelle ses collègues avocats à éviter toute extrapolation concernant la violation présumée de l’article 41 de la Constitution de 1987. Il met en garde contre l’idée que des Haïtiens condamnés aux États-Unis pour l’assassinat du Président Jovenel Moise puissent se porter candidats en Haïti, soulignant que dans les conditions actuelles, M. Guy Philippe ne peut pas concourir aux élections en Haïti.
Evens Fils exhorte à explorer d’autres moyens de participer au bien-être de la nation, soulignant l’importance de l’unité nationale en ces temps critiques. Une nation en besoin de tous ses fils pour naviguer à travers ces défis tumultueux.
Guy Philippe a été arrêté le 5 janvier 2017 à Pétion-Ville et extradé vers les États-Unis, où il a été condamné en juin 2017 pour blanchiment d’argent lié au trafic de drogue.
Le 30 novembre dernier, l’ancien chef putschiste et sénateur élu qui n’a pas eu le temps de siéger au Sénat, condamné pour blanchiment d’argent provenant du trafic de la drogue, Guy Philippe a été déporté par les États-Unis en Haïti, après avoir purgé une peine de prison de six ans. Il était condamné à neuf ans, mais Philippe a bénéficié d’une réduction de peine.
Depuis son retour, il arpente plusieurs régions du pays, accompagnés d’individus lourdement armés, dont certains seraient membres d’un corps dénommé Brigade de Surveillance des Airs Protégés (BSAP), coiffée par l’Agence Nationale des Airs Protégés (ANAP) dirigée par son allié Jeantel Joseph.
Guy Philippe qui a déjà pris les armes contre son pays 20 ans plus tôt dans le cadre du mouvement ‘‘Grenn Nan Bouda’’ (GNB)/couilles dans les fesses) d’une coalition d’opposition qui promouvait à l’époque un nouveau contrat social, appelle à la révolution contre le système en place qui demeure inchangé.