PORT-AU-PRINCE, vendredi 29 décembre 2023– La polémique entourant les auditions de hauts fonctionnaires de l’État par le juge d’instruction dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de l’ancien Chef d’État haïtien, Jovenel Moïse, demeure vive.
Selon Me Osner Févry, ‘‘des déclarations répétées par certains confrères, basées sur une interprétation erronée de la constitution de 1987, ont semé la confusion sur le caractère secret de l’instruction pénale.’’
Selon le Pr. Osner Févry, avocat et expert juridique, l’instruction pénale en Haïti n’est plus secrète depuis l’adoption de la constitution en 1987, bien que son caractère confidentiel persiste. Il souligne l’évolution positive de la procédure, permettant la présence de l’avocat lors des interrogatoires dans la chambre d’instruction, mettant ainsi fin à l’ère où les juges instruisaient seuls, portes closes, dans les années 1980.
La réaction de Me Févry met en lumière la rigidité nécessaire dans l’application du droit pénal, insistant sur l’importance de s’en tenir strictement au texte écrit, à son esprit et à sa lettre. Il rejette toute tentative d’analogie pour modifier la règle de substitution de personnages par procuration indirecte, en particulier dans le contexte actuel entourant l’assassinat de Moïse.
La question soulevée est celle de la substitution du Président de la République, désigné par l’article 400 du Code d’instruction criminelle, par un Conseil de Ministres ou un Conseil de gouvernement. Févry affirme que cette substitution n’est ni légale ni constitutionnelle, soulignant que ‘‘seul le Président en tant que Haute Autorité peut autoriser l’audition d’un haut fonctionnaire.’’
Face à la complexité de la situation, Me Févry propose une solution audacieuse : la tenue d’un “Chita pale” pour décider du retour à la normalité juridique et politique. Il plaide pour l’organisation d’un Congrès Patriotique Haïtien, exempt de restrictions politiques et idéologiques, afin de restaurer l’ordre constitutionnel perdu.
« Nous devons être assez conséquent, intellectuellement, pour admettre que dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, Haïti a connu 4 événements historiques majeurs qui ont modifié l’échiquier juridique et politique de la Nation, un coup d’état international perpétré par les membres des Forces Spéciales des Forces Armées Colombiennes, américaines et des dignitaires haïtiens ; un crime transnational commis sur la personne du Président élu de la République assassiné sur son lit, dans la chambre à coucher de sa résidence privée, par des haïtiens et des étrangers ; une transmission inédite et hors- norme du pouvoir politique échu aux amis et adversaires du président assassiné et la rupture de l’Ordre juridique (constitutionnel et légal) créant un vide juridique, une rupture de la légalité normative dans un régime d’exception et/ou de facto. »
Le Pr. Osner Févry appelle donc à une réflexion sérieuse pour surmonter les défis juridiques et politiques. La question centrale demeure, selon lui, ‘‘comment retourner à l’ordre constitutionnel perdu et rétablir la gouvernance haïtienne dans cette période tumultueuse.’’