Jean‑Bertrand Aristide plaide à nouveau pour la restitution de la rançon de l’indépendance et à la responsabilité des autorités pour combattre l’insécurité en Haïti…

Dr. Jean-Bertrand Aristide, Ex-president d'Haiti , President de l'UNIFA

TABARRE, (Haïti), dimanche 2 mars 2025Lors de la cérémonie de graduation d’une nouvelle promotion à l’Université de la Fondation Aristide, l’ancien président haïtien Jean‑Bertrand Aristide a livré un message empreint de patriotisme et de revendication historique. Insistant sur la nécessité d’une Haïti fondée sur la justice et la dignité, il a une fois de plus mis en avant la question de la restitution de la rançon de l’indépendance imposée par la France en 1825, tout en soulignant l’urgence de l’union nationale face à la spirale de l’insécurité qui gangrène le pays.

Rappelant le poids du passé colonial, Aristide a souligné que le 17 avril 1825, le roi Charles X de France avait exigé d’Haïti le paiement de 150 millions de francs or en échange d’une reconnaissance officielle de son indépendance, acquise au prix du sang des ancêtres. Cette dette, qualifiée par de nombreux historiens de rançon de l’indépendance, a, selon lui, marqué de son empreinte le développement économique et social du pays, l’enfermant dans un cycle d’appauvrissement et de dépendance. Il a tenu à rappeler qu’il avait officiellement formulé la demande de restitution de cette somme le 7 avril 2003, ouvrant ainsi une lutte pour la justice et la réparation qui, selon lui, demeure essentielle.

Pour étayer son propos, Aristide a cité la déclaration de l’ancien président français François Hollande qui, dans son discours du 10 mai 2015 à Pointe‑à‑Pitre, avait évoqué cette indemnité en des termes ambigus : « Certains ont appelé cette exigence la rançon de l’indépendance. Eh bien, quand je viendrai en Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons. » Toutefois, cet engagement est resté sans suite, renforçant l’idée que la reconnaissance officielle de cette injustice historique tarde à se concrétiser.

Toutefois, au-delà de cette bataille pour la restitution, Aristide a également mis en garde contre les défis contemporains qui menacent la nation haïtienne. L’insécurité, en particulier, demeure l’un des fléaux les plus destructeurs. Il a dénoncé la multiplication des routes bloquées, l’abandon de nombreux territoires aux mains de gangs armés et l’escalade de la violence qui plonge la population dans un climat de peur et de désespoir. La corruption endémique et l’inefficacité des institutions, selon lui, laissent les citoyens livrés à eux-mêmes, tandis que l’exil forcé de milliers de familles témoigne de l’ampleur de la crise.

Face à cette situation alarmante, Aristide a lancé un appel à la solidarité nationale et internationale. Il a exhorté tous les Haïtiens, qu’ils soient sur le territoire ou dans la diaspora, à s’unir pour restaurer l’ordre et reconstruire un État fondé sur la justice et l’équité. Insistant sur l’importance d’une collaboration étroite entre la police, la justice et la société civile, il a affirmé que seule une action concertée permettra de briser le cycle de violence qui divise le pays.

Dans son discours, il a également établi un lien entre l’héritage historique d’Haïti et les défis contemporains. Selon lui, si la révolution de 1804 a brisé les chaînes de l’esclavage, les entraves économiques et politiques imposées au fil des décennies ont freiné l’épanouissement du pays. Pourtant, il estime que la force d’un peuple réside dans sa mémoire et ses combats passés. Ainsi, il a exhorté les jeunes diplômés à puiser dans cet héritage pour bâtir un avenir meilleur, en s’appuyant sur la science, la conscience et la persévérance.

Pour Aristide, la reconstruction du pays passe avant tout par la justice et la connaissance. Il a insisté sur la nécessité de refonder l’État à travers des réformes profondes, plaçant la justice sociale et la sécurité nationale au cœur des priorités. Selon lui, ce n’est qu’en transformant la douleur d’aujourd’hui en une promesse d’avenir que la nation pourra retrouver sa souveraineté et sa prospérité.