QUARTIER-MORIN (Nord), lundi 9 décembre 2024– Lors d’une entrevue accordée à RHINEWS, Hugues Célestin, ancien député de Quartier-Morin, a abordé plusieurs questions liées à sa relation avec “Inisyativ Parryòt Maryen” (IPAM), à la gestion actuelle du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) et aux crises multiples qui secouent le pays. Il a confirmé qu’il n’était plus membre de l’IPAM ni de sa direction, une décision qu’il a justifiée par des divergences idéologiques et politiques. M. Célestin a fait état de deux correspondances envoyées récemment pour dénoncer des prises de position et des pratiques internes, notamment celles du conseiller-président, Fritz A. Jean.
Selon lui, ce dernier tente de redorer son image en utilisant des termes progressistes comme « économie de violence » tout en détournant des fonds publics, notamment des budgets de renseignements alloués à la Présidence. Ces critiques illustrent un profond désaccord avec la trajectoire actuelle de l’IPAM, que M. Célestin accuse de devenir un « syndicat de style Conseil National d’Action Jeanclaudiste (CONAJEC) ».
Sur le soutien supposé de l’IPAM à Fritz A. Jean en tant que représentant au CPT, M. Célestin a préféré laisser parler les documents officiels, renvoyant à une récente note de l’institution pour permettre aux observateurs de tirer leurs propres conclusions. Cependant, son ton critique et ses accusations contre Fritz A. Jean laissent peu de doute sur la profondeur des tensions entre les deux parties.
Abordant la gestion actuelle du CPT, M. Célestin a été particulièrement virulent. Pour lui, les crises sécuritaires et humanitaires ne sont pas des événements fortuits, mais des constructions orchestrées par le CORE GROUP agissant au nom des intérêts internationaux et américains, avec la complicité de certains dirigeants haïtiens et d’ONG. Il a expliqué que les gangs armés, souvent perçus comme des acteurs criminels isolés, servent en réalité de leviers pour des pratiques illicites comme le trafic de drogue, tout en maintenant une instabilité qui favorise des agendas étrangers.
Ces crises, a-t-il souligné, ont causé des milliers de morts, des déplacements massifs, et un chaos planifié. Selon lui, les dirigeants actuels utilisent des termes comme « révision constitutionnelle » et « prochaines élections » comme des slogans pour maintenir leur emprise sur le pouvoir tout en attirant des financements internationaux qu’ils détournent.
Hugues Célestin a proposé un ensemble de solutions concrètes, articulées autour de six axes principaux pour surmonter la crise actuelle en Haïti. Ces propositions visent non seulement à restaurer l’autorité de l’État, mais aussi à promouvoir la justice sociale et le développement durable dans le pays.
Le premier axe proposé par Célestin concerne le démantèlement des réseaux criminels. Il plaide pour des enquêtes approfondies permettant d’exposer les liens entre les gangs et les élites locales, afin de mettre fin aux structures qui soutiennent et financent la violence. Selon lui, il est impératif d’éliminer l’impunité qui règne et de renforcer la capacité des institutions judiciaires à traiter les affaires de criminalité organisée de manière efficace. Cette mesure vise à rétablir la sécurité et à réhabiliter la confiance des citoyens dans les institutions de l’État.
Le deuxième axe met l’accent sur la réinsertion sociale des enfants impliqués dans des activités criminelles. Célestin souligne l’importance de réintégrer ces jeunes en leur offrant des programmes éducatifs et de formation professionnelle. Selon lui, ces initiatives permettront non seulement de réduire la criminalité, mais aussi de créer un avenir plus prometteur pour les générations futures. La réinsertion est envisagée comme un investissement à long terme pour la stabilité et le progrès du pays.
Le troisième axe concerne la désoccupation immédiate du territoire par les forces étrangères. Célestin considère que la présence de forces étrangères sur le sol haïtien est un obstacle majeur à la souveraineté nationale. Il plaide pour un retrait rapide de ces forces afin de permettre aux Haïtiens de reprendre le contrôle de leur pays et de restaurer leur indépendance. Cette mesure vise à renforcer l’autodétermination et à garantir que les décisions politiques et sécuritaires soient prises par et pour les Haïtiens.
Le quatrième axe proposé par Célestin est le renforcement de la souveraineté nationale et de l’État de droit. Il insiste sur la nécessité de redonner aux institutions nationales la capacité de fonctionner de manière autonome, sans ingérence extérieure. Pour lui, cela implique la mise en place d’un système judiciaire impartial et la garantie de l’indépendance des autorités locales. Cette mesure vise à assurer la stabilité politique et à renforcer la légitimité des gouvernants auprès de la population.
Le cinquième axe aborde la mobilisation de la jeunesse haïtienne. Célestin souligne l’importance de l’engagement de la jeunesse dans la reconstruction du pays. Il propose des programmes de mobilisation visant à sensibiliser et à impliquer activement les jeunes dans des initiatives politiques, économiques et sociales. La participation des jeunes est perçue comme un vecteur de changement et de dynamisme qui pourrait insuffler un nouvel élan dans la société haïtienne.
Enfin, le sixième axe concerne les réformes des institutions haïtiennes. Célestin plaide pour une refonte des structures étatiques, incluant la restructuration de la police, de l’armée et du système judiciaire. Il propose de créer un service militaire élargi afin de renforcer la sécurité et de promouvoir l’unité nationale, tout en mobilisant les ressources humaines pour le développement du pays. Cette refonte est envisagée comme une étape nécessaire pour renforcer la capacité de l’État à répondre aux défis de la société et à promouvoir un climat de sécurité et de paix.
M. Célestin insiste sur la nécessité de créer des opportunités économiques et sociales grâce à des investissements dans l’éducation, la formation professionnelle, et des projets de réhabilitation des infrastructures. Il appelle à un rôle accru de l’Université d’État d’Haïti (UEH) pour orienter ces réformes, et au développement de partenariats public-privé dans des secteurs stratégiques comme l’agriculture.
Concernant les gangs armés, il reste sceptique quant à l’efficacité d’une désignation officielle de terroristes ou d’ennemis de la patrie, estimant que seules des actions concrètes, et non des décrets, peuvent résoudre ce problème. Il rappelle que les gangs bénéficient souvent de protections offertes par des élites corrompues.
Interrogé sur la transition en cours, il a qualifié celle-ci d’échec total. Pour lui, le CPT, qu’il décrit comme une émanation du CORE GROUP et de la CARICOM, ne fait qu’exacerber les crises en cours. Il n’hésite pas à affirmer que les membres du CPT, notamment ceux impliqués dans le scandale des 100 millions de gourdes de la BNC, devraient être chassés avec la même rigueur que les gangs.