Haïti : Pierre Espérance s’oppose à toute légitimation de la BSAP, “force paramilitaire illégale” et bras armé d’un coup d’État en préparation…

Des Agents de la BSAP

PORT-AU-PRINCE, dimanche 6 avril 2025,(RHINEWS)– Dans une déclaration accordée à Magik 9, Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), tire la sonnette d’alarme sur les dérives et la dangerosité de la Brigade de Sécurité des Aires Protégées (BSAP), une entité qu’il décrit comme une force armée parallèle opérant en marge de l’État haïtien.

Selon lui, la BSAP a été mise sur pied au sein du ministère de l’Environnement sous l’administration de Jovenel Moïse, à l’initiative de Jean-Tel et Jean-Théodore Joseph. « Pour intégrer la BSAP, il faut un code d’accès et une arme. Il n’existe aucun document officiel du ministère de l’Environnement qui définisse la structure, les fonctions ou les limites juridiques de la BSAP », déclare Pierre Espérance.

Il accuse ouvertement cette structure de servir de milice politique, destinée à réprimer les mouvements citoyens dénonçant la corruption, notamment dans le cadre du scandale PetroCaribe. Selon lui, la BSAP a été conçue non pour la protection de l’environnement, mais pour empêcher toute mobilisation populaire. « Pour rejoindre la BSAP, il faut une arme et il faut payer. C’est la réalité sur le terrain », affirme-t-il.

Lors de la prise de fonction de Fritz Jean le 7 mars 2025, le nouveau Premier ministre a salué publiquement la BSAP, une déclaration qui a suscité l’indignation immédiate du RNDDH. Moins d’un mois plus tard, le 3 avril, le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) a adopté une résolution que Pierre Espérance considère comme une tentative de légalisation d’un coup d’État en préparation. « Plutôt que de démanteler cette milice illégale, le CPT a choisi de la légitimer. C’est une stratégie claire de coup d’État », déclare-t-il.

Espérance affirme que la BSAP est aujourd’hui sous le contrôle de Jean-Pierre Joseph, allié notoire de l’ex-chef rebelle Guy Philippe, lui-même condamné par la justice américaine. « La BSAP est un partenaire de ‘Viv Ansanm’. Jean-Pierre Joseph la contrôle et il est allié à Guy Philippe », précise-t-il. Même s’il reconnaît que tous les membres ne sont pas des criminels, il estime que cette entité agit en dehors de toute légalité. « L’État ne peut pas intégrer une entité criminelle et désorganisée composée de kidnappeurs et de voleurs. C’est inacceptable de vouloir leur donner un statut légal. »

Il pointe également la responsabilité de l’homme d’affaires Dimitri Vorbe dans la coordination d’un coup d’État avec les chefs de ‘Viv Ansanm’ et Guy Philippe. « Le nom de Vorbe est mentionné dans presque toutes les discussions stratégiques des chefs de Viv Ansanm. Même lorsqu’il n’est pas présent, son nom revient constamment. C’est l’un des organisateurs du coup », déclare-t-il. Le premier objectif de ce projet serait, selon lui, la prise du Palais national.

Pierre Espérance accuse en outre certains membres du CPT de complicité ou d’inaction face à ce projet. Il cite nommément Vertylé, Gérald Gilles et Smith Augustin comme informés des activités de la BSAP et des fuites d’informations sensibles vers le groupe Viv Ansanm. Il leur reproche une passivité coupable face à la dégradation de la situation. « Le CPT se montre confortable face à l’aggravation de la situation sécuritaire. Il ne manifeste aucune volonté de résoudre la crise », affirme-t-il.

Dans le même temps, plusieurs services de l’administration publique ont été délocalisés, notamment à Bois Verna et Champ-de-Mars, en raison de la montée de l’insécurité. Pour Espérance, cela montre l’effondrement de l’autorité publique. « Au lieu de renforcer les forces de sécurité légitimes, le gouvernement soutient des groupes armés comme la BSAP, qui sont utilisés pour préparer un coup d’État », dénonce-t-il.

Pierre Espérance avertit que la BSAP représente une menace directe pour la démocratie haïtienne, au service de réseaux criminels et politiques, et non de l’intérêt public. « Au lieu de renforcer la sécurité de l’État, le gouvernement donne du pouvoir à ceux qui veulent prendre le contrôle du pays par la force. Ce n’est pas seulement irresponsable : c’est une trahison », conclut-il.