NEW-YORK, vendredi 22 septembre 2023- A la tribune des Nations Unies, le Premier ministre d’Haïti, Ariel Henry, a réclamé vendredi le déploiement d’une Mission multinationale spécialisée, en appui à la Police nationale haïtienne, afin de combattre les gangs et rétablir la sécurité.
« Au nom des femmes et des filles violées chaque jour, des milliers de familles chassées de leurs maisons, des enfants et des jeunes d’Haïti, à qui ont refusé le droit à l’éducation et à l’instruction, au nom de tout un peuple victime de la barbarie des gangs, j’exhorte la communauté internationale à agir vite », a-t-il déclaré lors du débat général de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Le Premier ministre a souligné « la dégradation outrancière de la situation sécuritaire, où la population subit quotidiennement les attaques violentes des gangs armés dans la capitale comme dans les villes de province ».
« Les criminels qui contrôlent la quasi-totalité de la capitale, les banlieues de Port-au-Prince et certaines villes de province, sèment la terreur. Ils assassinent, incendient, pillent, volent, violent avec une rare cruauté », a-t-il rappelé, ajoutant que la détérioration de la situation sécuritaire, ces dernières semaines, a engendré une nouvelle crise humanitaire avec des déplacés qui occupent de façon spontanée plusieurs sites pour s’échapper à la violence des gangs.
Face à ce péril, M. Henry a expliqué aux autres Etats membres qu’il a mobilisé « toutes les ressources disponibles pour affronter les gangs », le retour à la sécurité étant « indispensable au rétablissement des institutions démocratiques » et pour adresser « en profondeur les questions économiques et sociales ».
Le Premier ministre haïtien a rappelé que le gouvernement a sollicité dans une lettre du 7 octobre 2022 transmise au Secrétaire général de l’ONU un « appui robuste, afin de renforcer les efforts de la Police nationale », une demande renouvelée en juin 2023.
Selon lui, il est « urgent » que le Conseil de sécurité des Nations Unies « autorise le déploiement d’une Mission multinationale spécialisée, à composante police et militaire, en appui à la Police nationale d’Haïti, afin de combattre les gangs et rétablir la sécurité ».
Il a salué en particulier le Kenya, « qui accueille positivement l’idée d’assumer le leadership de la Mission multinationale de soutien à la sécurité en Haïti et qui a effectué une mission d’évaluation dans le pays au mois d’août dernier ».
« L’emploi de la force, comme première étape, demeure indispensable pour vaincre les gangs, rétablir l’ordre et créer un environnement propice au bon fonctionnement de l’Etat », a ajouté le Premier ministre haïtien, estimant toutefois que cela n’est suffisant et que le développement socio-économique durable doit être pris en compte « pour s’attaquer durablement à l’extrême pauvreté ».
Il a aussi souhaité alerter la communauté internationale « sur une situation inquiétante qui s’est développée, ces dernières semaines à la frontière haitiano-dominicaine, créant un conflit dangereux et inutile entre Haïti et la République dominicaine ».
Selon lui, la « Rivière Massacre » est un cours d’eau « binational » dont l’exploitation est régie par le Traité de 1929 et l’Accord du 21 mai 2021. « Le gouvernement dominicain a contesté de façon inamicale et agressive le droit d’Haïti d’exploiter la rivière, sur son propre territoire », a-t-il estimé, dénonçant la fermeture des frontières terrestre, maritime et aérienne avec Haïti par les autorités dominicaines.
« Le gouvernement haïtien condamne de tels agissements qu’il considère comme un acte inamical et qui en plus mettent en danger la vie de ses ressortissants en République voisine », a-t-il ajouté, réclamant le respect de l’intégrité du territoire haïtien. Il a précisé que son gouvernement privilégiait la voie du dialogue et de la négociation dans cette affaire.
Vendredi, dans une correspondance au secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, ils déclarent : « Toute intervention militaire soutenant le régime corrompu, répressif et non élu d’Haïti aggravera probablement la crise politique actuelle jusqu’à la rendre catastrophique. Cela renforcera davantage le régime, aggravant la crise politique en Haïti tout en générant d’importantes pertes civiles et une pression migratoire. »
Selon ces élus, ‘‘si les États-Unis souhaitent véritablement stabiliser la situation politique afin d’éviter une crise humanitaire catastrophique en Haïti, ils commenceront par cesser de soutenir le gouvernement corrompu et permettra l’émergence d’un gouvernement de transition de consensus ayant la légitimité de décider de la manière dont la communauté internationale peut contribuer’’, ajoutent-ils.
Ils se sont dit opposés a tout déploiement de forces étrangères en Haïti et à tout soutien au gouvernement d’Ariel Henry qu’ils accusent d’entraver les discussions pour faciliter une sortie de crise.
« Les Etats Unis doivent immédiatement cesser de soutenir le régime inconstitutionnel de facto pour stabiliser la crise politique actuelle en Haïti et encourager la construction d’un gouvernement de consensus pour amener Haïti vers un processus démocratique», ont-ils déclaré.