PORT-AU-PRINCE, jeudi 27 mars 2025- La contrebande massive d’armes illégales en Haïti continue de nourrir l’escalade de la violence des gangs et d’entraîner de graves violations des droits humains, selon un rapport des Nations Unies publié ce jeudi.
D’après ce rapport, plus de 4 200 personnes ont été tuées entre juillet et février, et 1 356 autres blessées. Ces chiffres alarmants ont été révélés à la suite de la visite récente de William O’Neill, expert en droits humains de l’ONU pour Haïti.
Si les gangs, notamment ceux regroupés sous la bannière “Viv Ansanm”, sont responsables d’une grande partie des violences, le document souligne aussi une montée des exécutions sommaires par des groupes d’autodéfense et des foules en colère. En novembre dernier, au moins 77 présumés membres de gangs ont été tués par des civils après avoir tenté d’attaquer une communauté à Port-au-Prince.
Le rapport met également en évidence le nombre élevé de victimes causées par les forces de l’ordre dans leur lutte contre les gangs. Plus de 2 000 personnes ont été tuées lors d’opérations policières entre juillet et février, soit une augmentation de 60 % par rapport aux 1 253 décès recensés entre février et juillet 2024.
Si 73 % des victimes étaient des membres présumés de gangs, 27 % étaient des civils sans lien avec ces groupes, souvent abattus par des balles perdues alors qu’ils se trouvaient dans la rue ou à leur domicile. Le rapport cite plusieurs cas où la police a ouvert le feu depuis des véhicules blindés dans des zones où des personnes circulaient ou vendaient des marchandises.
Par ailleurs, des témoignages crédibles font état d’exécutions sommaires perpétrées par la police contre des membres présumés de gangs, leurs familles ou des personnes incapables de prouver leur identité au moment de leur arrestation.
Le rapport révèle qu’environ 1 000 armes à feu appartenant à la Police nationale d’Haïti (PNH) ont été détournées au cours des quatre dernières années. Des sources fiables indiquent que certains policiers vendraient ces armes sur le marché noir.
Outre les gangs, des entreprises de sécurité privées se retrouveraient également impliquées dans le trafic d’armes illégales. Actuellement, entre 270 000 et 500 000 armes illégales circuleraient en Haïti, alimentant un cycle infernal de violence.
Cependant, les efforts pour intercepter ces armes restent limités en raison d’un grave sous-financement et d’un manque de personnel au sein des services des douanes et des forces de l’ordre. La corruption et l’absence de contrôle aggravent la situation.
Le rapport souligne enfin les difficultés rencontrées par la mission internationale dirigée par le Kenya, censée aider Haïti à rétablir l’ordre. Alors qu’elle devait compter 2 500 agents, elle n’en a déployé qu’environ 40 %.
Les risques sont élevés : en février, un officier kényan, Samuel Tompoi Kaetuai, a été tuédans la région de l’Artibonite. Un autre, Benedict Kabiru, est présumé mort après avoir disparu lors d’une attaque de gangs lundi dernier, alors qu’il tentait de secourir des policiers haïtiens pris au piège dans un fossé creusé, selon les autorités, délibérément par des hommes armés.
Face à cette situation critique, l’ONU exhorte la communauté internationale à renforcer son soutien pour éviter que la violence ne plonge Haïti dans un chaos encore plus profond.