“Haïti face à une crise politico-criminelle” : une analyse de Global Initiative…

Jimmy Cherizier alias Barbecue, chef de'' G-9 an Fanmi e Alye'' et porte-parole de la federation des gangs ''Viv Ansanm''...

PORT-AU-PRINCE, samedi 18 janvier 2025- Selon l’analyse de Global Initiative, Haïti est plongée dans une crise politico-criminelle sans précédent, où la violence des gangs a atteint des sommets alarmants en 2024. Les données révèlent que 85 % de Port-au-Prince sont sous le contrôle de groupes criminels, tandis que leur influence s’étend désormais aux provinces. « Plus d’un million de personnes ont été déplacées au cours de l’année, et au moins 5 601 meurtres ont été enregistrés, soit une augmentation de plus de 1 000 victimes par rapport à 2023 », indique le rapport. Ce bilan reflète un taux d’homicide national record de près de 48 pour 100 000 habitants, marquant une tragédie historique.

L’analyse met en lumière des changements significatifs dans la stratégie des gangs, notamment la création d’une coalition appelée Viv Ansanm (Vivre Ensemble), qui a permis de consolider leur emprise. « À travers cette alliance, les gangs ont renforcé leur gouvernance criminelle en imposant des extorsions et en établissant des règles de plus en plus strictes pour contrôler la vie quotidienne des Haïtiens », explique Global Initiative. Cette capacité d’intimidation s’accompagne d’une intrusion directe dans les débats publics, où les chefs de gangs influencent la transition politique du pays et exercent une pression constante sur les autorités haïtiennes et la communauté internationale.

Malgré les efforts de la Police nationale haïtienne (PNH) et de la mission multinationale dirigée par le Kenya, les forces de sécurité restent « tactiquement et opérationnellement dépassées » par des adversaires qui ne cessent d’étendre leur contrôle territorial et d’accroître leur arsenal. En conséquence, la population haïtienne est confrontée à des violations des droits humains d’une ampleur sans précédent.

Face à cette crise, Global Initiative appelle à un changement de paradigme dans la réponse nationale et internationale, insistant sur la nécessité de comprendre et de s’attaquer à l’écosystème du crime organisé en Haïti. « Pour avoir un impact significatif, il est impératif de mobiliser tous les outils disponibles, y compris des mesures de sécurité publique, de justice, d’aide au développement et de coopération humanitaire », souligne le rapport.

Parmi les solutions proposées, l’organisation recommande un investissement accru dans l’analyse stratégique de l’économie politique de la violence en Haïti. Elle insiste également sur le renforcement de la PNH et de la mission multinationale à travers un apport en financement, en personnel et en coordination. En parallèle, Global Initiative appelle à un soutien substantiel au système judiciaire afin de cibler les acteurs clés des activités illicites.

Sur le plan politique, le rapport préconise une relance de la transition haïtienne, en mettant l’accent sur la transparence et la responsabilité. Il insiste également sur la mise en place d’un régime de sanctions cohérent et d’un embargo sur les armes visant les financiers et les facilitateurs des gangs, tant en Haïti qu’à l’étranger. « La mise en œuvre rigoureuse de ces sanctions est essentielle, tant à l’échelle nationale qu’internationale », ajoute-t-il.

Enfin, l’analyse met en garde contre les attentes irréalistes liées à une éventuelle mission de maintien de la paix. « Une opération de ce type, si elle est déployée, ne saurait être une solution miracle. Elle devrait s’accompagner d’une stratégie de transition spécifiquement adaptée au mandat de lutte contre le crime organisé », précise Global Initiative. Une attention particulière doit être accordée au désarmement, à la démobilisation et à la réduction des violences communautaires, afin de construire une base solide pour la stabilité à long terme.

« La voie vers la paix en Haïti exige une action concertée et coordonnée pour démanteler les structures qui perpétuent la crise », conclut le rapport. En s’attaquant aux racines de l’impunité et en reconstruisant la gouvernance, Haïti pourrait enfin envisager un avenir où la stabilité et l’autodétermination deviendraient une réalité tangible.

Le texte original a été publié initialement en Anglais sur: https://globalinitiative.net/analysis/haiti-political-and-criminal-impasse/