PORT-AU-PRINCE, mercredi 1er janvier 2025– En ce 1ᵉʳ janvier 2025, alors qu’Haïti célèbre le 221ᵉ anniversaire de son indépendance, le président du Conseil présidentiel de transition (CPT), Leslie Voltaire, a tenu un discours mêlant mémoire historique, appel à la justice et détermination face aux défis actuels. Ce moment solennel a été l’occasion de rappeler deux siècles d’une injustice qui continue de peser sur la nation tout en réaffirmant les priorités de la transition en cours.
« 1825-2025 : 200 ans depuis que la France a extorqué à Haïti une rançon pour son indépendance. Cette injustice historique a freiné notre développement et reste une blessure vive. Aujourd’hui, Haïti réclame justice : restitution de cette rançon et réparation des torts causés par l’esclavage, crime contre l’humanité », a déclaré Voltaire.
Ce rappel fait écho à la rançon imposée par la France en 1825, sous menace militaire, en échange de la reconnaissance de l’indépendance d’Haïti. Cette dette, équivalant à 150 millions de francs or (réduite plus tard à 90 millions), a contraint la jeune nation à s’endetter lourdement, entraînant une stagnation économique et sociale dont les effets sont encore perceptibles aujourd’hui. Selon des études récentes, les pertes économiques liées à cette rançon pourraient être évaluées entre 21 et 115 milliards de dollars.
Mais Voltaire n’a pas limité son discours au passé. Il a aussi insisté sur la crise actuelle, marquée par une insécurité généralisée alimentée par des gangs armés. « Le bilan tragique de l’année 2024 pèse lourd sur notre nation : plus de 5 000 de nos frères et sœurs ont été brutalement assassinés par des bandits sans foi ni loi. Cette réalité nous rappelle que nous sommes en guerre. Une guerre implacable que nous poursuivrons en 2025 contre ces gangs qui sèment la mort, la terreur, le viol, le pillage et le trafic ignoble d’organes, victimisant une population paisible. »
La lutte contre ces groupes armés a été décrite comme une priorité absolue pour le gouvernement de transition. « Notre guerre contre les gangs armés a un seul objectif : ramener la paix pour organiser des élections démocratiques et choisir des dirigeants légitimes. Ces élections auront lieu, coûte que coûte, d’ici la fin de l’année. Le temps de la patience est révolu », a affirmé Voltaire, en insistant sur l’engagement total du Conseil présidentiel et du gouvernement dans cette mission cruciale.
Il a également souligné l’importance de la responsabilité collective dans cette période de transition : « En 2025, demandez-vous ce que vous pouvez faire pour Haïti. »
Le contrôle croissant exercé par les gangs armés sur la capitale et d’autres régions du pays a conduit à une insécurité généralisée qui affecte tous les aspects de la vie nationale. Les violences, les enlèvements et les exactions, y compris des crimes aussi graves que le trafic d’organes, ont exacerbé une crise humanitaire déjà critique. Plus de 200 000 personnes ont été déplacées par ces violences, tandis que les activités économiques et sociales sont gravement perturbées.
Les gangs armés ne se contentent pas de semer la terreur : ils paralysent également l’économie. L’insécurité dissuade les investisseurs, pousse les entreprises à fermer leurs portes, et contribue à une inflation galopante qui plonge des millions d’Haïtiens dans une pauvreté encore plus grande.
Selon un rapport des Nations Unies publié en 2024, près de la moitié des enfants haïtiens vivent dans des zones contrôlées par ces groupes, les exposant à des violences extrêmes ou à des recrutements forcés.
En réclamant justice pour la rançon de l’indépendance et les crimes liés à l’esclavage, le président du CPT a aussi rappelé l’urgence d’une solidarité internationale pour réparer les torts historiques. Ce plaidoyer s’inscrit dans une perspective plus large : reconstruire une nation qui a été systématiquement affaiblie par des siècles de colonisation, de racisme économique et d’instabilité politique.
Pour Voltaire, la transition actuelle n’est pas seulement une réponse aux urgences sécuritaires, mais aussi une opportunité pour rebâtir les fondements démocratiques d’Haïti : « La victoire est notre seul objectif. Ramener la sécurité et garantir des élections libres et transparentes est la condition nécessaire pour que chaque Haïtien retrouve sa dignité et son espoir. »
En ce jour d’anniversaire, les Haïtiens sont appelés à se souvenir des sacrifices de leurs ancêtres tout en se mobilisant pour relever les défis contemporains. Le chemin reste ardu, mais l’esprit de 1804 demeure une source d’inspiration pour continuer à lutter contre l’injustice et la violence.