Haïti/Diplomatie: “Le consul général d’Haïti à Miami est-il en rébellion contre ses supérieurs hiérarchiques?”…

Stephane Gilles, ex-Consul General interimaire d'Haiti...

MIAMI (FL), jeudi 27 juillet 2023- Il y a plus d’un mois depuis que Stéphane Gilles, désormais ex-consul général d’Haïti, a été relevé de ses fonctions.

Cependant, Gilles, keyboardiste de “Sweet Micky”, le groupe musical de l’ancien président Joseph Michel Martelly, refuse toujours de céder la place à son remplaçant.

Nommé nouveau consul général d’Haïti à Miami par décret du gouvernement de fait en date 17 juin dernier 2023, Mario Chouloute a fait plusieurs tentatives pour prendre ses fonctions, mais en vain.

Selon une source proche du ministère des affaires étrangères ayant requis l’anonymat, son prédécesseur, Stéphane Gilles n’aurait pas collaboré pour faciliter l’entrée en fonction de Chouloute.

“Gilles n’a pris aucune disposition pour faire la passation et la transmission des dossiers au nouveau consul général qui attend sa prise de fonction de puis plus d’un mois”, déclare la source. Elle ajoute que Gilles est furieux d’avoir été relevé de ses fonctions à Miami.

Selon la source, le musicien fait diplomate aurait affirmé dans son cercle rapproché, qu’il aurait sacrifié sa carte de résidence aux États-Unis pour son poste au consulat d’Haïti à Miami.

Pour calmer l’ardeur de Gilles, ses supérieurs lui ont proposé un transfert au même titre au consulat général d’Haïti à Curaçao, mais il a refusé. La source ajoute qu’Il a également rejeté une proposition de nomination au poste de ministre-conseiller à l’ambassade d’Haïti au Mexique.

“Gilles qui jouit du soutien de Martelly, aurait proposé qu’on le nomme ambassadeur d’Haïti à Washington, condition sine qua non pour quitter le consulat de Miami”, affirme la source.

Selon la source, Gilles a renforcé la sécurité au niveau du consulat où il se barricade pour empêcher son remplaçant d’entrer en fonction.

“Depuis quand les consuls étaient inamovibles, se demande la source qui qualifie l’attitude de Gilles de “rébellion contre ses supérieurs hiérarchiques.”

Malgré un personnel pléthorique, le consulat général d’Haiti fonctionne au ralenti et ne parvient pas à offrir des services consulaires de qualité aux contribuables haïtiens expatriés.

Depuis un certain temps, il faut attendre jusqu’à six mois, au moins, pour qu’une demande de passeport produite au Consulat d’Haïti à Miami soit satisfaite.

Selon une source consulaire, ‘‘il est possible que le document soit prêt dans un temps relativement plus court, mais dès réception de la demande, on vous dit clairement qu’il prendra en moyenne cinq ou six mois pour recevoir le document de voyage.’’

Depuis quelques temps, il est préférable que les haïtiens expatriés vivant dans le sud de la Floride se rendent à Washington pour produire directement leurs demandes de passeports auprès de l’Ambassade d’Haïti, pour un service rapide. Cependant, les passeports étaient délivrés deux fois par semaines au niveau du consulat d’Haïti à Miami.

Les frais collectés et les demandes de passeports étaient envoyés chaque jour en fin de journée, à Washington, par Fédéral Express  ( FedEx), pour les suites nécessaires.

“Le temps normal de livraison des passeports passe de deux fois par semaine à six mois. Ce qui complique énormément la vie des Haïtiens de l’étranger qui souhaitent voyager”, déplore la source, témoin du désordre qui caractérise le fonctionnement du consulat.

En cause, les retards de paiement accumulés par le consulat au trésor public, selon la source. Elle ajoute que le consulat a été contraint d’effectuer des paiements sur les frais collectés pendant un certain, qui n’ont pas été acheminé à l’Ambassade d’Haïti à Washington pour les transmettre à la direction générale des impôts (DGI).

En février 2022, un rapport d’enquête conduite par l’ex-sénateur Youri Latortue, a révélé qu’au cours des six (6) dernières années, l’Etat haïtien a accusé une perte de plus sept milliards-cent-dix-huit millions de gourdes, soit plus de soixante-sept millions de dollars américains au niveau de sa diplomatie.

‘‘Ces fonds qui auraient été volatilisés et pour lesquels personne n’a fourni aucune explication, proviennent exclusivement des frais de passeport émis par l’Etat haïtien et fabriqués sous le contrôle de l’Ambassade d’Haïti à Washington’’, selon le rapport d’enquête de M. Latortue.

Le rapport a souligné que tous les passeports des haïtiens vivant à l’étranger sont imprimés à Washington et les frais de service collectés par les différents consulats sont envoyés à l’Ambassade d’Haïti à Washington afin de les transférer au trésor public via la direction générale des impôts (DGI) pour alimenter le budget national.

‘‘En principe, le service des passeports devrait rapporter, chaque année, entre 1.4 et 1.5 milliards de gourdes à l’Etat haïtien, compte tenu du prix et du nombre de passeports émis, selon le rapport.

Cependant, c’est seulement en 2021 que le trésor public a encaissé un montant raisonnable, soit un milliard deux-cent cinquante-deux millions de gourdes (9,430,000 US, au taux du jour actuel/ février 2022).’’

‘‘En revanche, a précisé le rapport Latortue, en 2016, aucun chèque provenant de l’Ambassade d’Haïti à Washington n’a été transféré à la DGI.’’

‘‘En 2017, l’Ambassade a transféré 234 millions de gourdes à la DGI. En 2018, elle a envoyé 97 millions de gourdes alors qu’en 2020 aucun fond n’a été transféré à la DGI’’, selon le rapport.

Le rapport Latortue révèle également que « ‘Stéphane Gilles, actuel keybordiste de ‘‘Sweet Micky’’ et consul général intérimaire depuis plusieurs années, aurait détourné un montant de 1.2 millions de dollars américains provenant des frais de passeport et des extraits des archives ».

Selon le même rapport de février 2022, ‘‘depuis neuf (9) mois, Stéphane Gilles n’aurait versé pas un sou aux Archives nationales qui émet les extraits ni à l’Ambassade d’Haïti à Washington qui fabrique les passeports des haïtiens vivants à l’étranger.’’

Citant le directeur général des Archives nationales, Wilfrid Bertrand, le rapport Latortue a indiqué que le consulat d’Haïti à Miami, aurait une dette de 500 mille dollars américains envers l’institution.’’

Le Consulat doit également un montant d’environ 700 mille dollars américains à l’Ambassade d’Haiti par laquelle les fonds collectés pour le trésor public devrait transiter.

L’auteur de l’enquête, Youri Latortue a déclaré que ‘‘le consul général n’a jamais fourni d’explication sur le détournement de ces fonds.’’

‘‘De même, a-t-il poursuivi, l’ambassadeur haïtien à Washington d’alors, Bocchit Edmond n’aurait jamais exigé le versement de ces fonds pour les transférer au trésor public, soulignant qu’il s’agit de taxes des contribuables qu’on ne peut utiliser en dehors du cadre légal établi par les lois haïtiennes.’’

Selon une autre source consulaire, le fonctionnement du consulat s’est considérablement détérioré depuis qu’une “entreprise de corruption” y a été installée au sein de l’institution.

« Grâce à cette entreprise, souligne la source, des cadres du consulat ayant de changé de statut de diplomate à résident des Etats-Unis, ont quitté leurs fonctions officielles pour devenir des contractuels afin de continuer à faire tourner la machine ».

Selon la source, “cette entreprise qui impliquerait le consul général et au moins deux femmes influentes du consulat, consisterait à fabriquer, de manière irrégulière, des passeports qui sont livrés relativement dans temps normal.”

“Ce qui ouvre la voie à d’autres détournements de fonds, ajoute la source qui requiert l’anonymat.”

Parallèlement, les employés de la section-passeport du consulat, n’auraient pas reçu leur salaire depuis plus de dix mois alors qu’ils travaillent pour l’entité qui génère le plus de revenu,  confie la source.

“Cependant, les individus qui ont tronqué leur statut diplomatique à celui de résidents des États-Unis,

qui composeraient le cercle rapproché du consul général, aurait reçu jusqu’au dernier trimestre de 2022, des frais mensuels de l’ordre de 1500.00 dollars, en plus de leur salaire qu’ils perçoivent régulièrement.”

“Ces frais ne proviendraient pas du ministère des affaires étrangères. Ce serait une courtoisie du patron du consulat, le consul général”, selon la source.

En plus d’un audit général au niveau de l’ensemble des consulats et ambassades d’Haïti à l’étranger, Youri Latortue exige l’ouverture d’une enquête administrative en vue de fixer les responsabilités de ceux qui pilotent cette machine de corruption au niveau de la diplomatie haïtienne.

Le rapport Latortue a été transmis à la  Cour Supérieur des Comptes et du Contentieux Administratif(CSCCA).

Quant aux employés du ministère des affaires étrangères, ils perçoivent, en effet, un mois de salaire tous les quatre ou cinq mois, a appris RHINEWS. Certains cadres n’écartent pas la possibilité de démissionner pour n’avoir pas été rémunéré régulièrement.

Le consulat fait face à un personnel pléthorique. Certains vices-consuls n’auraient pratiquement aucune tache définie autre qu’apposer le sceau sur des documents élaborés par des cadres de l’institution.

La Rédaction de RHINEWS a contacté en vain le consul général de Miami, Stéphane Gilles pour avoir ses commentaires.